Plaque à la 61e division britannique (Laventie)

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Plaque à la 61e division britannique

Située sur la mairie de Laventie, cette plaque commémore l'engagement dans le secteur de la 61e division britannique au cours de la première guerre mondiale. Elle a été inaugurée le 21 avril 1935.

Épitaphe

This Tablet was erected by the British 61st division to commemorate fallen comrades

The division first served during the great war in the neighbourhood of this town of Laventie and is proud to leave its dead sleeping in the sacred oil of France


La 61e division britannique à ses camarades tombés au champ d’honneur

Cette division qui engagea ses premiers combats, au cours de la grande guerre 1914-1918, dans le voisinage de Laventie, est fière de laisser reposer ses morts dans la terre sacrée de France

Inauguration

Le Journal de Lens rapporte l'inauguration de la plaque dans son édition du 28 avril 1935 :

« « La 61e division britannique à ses camarades tombés au champ d’honneur

Cette division qui engagea ses premiers combats, au cours de la grande guerre 1914-1918, dans le voisinage de Laventie, est fière de laisser reposer ses morts dans la terre sacrée de France  »

Gravée dans l’airain, telle est la formule, dont le laconisme n’est pas sans grandeur, et qui désormais perpétuera le souvenir de ceux dont le sacrifice a été officiellement magnifié dimanche dernier à Laventie, au cours de la cérémonie d'inauguration d'une plaque commémorative. Cérémonie, qui, on le conçoit, fut le prétexte d’une belle autant qu’émouvante manifestation de l’amitié franco-britannique.

Les personnalités à l'inauguration

M. Henry Chavin, le distingué sous-préfet de Béthune, représentait officiellement le gouvernement de la République, ayant à ses côtés M. Louis Couhé, conseiller général, directeur de l’aviation civile et commerciale au ministère de l’Air ; Depis, procureur de la république ; M. Feutrie-Bajeux, conseiller d’arrondissement ; M. Dumont, maire de Laventie. Sir Colin Mackensie, major général, avait été délégué par le gouvernement anglais. Il était entouré de MM. Le brigadier général A.H. Spooner, le brigadier général L.L. Bilton, le lieutenant général Sir Isor Maase, le major général Lord Salisbury, l’attaché militaire adjoint à l’ambassade britannique à Paris, major Johnston, le général Sir Frédérick B. Maurice, les colonels Sir Saymour Williams, Metford, Hilder, Howkins, Foster, Gardener, Mackie, Hugginson, chef des services d'entretien des cimetières britanniques dans la région Nord.

Dès 14 heures, les sociétés communales, la compagnie des sapeurs-pompiers en grande tenue, une compagnie du 110e, de la musique de ce régiment et un important contingent d’anciens combattants anglais, la poitrine barrée de nombreuses médailles, ainsi que la fanfare des mines de Bruay, formaient le carré devant la plaque commémorative. Cette dernière était cachée sous les drapeaux anglais et français.

Après l’exécution des deux hymnes nationaux par la musique du 110e, les prières et un cantique repris en chœur par toute l’assistance d’anciens combattants anglais, le major général sir Colin Mackenzie prononça un discours dont les nobles paroles et la péroraison produisirent sur la foule et sur les officiels une profonde impression. Après avoir salué et remercié M. Chavin, représentant du gouvernement français, et M. Dumont, maire de Laventie, le délégué du gouvernement anglais évoqua la rude bataille de la Lys en 1918, affirma l’amitié indéfectible du Tommi anglais et du poilus français, et il termina sur ces mots rassurants pour les amis de la paix :

« J’espère que si le besoin se faisait sentir à nouveau, nous serions encore les mêmes amis qu’en 1914-1918 ».

M. Dumont, maire de Laventie, exprima sa reconnaissance à l’adresse des alliés qui luttèrent et moururent pour la défense du sol de sa commune. Il se fit garant de l’amour commun dans lequel la population unit les héros anglais et français. Aussi, la plaque commémorative sera-t-elle l’objet, de la part de la ville de Laventie, de soins pieux et attentifs. Et M. Dumont termine son allocution sur le cri de « Vive l’Angleterre et Vive la France ».

Le discours de M. Chavin, sous-préfet de Béthune Le représentant du Gouvernement français prit ensuite la parole. Sous une forme impeccable, digne de sa noble inspiration, le discours officiel, dans les circonstances présentes, prit les allures d’un véritable acte de foi : foi en l’avenir de la Patrie, foi en l’amitié franco-anglaise. L’assistance écoutait, recueillie, conquise : l’âme d’un vrai français, fut-il officiel, est si près de l’âme de la foule !… Or, M. Chavin laissait parler son cœur. Et voici ce qu’il disait :

J’apporte l’hommage ému du gouvernement de la République aux nobles fils du Royaume-Uni en l’honneur desquels ce mémorial est érigé. Je salue avec respect l’éminent chef de la 61e division, le major général Sir Colin Mackenzie, M. l’attaché militaire, représentant S.E. M. l’ambassadeur de Grande-Bretagne à Paris, et les très distingués officiers généraux et supérieurs qui sont parmi nous.

Le général Sir Colin Mackenzie lors de l'inauguration

J’adresse mon salut le plus cordial aux anciens combattants anglais qui, en ce jour de Pâques, sont venus témoigner de leu r souvenir affectueux et fidèle à leurs frères d’armes tombés sur notre sol. Soyez remerciés et félicités, Messieurs, de votre pieuse pensée et de votre présence si sympathique. Aux souhaits de bienvenue que je vous adresse s’unissent, non seulement les personnalités civiles et militaires, qui m’entourent, mais aussi les anciens combattants de la ville, la population de Laventie, M. Louis Couhé, conseiller général, un des grands chefs de notre aviation, et de nombreux élus que je m’excuse de ne pouvoir tous nommer. Vous avez réussi messieurs, à donner à cette cérémonie un caractère d’émouvante simplicité. En cette minute, nous revivons des événements déjà anciens, mais qui demeurent à jamais gravés dans nos mémoires. L’année 1918 vient de s’ouvrir. Libérés de tout souci concernant le front russe, les dirigeants allemands savent néanmoins que, dans la guerre d’usure, ils vont s’épuiser les premiers. Si Anglais et français ont été eux aussi durement éprouvés, le secours américain va leur arriver.

L’Allemagne ne croit plus depuis longtemps à la guerre fraîche et joyeuse. Elle souffre et s’impatiente. Ludendorff va, dans une série d’offensives s’échelonnant de mars à juillet 1918, tenter de forcer le destin. La première attaque, déclenchée le 21 mars contre la Scarpe et l’Oise prend fin le 5 avril. Le flot, constate Foch, est venu mourir devant Amiens. Précédée d’une longue et violente canonnade le 9 avril, à huit heures du matin, une nouvelle et redoutable offensive s’amorce sur un front de 15 kilomètres, entre la Lys et le canal de La Bassée. C’est le début de la bataille de la Lys, première phase de la bataille des monts des Flandres. Elle durera sept jours. Laventie et les villages voisins, de nombreuses communes des cantons de Béthune et de Cambrin, vont inscrire leurs noms dans l’histoire. La surprise passée, vos magnifiques soldats s’accrochent à la ligne Givenchy-Festubert-Hinges-Mont-Bernanchon-Robecq, qui va devenir la couverture de Béthune.

Détail

Un tel raccourci ne peut, Messieurs, montrer l’héroïsme collectif des vôtres, le rôle splendide de la 61e division, encore moins les actions d’éclat individuelles. Hélas ! Les 45000 tombes anglaises de cet arrondissement – sur lesquelles veille M. le colonel Higginson – témoignent assez de votre valeur. Il n’est point de mots propres à célébrer un tel sacrifice. Il n’est qu’un moyen de la reconnaître : c’est de nous employer à préserver les jeunes générations futures du retour d’un tel malheur.

Vous venez de parcourir ce pays de Laventie, essentiellement agricole. Vous avez vu ses toits modestes, ses champs aux cultures variées dont il a fallu, durant de longs mois, panser infatigablement les blessures. À qui ferait-on croire que ces terriens ne sont pas animés d’un ardent amour de la paix et ne préfèrent la charrue au canon ! À qui ferait-on croire que tous les Français, ceux de la mine, des ateliers et des bureaux, ne partagent pas ce sentiment. Ils pensent avec Disraeli que, la vie est trop courte pour être petite ; qu’il est sage de ne pas l’empoisonner par la haine, mais au contraire, de l’illuminer de douceur, de compréhension et de bonté. Ces aspirations sont aussi les vôtres. Profondément attachés depuis des siècles à toutes les grandes causes morales, vous avez la passion du beau, du bien et du vrai, l’horreur de la force insolente. L’amour de la patrie, l’amour du home, vous le transportez avec bonheur dans vos possessions les plus lointaines. Votre serviabilité et l’agrément de votre accueil sont si connus que le rêve de l’étranger est de s’asseoir à un foyer anglais en une veillée de Christmas.

Mais il est un peuple pour qui notre idéal commun n’est que billevesées. Il voudrait nous en imposer un autre, fondé sur l’instinct grégaire, et d’après lequel il ne serait plus permis à âme qui vive d’agir, de penser, de respirer, sans l’ordre de surhomme investis, par eux-mêmes, du pouvoir de vie et de mort sur l’ensemble de l’humanité. Devant une pareille prétention, n’est-il pas trop facile d’objecter que chaque race a son génie particulier, que seule l’Angleterre pouvait produire Shakespeare et Dickens, que les qualités de Descartes et de Voltaire, de Kant et de Hegel, sont représentatives des intelligences françaises et allemandes ? Ah ! Voyez-vous, la question qui se pose est au fond très simple : il s’agit de savoir si les nations libres garderont leur place au soleil et si l’esprit du home ne devra pas s’effacer devant l’esprit de la horde. A Stresa et à Genève, Anglais, Français et Italiens, soutenus par la conscience universelle, ont donné leur réponse.

La 61e division britannique vient de confier définitivement ses morts à la terre de France. Soyez assurés que nous veillerons avec amour sur ce dépôt sacré.

Aux jours solennels, vos fils seront honorés à l’égal des nôtres, entourés de la même tendresse et de la même reconnaissance. Élevons nos cœurs vers ces martyrs du Droit, et, fidèles à leur volonté suprême, jurons-nous messieurs, de maintenir intacte l’amitié qui unit l’Angleterre et la France. »

Sources

  • Le Journal de Lens
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