L'histoire locale dans le Pas-de-Calais

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L’histoire locale, au sens très large du terme, est chose ancienne sur les territoires ayant formé le Pas-de-Calais, si on veut bien considérer que cette discipline s’intéresse en priorité aux lieux et aux hommes.

Avant l'an 1200

  • Les travaux historiques émanent en premier lieu des clercs, et principalement des moines qui vivent dans les abbayes. Seule la langue latine est alors utilisée.
  • Les premières œuvres relèvent de l’hagiographie, c’est-à-dire qu’elles concernent la vie des saints locaux et qu’elles visent à édifier les clercs et les chrétiens par leurs mérites. Ces productions émanent généralement des abbayes que ceux-ci ont contribué à fonder, mais elles ont été souvent remaniées par la suite. La Vita Audomari (Vie de saint Omer) est la plus ancienne de celle qui nous a été conservée, puisqu’elle date du IXe siècle.
  • La Renaissance carolingienne voit la floraison de nouveaux genres, tout d’abord les Annales dont nous ont parvenues celles des abbayes de Saint-Vaast d’Arras et de Saint-Bertin. Celles-ci ont cependant une portée générale et le local n’y apparait qu’incidemment. Les cartulaires, chroniques concernent surtout l’histoire des abbayes. Folquin, moine de Saint-Bertin, a réalisé celui de son abbaye vers 960; il s’est nourri des archives qui y étaient conservées. Il ouvre ainsi la série des chroniques bertiniennes qui connaîtront des prolongements dans les siècles suivant avec les livres de Simon et d'Iperius.
  • Enfin, on note l’émergence des généalogies. La plus ancienne, qui concerne les comtes de Flandre, fut l’œuvre de Witger, un moine de Saint-Bertin. Elle fut rédigée entre 951 et 959.
  • Quelques éléments d'histoire locale se trouvent dans le Liber floridus, cette encyclopédie rédigée vers 1120 par Lambert de Saint-Omer, chanoine de Notre-Dame. Outre quelques notes généalogiques concernant son ascendance, il fournit une chronologie qui fixe les dates essentielles des comtes de Flandre, de Boulogne, des évêques de Thérouanne et des dignitaires de Notre-Dame.

Le temps des chroniqueurs (1100-1600)

L'histoire ecclésiastique

L'histoire ecclésiastique reste un genre assez fécond durant les siècles du moyen-âge. Elle émane toujours des clercs qui produisent leurs œuvres en latin. Jean d'Ypres,mort en 1383 plus connu sous le nom d'Iperius donne une nouvelle version d'une Chronique de Saint-Bertin jusqu'en 1294.

On peut supposer que l'évêché de Thérouanne fit également l'objet d'une chronique que les historiens anciens ont connu sous le nom de Chronicon Morinense. Guillaume d'Andres rédige au XIIIe siècle une chronique de son abbaye, nourrie de ses chartes. L'abbaye de Clairmarais dispose aussi de sa chronique avant la fin du XIIIe siècle.

Des chroniques attachées aux grandes familles

C'est peut-être Lambert, curé d'Ardres (1160-1227), qui inaugure pour nos territoires ce nouveau genre dans une Historia comitum Ghisnensium, ou Chronique de Guînes et d'Ardres, dans laquelle il retrace l'histoire de ces deux familles seigneuriales. Citons aussi Baudouin d'Avesnes, dont la Chronique concerne plutôt le Hainaut, mais qui par la matière généalogique qu'il y développe, s'intéresse à quelques familles qui lui sont apparentées (les châtelains de Saint-Omer, les Créquy, etc..)

Les chroniqueurs

A partir du XIIIe siècle, les œuvres historiques sont écrites aussi dans la langue française. Dès le XIVe siècle, fleurissent quelques chroniques de Flandre et d'ailleurs, anonymes pour la plupart, mais dont certaines ont pu être l'oeuvre d'Artésiens ou de Boulonnais, puisque la matière locale est fortement présente dans leurs écrits. On notera, à titre d'exemple, la Chronique Artésienne, du début du XIVe siècle, une Chronique anonyme de Flandre, conservée à la Bibliothèque de Saint-Omer.

Au XVe siècle, si les plus grands chroniqueurs restent attachés aux ducs de Bourgogne, dont ils retracent la geste politique, quelques-uns, moins importants, fournissent des œuvres pittoresques où le local trouve bien sa place, tels Jacques du Clercq. Au XVIe siècle, Louis Brésin, natif de Vaudringhem, poursuivra dans cette voie.

La généalogie

Ce sont encore les familles comtales qui font l'objet de généalogies. Et tout d'abord, la famille de Flandre. Witger trouve, dans ce créneau, de nombreux continuateurs qui ne se contenent pas d'actualiser la généalogie, au fur et à mesure du temps qui passe, mais qui peu à peu, construisent la légende des origines de Flandre, en y intégrand les grands forestiers. Lambert de Saint-Omer, en son Liber Floridis fournit même, vers 1120, une ascendance qui remonte à Priam, duc des Troyens. Cette matière flamande reste alimentée par les moines de Saint-Bertin, relayés dès le XIIe siècle, par ceux de Clairmarais.

Pour ce qui est des comtes de Boulogne, c'est tout d'abord à une ascendance prestigieuse de Godefroy de Bouillon, premier roi de Jérusalemm, que l'on s'est attaché dès la fin du XIe siècle. On le fait remonter jusqu'à Priam, père de Faramond, par les ducs de Namur. Vers 1200, Lambert d'Ardres fournit quelques éléments généalogiques empreints de légende. C'est cependant au sein de l'abbaye de Saint-Wulmer de Samer que se contruira la grande généalogie des comtes, dans le courant du XIIIe siècle, généalogie largement légendaire pout tout ce qui est antérieur à l'an mil.

L’histoire du XVIIe siècle à la Révolution

Le XVIIe siècle porte la marque de l'érudition qui imprègne alors les travaux historiques. Ceux-ci s'appuient sur des sources plus ou moins critiquées. Ces voies nouvelles sont alors pleinement explorées par les Jésuites, puissants dans les XVII provinces des Pays-Bas, et les Bénédictins du royaume de France (Mabillon, Congrégation de Saint-Maur). Le temps est à la visite des chartriers, aux recollements d'actes, à l'édition de textes, dans laquelle le local ne peut que trouver sa part.

De 1590 à 1660: les premiers grands travaux d'érudition

  • Les recherches historiques, dans la partie artésienne, se place dans le cadre des Pays-Bas espagnols, d'une large Belgique, sion redécouverte, du moins prise en considération.
  • Deux Artésiens Guillaume Gazet et Ferry de Locre produisent des histoires ecclésiastiques des Pays-Bas, vastes catalogues chronologiques d'évêques, d'abbés et de saints. Leur objectif vise l'édification des chrétiens, dans le cadre d'une Réforme catholique conquérante.
  • L'Anversois Aubert le Mire, dans son oeuvre féconde, publie systématiquement les textes puisés des chartriers de la Belgique, au sens large. Les chartes les plus anciennes des abbayes d'Artois sont alors éditées.
  • Les Jésuites renouvellent profondément le genre hagiographique en recherchant lleurs sources dans les bibliothèques. Si Herbert Rosweyde (569-1629) accumule la documentation sans trop de méthode, ses successeurs, Jean Bolland et les Bollandistes font oeuvre de clarté, de rigueur et d'approche critique dans la publication des vies de saints (les Acta Sanctorum) qui débute en 1643 et qui se prolongera jusqu'à maintenant. Dans la même veine, Joseph de Ghesquière de Raemsdonk, jésuite, né à Courtray vers 1736, mort vers 1800, publie entre 1783 et 1794 les six volumes des saints de la Belgique, les Acta Sanctorum Belgii.
  • Au plan plus strictement local, l'époque est dominée par les travaux de Jacques Malbrancq sur la Morinie (1639-1654), ouvrage qui fera date et référence pour des générations d'historiens locaux.

De 1660 à la Révolution: le développement de la quête de textes

Le développement des sciences auxiliaires

Ce développement s'oriente dans plusieurs directions

Les curiosités archéologiques

La Renaissance a permis uen redécouverte de l'Antiquité et de son archéologie. La curiosité vers les choses antiques est indéniable, notamment vers les découvertes de la période gallo-romaine. Elles sont souvent le fruit du hasard, comme c'est le cas au XVIIe siècle avec un tombeau trouvé à Course, paroisse de Doudeauville, ou encore à la Calicque. La curiosité va aussi vers les monnaies romaines. Dans son histoire de la Picardie, dom Pierre-Nicolas Grenier recense des monnaies trouvées à Menneville, Wailly-Beaucamp, Villers-l'Hôpital, Longvilliers, Gouy-Saint-André, Boulogne-sur-Mer, Carvin, Autingues[1]. La plupart de ces découvertes datent du XVIIIe siècle. Même intérêt pour les voies romaines, après les travaux de Nicolas Bergier. En son temps, Malbrancq avait, le premier, tenté une description du réseau routier de la Morinie antique. La question avait été reprise par dom Grenier.

Les recherches épigraphiques et héraldiques

Des recueils épigraphiques existent depuis le XVIe siècle. Avant la guerre de Trente Ans, on signalera les épitaphiers de d'Aubrometz et de Jacques du Clerck et par la suite, les travaux d'Estienne Le Pez et de Malotau de Villerode. Ces travaux, où les données sont parfois contradictoires, ont largement été exploités par Roger Rodière, pour ses recherches épigraphiques dans le Pas-de-Calais.

La généalogie à l'épreuve de l'érudition

La généalogie connaît un développement important à partir de la fin du XVIe siècle. Elle ne s'intéresse plus seulement aux familles princières et royales, mais se tourne désormais vers l'ensemble des familles nobles et parfois bourgeoises. C'est le moment où les lignages aristocratiques construisent leur histoire.

Ce phénomème est lié à la montée en puissance du pouvor royal et de l'absolutisme et l'exigence des preuves de noblesse pour accéder à certaines charges ou à certaines institutions, ou tout simplement pour échapper à l'impôt rôturier.Il appartient lors aux généalogistes du roi (les d'Hozier, les Chérin, etc..) de les vérifier, sinon de les établir, de les valider. La règle est alors de prouver par des actes authentiques les filiations. Le genre bénéficie des progrès de l'érudition et nombre d'érudits produisent aussi des généalogies (André Duchesne, dom Le Pez). Il s'en faut de beaucoup, cependant, pour que ces règles de saine érudition soient toujours suivies et les travaux généalogiques fourmillent encore d'éléments "mythologiques" et l'exigence de la preuve favorise parfois la fabrication de faux.

La production généalogique est importante et fort diverse, bien souvent sous forme de manuscrits. Elle peut faite état d'oeuvres originales, mais compte aussi nombre de continuations et de compilations.

  • Des dossiers de généalogies renfermant de nombreux éléments: généalogies, titres, filiations critiques. Dans ce regitre, il faut compter les titres des cabinets des généalogistes du roi conservés à la Bibliothèque nationale
  • Des recueils de généalogies par province (Artois, Flandre, Boulonnais, Picardie) dont les formes les plus élaborées ont pu conduire à des nobiliaires provinciaux (Adrien de Lamorlère, Dumont)
  • Des histoires généalogiques de famille. Dans la première moitié du XVIIe sicle, André Duchesne s'est fait l'historien des comtes de Guînes et des seigneurs de Béthune et son travail est appuyé par des preuves. Parmi les auteurs qui ont traités des familles artésiennes et boulonnaises, on peut signaler Pierre d'Hozier, Le Carpentier, etc..
  • A noter pour le XVIIIe siècle, les sommes généalogiques du père Anselme et de la Chesnays-Desbois (Dictionnaire de la noblesse)

L'histoire provinciale

le Boulonnais

Sous l'Ancien régime, le Boulonnais est rattaché à la province de Picardie. Eugène Dramart, en son temps, a recensé quelques historiens qui ont rassemblé des notes et des documents, dont très peu ont fait l'objet de publications, mais qui ont servi de référence aux historiens postérieurs. Parmi ceux-ci on note le juriconsulte Regnard, Jean Scotté, Antoine Scotté de Velinghem, son fils, Michel Lequien, Dom Ducrocq, bénédictin de Saint-Wulmer de Samer, [[Philippe Luto], le curé de Boucres et de Saint-Inglevert, Dubuisson, Louis Duquesne de Clocheville (1721-165) et Abot de Bazinghem


Le Calaisis

Les pionniers de l'histoire en Calaisis ou Pays reconquis sont Georges Lapostre, mort après 1615, Marin Bailleul, qui fut curé de Sangatte, Pierre Anquier, un notaire, l'abbé Lefèvre, Guillaume Antoine Hyppolité Pigault de Lépinoy (1726-1797)

Le Saint-Polois

L'historien du comté de Saint-Pol est incontestalement Thomas Turpin, qui publia en 1731 une histoire écrite en latin sur les comtes et le comté de Saint-Pol.

L'Artois

L'histoire provinciale d'Artois est dominée par Alexandre-Xavier Harduin (1718-1785, membre de la Société littéraire d'Arras et surtout par les oeuvres concurrentes de Dom Charles Devienne et Jean-Baptiste François Hennebert.

Département, arrondissements, cantons, objets nouveaux de l'histoire (1789-1830)

Le temps des sociétés savantes (1830-1945)

Les sociétés savantes créées avant 1945

L’Université et l'histoire régionale et locale

Les travaux pionniers

Dans le sillage de la nouvelle histoire

Tendances actuelles

Les travaux universitaires

La floraison des associations d’histoire locale (depuis 1945)

Les associations

Histoire locale

Généalogie

Les associations de soutien

Bibliographie

  • Eugène Dramard, Bibliographie géographique et historique du Boulonnais, Paris, 1868 (un aperçu intéressant sur l'historographie du Boulonnais)
  • Osile Paris-Barubé, La province antiquaire. L'invention de l'histoire locale en France (1800-1870), Editions du Comité des travaux historiques et scientifiques, 2011

Liens internes

Bibliographie dans l'ordre chronologique

Bibliographie par thème


Notes

  1. Roland Delmaire, Trouvailles monétaires anciennes en Picardie d'après les manuscrits de Dom Grenier, Revue archéologique de Picardie, n° 4, 1982