Henri Joseph Dalmanza Gosse de Gorre

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Henri Joseph Dalmanza Gosse de Gorre est né à Paris le 16 janvier 1806 et décédé le 14 février 1866 à Beuvry), fils de Henri Joseph Aimé Gosse de Gorre et Marie Joséphine Amélie Hu.

Il obtient sa licence de Droit à Paris le 8 août 1829 et est reçu avocat en 1830. Avant d’être sous-préfet, il déclare avoir été capitaine commandant de Garde Nationale. Nommé sous-préfet de Saint-Pol-sur-Ternoise de 1832 à 1838, puis de Doullens (dans la Somme) à partir du 2 novembre 1838 jusqu’au 9 décembre 1841, il est à nouveau nommé à Saint-Pol-sur-Ternoise, mais revient à Doullens après seulement 4 mois et y reste jusqu’en 1848.

Lors de la première nomination, la confusion est entretenue, certains pensent même que c’est son père qui est nommé : on suggère ainsi de manière volontairement indélicate qu’il est un « bâtard » comme le montre la presse de l’époque  :

« Des doutes s’élèvent sur la nomination de notre député à la sous-préfecture de Saint-Pol. Certains prétendent que ce serait son fils. Nous savons qu’à la sous-préfecture les mêmes incertitudes ont d’abord existé, mais que bientôt on s’est convaincu que l’ordonnance royale ne pouvait concerner que notre député, car le fils qu’il a et auquel pouvait s’appliquer le nom de GOSSE DE GORRE repris dans l’ordonnance royale est un riche propriétaire qui habite Douai, qui ne doit pas vouloir de place et qui serait peut-être encore moins propre que son père à être sous-préfet. »


Vers 1833, ces attaques sont rappelées également dans le dossier du procès qu’il fit à Monsieur de Briois dans l’exposé des délits dont voici un extrait :

« 2° [délits impliqués à M. de BRIOIS] d’avoir le 29 août 1833 se trouvant dans le cabinet du sous-préfet de St-Pol outragé ce dernier en lui disant à la suite d’un défi « ce serait trop d’honneur pour un mauvais bâtard de se mesurer à moi, vous êtes indigne d’être sous-préfet, vous êtes un lâche », 3° d’avoir le même jour proféré à plusieurs reprises et jusques dans la rue les mêmes expressions contre le sous-préfet, 4° d’avoir le 31 août 1833 outragé le même disant aux deux gendarmes venus l’arrêter et en présence du maire de Sachin « que c’était le sous-préfet de St-Pol qui le faisait arrêter, que c’était un petit homme taré sans cœur ni honneur, un enfant adultérin né dans la fange, issu d’une fille de basse-cour »

Le commentaire du journaliste est non moins méchant :

« M. Gosse de Gorre sous-préfet, ou du moins l’individu qui se présente sous ce nom et avec cette qualité dépose le premier. Il récite avec un accent larmoyant une leçon apprise par cœur sur les faits de sa cause, il termine avec un air qu’il cherche à rendre imposant et dit qu’il méprise les injures, qu’il demande justice et qu’il espère l’obtenir aujourd’hui ».  »

Quoi qu’il en soit, Henri Joseph Aimé Gosse de Gorre l’ayant légitimé, aucune suspicion ne doit être maintenue sur son géniteur. Leur ressemblance physique vient conforter cette idée.

Le sous-préfet sert loyalement le régime de Louis-Philippe Ier, notamment à Doullens dont la forteresse abrite de nombreux détenus politiques. En 1838, il déclare une fortune de 3000 francs. Son dossier ne contient pas de faits remarquables, mais seulement des demandes de congés et, après une absence trop longue, une retenue de traitement !

Révoqué par la révolution de 1848, il se retire dans la propriété, que son père qu’il assiste depuis 1846 lui a cédé, et se consacre alors à la vie locale. Conseiller municipal de Beuvry dès 1848, il est élu conseiller général du canton de Cambrin peu après. Concourant à l’élection de Louis Napoléon Bonaparte à la présidence de la République, il est un très ardent partisan du rétablissement de l’Empire.

Nommé sous-préfet de l’arrondissement de Pontoise (Seine-et-Oise) en 1853, il parvient par insistance à se faire nommer à Béthune jusqu’en février 1865, année où il prend sa retraite pour raison de santé. Fait chevalier de la Légion d’Honneur dès 1841, il a été élevé au grade d’officier en 1862. Il appartenait à la franc-maçonnerie.

Il a contribué à la création de la Société d’agriculture de l'arrondissement de Béthune. Homme puissant, il est en 1859 le deuxième contribuable du village et en 1861 le quatrième.

Bien que de forte nature, il est atteint d’une maladie grave qui l’emporte rapidement quelques jours après sa retraite.

Ses funérailles sont l’objet de discours  : de Monsieur Dugardin, conseiller de préfecture désigné par le Préfet, Henri Merlin, maire de Beuvry, Monsieur Dansou membre du Conseil Général du département et Monsieur Brasme secrétaire de la Société d’agriculture de l'arrondissement de Béthune, reconnaissant ses mérites et le convoi mesure deux kilomètres, à l’issu desquels il est inhumé dans la chapelle familiale au Quesnoy.

Il se maria le 3 janvier 1846 à Frévent avec Françoise Angélique dite Luglienne Leroy (née le 12 mai 1827 à Amiens, dans la Somme et décédée le 13 avril 1918 à Boubers-sur-Canche).

Son acte de naissance est un trésor d’erreurs :

« le quatorze mai mil huit cent vingt sept, une heure de relevée, il m’a été présenté un enfant du sexe féminin qui a été nommée Françoise Angélique, née la surveille à onze heures du soir, fille hors de mariage d‘un père inconnu et de Sophie Françoise LUGLIEN fille naturelle âgée de vingt six ans élevée à Paris laquelle a fait ses couches petite rue de Beauvais n°48 ; premier témoin Joseph VERU, planton de la Garde nationale, majeur demeurant rue au lin ; second témoin François DAILLE, planton de la Garde nationale, majeur demeurant rue pavée ; le présent acte rédigé sur la déclaration de Mr SEIGNEURGENS docteur en médecine qui a fait l’accouchement, et ont signé après lecture. Signatures : SEIGNEURGENS, VERU, DAILLE, J.FOUACHE »

et dans la marge les rectifications suivantes : Par jugement du 31 août 1846, le tribunal civil de l’arrondissement d’Amiens a ordonné que l’acte ci contre serait rectifié en ce que la mère y a été dite Marie Sophie Françoise Luglien fille naturelle de vingt six ans élevée à Paris, au lieu de Angélique Aline Leroy fille légitime âgée de quinze ans, née du mariage de François Robert Leroy contrôleur des contributions directes et de Marie Catherine Angélique Montguyon.

Il reste étonnant que cet acte n’ait été rectifié qu’après le mariage de la personne concernée.

Luglienne Leroy est élevée au château de Cercamps à Frévent où réside sa mère Angélique Aline Leroy. Son père est en fait le baron François Luglien de Fourment de Roye, propriétaire du château et de la manufacture de Boubers.

Angélique Aline LEROY a également deux autres enfants, mais, étant alors marié, le baron de Fourment ne peut reconnaître sa progéniture. Afin que ses enfants portent un titre, le baron de Fourment fait alors épouser à Angélique Aline Leroy le Marquis Antoine de Hamel-Bellenglise, seigneur de Bouret et de Grand-Rullecourt. Mais voici qu’au moment du mariage, ce dernier « omet » de légitimer les enfants de sa nouvelle épouse, se dérobant en maugréant « que j’épouse la mère passe encore car elle devient marquise, mais que je donne mon titre à ses enfants, non ! ».

Au décès de son époux, Luglienne Leroy demande l’autorisation d’établir un caveau de famille sous la chapelle de Gorre, comme le montrent les documents suivants :

Lettre du 14 juin 1866 de Madame Gosse de Gorre au Préfet du Pas-de-Calais :

« Ce serait une grande satisfaction pour moi d’obtenir l’autorisation d’établir un caveau de famille sous la chapelle de Gorre que je viens de vous prier de bien vouloir appuyer ma demande que M. le Maire de Beuvry a dû envoyer à M. le sous-préfet pour vous être adressée. […] J’attache un double prix à réussir, d’abord parce que mon mari le désirait, parce que je lui ai promis de m’en occuper et, parce que je trouve ainsi le moyen de contribuer à achever la chapelle de Gorre qui est commencée depuis deux ans et qui reste inachevée faute d’argent. Permettez-moi, M. le Préfet de placer le vœu d’un mourant sous votre protection et laissez-moi espérer que votre précieux concours amènera un heureux résultat. Veuillez agréer... »

Le 27 juin 1866, il a été répondu qu’ « il était impossible d’accéder à cette demande par application de l’article 1er du décret du 23 prairial an XII [qui] interdit toute inhumation dans les églises et autres édifices ouverts aux cultes ; il n’y a d’exception qu’à l’égard des évêques mais alors une autorisation spéciale du chef de l’Etat est indispensable. ». Luglienne Leroy dût insister suffisamment pour obtenir gain de cause, mais ces documents n’ont apparemment pas été conservés.

A l’occasion de leur mariage, les époux avaient conclu un contrat de mariage le 30 mai 1846 par devant Me Poulain notaire à Frévent, les futurs époux adoptant le régime de la communauté sans que les époux soient :

« tenus des dettes et hypothèques l’un de l’autre faites et créées avant la célébration du mariage ou dont seraient grevés les successions, dons et legs qui leur écherraient lesquels seraient à la charge de l’époux débiteur ou grevé », l’époux apporte « en meubles, effets mobiliers, numéraires et recouvrements d’une valeur de dix mille francs, le domaine de Gorre comprenant le château, les bâtiments, bois et enclos d’une superficie de dix hectares quatre vingt quinze ares six centiares qu’il possède entièrement, son père lui ayant donné sa part d’un tiers par acte devant Me Duquesnoy notaire à Beuvry le 2 janvier 1839, un deuxième tiers ayant été acheté à sa sœur Amélie épouse de François Ferru propriétaire à Douai par acte devant Me Tarlier notaire à Douai le 1er août1843, le troisième tiers ayant été acheté à sa sœur Clara Amélia d’Almanza Gosse de Gorre épouse de Phanore Charles Joseph Leclercq juge suppléant au tribunal de Saint-Omer au terme d’un acte reçu par Me Duquesnoy notaire à Beuvry le 6 janvier 1846 » l’usufruit que son père s’était réservé a été rétrocédé à ses enfants moyennant ...quinze mille francs en comprenant le mobilier du château et deux mille quatre cents francs de pension alimentaire annuelle l’époux fait valoir qu’il existe sur ce domaine des arbres pour une valeur importante dont il se propose de faire la vente incessamment et que cette vente produira nécessairement indemnité à son profit contre la communauté, de plus son apport est grevé outre la pension viagère paternelle d’une dette totale de quarante sept mille francs » qui « diminuera d’autant son apport et donnera de plein droit lieu à indemnité envers la communauté, l’épouse apporte en mariage une valeur de trente mille francs en bijoux, diamants, dentelles, effets mobiliers tels que meubles meublans, linge de lit et de table, ustensiles de ménage, piano et argenterie [ ] en numéraire et créances à terme et d’un recouvrement certain une somme de deux cent soixante quinze mille francs à elle appartenant et se trouvant en sa possession »

duquel apport total « il a été justifié à Monsieur Gosse de Gorre et la certitude quant au recouvrement et [lequel] consent d’en demeurer chargé par le seul fruit de la célébration du mariage ». Dans l’article 6, « le survivant des futurs époux reprendra par préciput, avant partage des biens, meubles de la communauté, sans estimation ni prix, si c’est le futur époux ses habits, linges de corps, montre et bijoux plus sa bibliothèque, si c’est la future épouse ses habits, linges de corps, tous ses objets de parure et de toilette, joyaux, dentelles, bijoux et diamants » et « en outre le survivant reprendra au même titre de préciput sans estimation ni prix ceux des meubles et effets mobiliers qu’il voudra choisir parmi ceux de la communauté jusqu’à concurrence de six mille francs [ ] ou bien si le survivant le préfère cette somme en argent comptant ».

Dans l’article 7 il est précisé que : « les premières acquisitions d’immeubles faites pendant le mariage seront de plein droit propres à la future épouse jusqu’à concurrence de son apport »..

Evacuée suite à la destruction partielle du château et la proximité des lignes du front, elle meurt à Boubers-sur-Canche où elle est d’abord inhumée. Le 8 avril 1924, son corps est rapporté pour être inhumé dans la chapelle du Quesnoy.

A la dernière exhumation, lors du transfert dans un nouveau cercueil, le corps qui paraissait intact se disloqua comme l’indique ce témoignage :

« Le dernier descendant et son épouse étaient présents, ainsi que deux policiers, les fossoyeurs, le chef des travaux et des curieux. Tout fut fait dans une journée de la semaine. Les tombes ouvertes furent identifiées malgré les divers changements de plaques devant chaque tombe. Les guerres de 1914-1918 et 1939-1945 étaient passées par là, à savoir fouilles des caveaux pour rechercher armes, bijoux et autres dans les cercueils. Nous avons trouvé en masse des crucifix, mais bien peu d’autres choses. Des nouveaux cercueils (5, 6 ou 7) avaient été fabriqués par mon oncle Jules Leroy (frère de mon arrière grand’mère, sans parenté avec les protagonistes cités ici) pour le transfert. Il faut savoir que tout fut remis dans ces nouveaux cercueils à la demande de l’héritier et en accord avec les autorités. Tout fut transporté au cimetière de Beuvry. (…) Françoise Angélique Leroy était très bien conservée, le teint hâlé, habillée en dentelles fines de Calais, coiffée et apprêtée, avec de très longs cheveux auburn, ainsi que de très longs ongles qui avaient continué de pousser après son décès. Elle était très belle. Pour la mettre dans le nouveau cercueil, les croque-morts la soulevèrent, le tronc se détacha soudainement et tomba en poussières ; les restes furent remis tant bien que mal en place. Je sens encore les fortes odeurs de salpêtre dans toutes ces ouvertures de cercueils ! »

Sources