Rapports du Préfet du Pas-de-Calais en 1940

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Première Partie : 1940. Les Archives de France conservent les rapports des préfets adressés au ministre de l'Intérieur de l'été 1940 à la Libération(1944) (cotes F/1cIII/1135-F/1cIII/1198). Ces rapports ont été numérisés et sont consultables en ligne sur le site des Archives de France. Nous proposons une transcription de ces rapports indispensables à la compréhension de cette période de notre histoire. On trouvera ci-dessous les 4 rapports de l'année 1940 : 19 juillet, 30 septembre, 20 novembre, 30 décembre. Lien vers la page générale : Rapports du Préfet du Pas-de-Calais entre 1940 et 1944

Sommaire

19 juillet 1940

Arras, le 19 juillet 1940

Le préfet du Pas-de-Calais à Monsieur l'ambassadeur de France, délégué du gouvernement dans les territoires occupés.

M. le préfet du Nord m'a communiqué hier le texte de votre circulaire du 12 juillet courant, qui ne m'était pas parvenue. J'ai l'honneur de vous prier de vouloir bien trouver ci-après ma réponse aux différentes questions posées.

Dès le 27 mai dernier - l'occupation du Pas-de-Calais s'étant effectuée progressivement du 20 au 26 mai - je me suis efforcé, avec des moyens très limités et dans un département désorganisé à tous les points de vue, de reprendre en le développant, mon action administrative, qui n'avait pu s'exercer que d'une manière fragmentaire et dans une zone de plus en plus étroite, au cours de l'invasion.

En l'absence totale de moyens de communication, nous nous sommes appliqués, mes collaborateurs et moi-même, par des contacts directs avec certains élus ou fonctionnaires, voire même en faisant appel à des concours bénévoles, à régler les questions les plus urgentes. C'est le problème du ravitaillement qui, en tout premier lieu, a dû retenir notre attention - problème rendu singulièrement difficile du fait de la présence d'innombrables réfugiés de Belgique et du Nord alors que dans chaque ville ou chaque village les éléments essentiels de la vie économique faisaient défaut.

Puis, s’est immédiatement posée la question monétaire. À l'heure actuelle, une grande partie des rouages de la vie administrative, économique et sociale sont en état de fonctionner ; mais toute l'action, notamment sur le plan général, est entravée par la précarité des communications postales et l'absence de relations téléphoniques, télégraphiques et ferroviaires.

J’ai cru devoir signaler immédiatement cette situation au début du présent rapport car la « reprise » à laquelle nous voulons nous consacrer dépend, pour une large part, de la mise en marche des différents services des PTT et des chemins de fer.

Questions administratives

Le secrétaire général de la préfecture et mon chef de cabinet sont demeurés à mes côtés. Les chefs de division sont tous actuellement à leur poste. Sur un effectif de 30 chefs de bureaux, 11 sont présents ; 3 mobilisés et 6 évacués (dont 4 affectés spéciaux) manquent. Les sous-préfets de Béthune, Boulogne-sur-Mer et Montreuil-sur-Mer sont à la tête de leurs arrondissements. Pour remplacer le sous-préfet de Saint-Omer qui avait abandonné son poste, j’ai nommé sous-préfet à titre temporaire M. Lephay, directeur honoraire des contributions directes.

Les chefs de services annexes de la préfecture (archives, assistance publique, inspection départementale d'hygiène, service d'apurement et de liquidation des dommages de guerre), et les directeurs des établissements départementaux (hôpital psychiatrique et sanatoria) sont également présents. Seul, le secrétaire général de l'office départemental des mutilés n'est pas rentré, ce service fonctionne sous la direction des secrétaires-adjoints.

La plupart des directeurs des grandes administrations de l'État ont rejoint leur poste, certains dès la fin mai. Il en est de même des percepteurs, 8 seulement à l'heure actuelle sur 86 n'ont pas réintégré leur résidence ; mais il a été possible de parer à leur absence par la réunion de plusieurs perceptions ou l'installation de gérants intérimaires. En l'absence du directeur des contributions directes, qui est rentré avant-hier, j'avais délégué pour le remplacer temporairement un inspecteur principal. J'ai fait de même pour suppléer l'absence de l'ingénieur en chef des ports maritimes, ce service est en ce moment dirigé par un ingénieur des travaux publics de l'État en résidence à Calais.

En ce qui concerne l'administration judiciaire, il manque à l'heure actuelle, pour ne citer que les principaux magistrats, les présidents des tribunaux d'Arras, Saint-Pol-sur-Ternoise et Montreuil-sur-Mer ainsi que le procureur et un juge d'Arras. Pour reconstituer le tribunal d'Arras j'ai, en vertu des pouvoirs discrétionnaires qui m'avaient été conférés par le Gouvernement, délégué : comme président, M. Godefroy, vice-président honoraire à la cour d'appel de Paris ; comme juges, MM. Heitz, conseiller à la cour d'appel de Douai et Jérôme, avocat, suppléant du juge de paix d'Arras, comme procureur, M. Menant, substitut adjoint au tribunal de la Seine.

J’ai également nommé, à titre temporaire, un juge de paix des cantons d'Arras-Nord et Sud et Vitry-en-Artois, un suppléant de la justice de paix d'Houdain et maintenu en fonction un autre suppléant atteint par la limite d'âge.

Les commissaires de police sont à leur poste ; par contre, une partie des gendarmes s’étant repliés sur l'intérieur et les autres ayant été faits prisonniers, je me suis trouvé depuis le début de l'occupation jusqu'à ces derniers jours, privé de concours qui m'eussent été des plus utiles, en particulier, pour réprimer les actes de pillages inévitables en cette période troublée.

Sans doute mon administration a-t-elle essayé de parer à cet inconvénient par la création, dans les communes, d'une police municipale de secours, mais, en raison du peu d'efficacité de celle-ci, je me suis employé à obtenir la libération du plus grand nombre possible de gendarmes prisonniers. Sur un effectif de 450 gendarmes en temps de paix, 250 ont, aujourd'hui, rejoint leur résidence ; d'autres me sont annoncés. Je me préoccupe de reconstituer les brigades et de les doter des moyens de transports indispensables.

L'administration municipale est assurée dans toutes les communes. Elle n'a d'ailleurs jamais cessé de l'être, les maires absents ayant été remplacés dès le début de l'occupation, la plupart du temps conformément aux dispositions de la loi de 1884, quelquefois par des personnes imposées par l'autorité militaire allemande. D'ailleurs, dans les localités où les assemblées communales n'étaient plus en nombre suffisant, j'ai provoqué la création de comités de guerre tenant lieu de conseils municipaux.

J'exposerai ci-dessous dans les chapitres consacrés au ravitaillement, et à la situation monétaire, les difficultés que les administrateurs locaux ont eu à surmonter.

Le personnel de l'enseignement primaire a suivi le sort des habitants des localités où il exerçait. En raison de l'intensité des dangers courus, il s'est le plus souvent retiré dans la campagne sans quitter le département pour rentrer dès que ce fut possible. On peut estimer à 90 % le nombre des instituteurs et des institutrices actuellement à leur poste et exerçant effectivement leurs fonctions au mieux des conditions matérielles trouvées en rentrant.

La situation des établissements d'enseignement secondaire, des écoles primaires supérieures et des écoles techniques est assurément moins bonne en raison, d'abord des nombreuses réquisitions de locaux pour les besoins militaires (hôpitaux le plus souvent) et aussi parce que le personnel ayant eu la latitude de se replier sur des établissements de correspondance désignés par le Recteur, n'est pas encore rentré.

Questions économiques

Ravitaillement

Entièrement envahi le 26 mai, le Pas-de-Calais est actuellement un département de zone de guerre qui doit assurer le ravitaillement d'un million de ressortissants auxquels s’ajoutent, sans possibilité d'évaluation exacte, les troupes allemandes et les réfugiés.

Difficultés de ravitaillement. Il existe des difficultés depuis le premier jour de l'occupation et ces difficultés, aplanies en partie actuellement pour certaines denrées, ne peuvent que s'aggraver dans l'avenir pour la plupart des produits.

a) Denrées faisant totalement défaut :

- Sel. Le stock du Pas-de-Calais ne dépasse pas actuellement 1000 tonnes.

- Huile. Les stocks de graines oléagineuses ne permettent pas au département de subsister au-delà de deux mois, compte-tenu de la remise en activité, dans un délai de trois semaines des huileries.

- Conserves de toute nature. Sardines, thon, etc. lait condensé.

- Fruits secs. Abricots, prunes, etc.

- Denrées coloniales ou produits coloniaux. Café, thé, épices en général.

- Céréales exotiques. Riz.

b) Denrées faisant partiellement défaut :

Beurres, œufs, fromage, lait, viande

Causes des difficultés du ravitaillement. Les destructions, le pillage opéré par des troupes et des réfugiés, les pertes du fait de l'évacuation, les réquisitions effectuées quotidiennement par l'intendance allemande, pour les besoins de la troupe occupante venant après celles des armées françaises et alliées, ont grandement réduit le potentiel alimentaire du Pas-de-Calais.

Les obstacles inéluctables mis à la circulation par les destructions de toutes sortes, la disparition ou la réduction (9/10e des automobiles) des moyens de transports, le rationnement en carburant, les délais nécessaires pour l'établissement des laisser-passez, l'absence de crédits et de moyens de paiement et de correspondance entravent gravement les échanges, interdisent le réapprovisionnement en certaines denrées, favorisent les fraudes et l'accaparement.

Mesures prises pour remédier à ces difficultés. Pour la catégorie des produits qui font seulement partiellement défaut, l'importation redresserait la situation, mais en l'absence de cette ressource, je m'efforce de réaliser le plan général suivant :

a) Obtenir de l'administration allemande les initiatives nécessaires au rétablissement de conditions de vie économique plus normales (ouverture de banques, dégagement des canaux, remise en activité des chemins de fer, des relations postales).

b) Réorganisation par mon administration des transports et création de groupements de transports cantonaux ou d'arrondissements réservés au ravitaillement circulaire des collectivités communales (906 communes dans le Pas-de-Calais).

c) Régularisation des échanges et mise au point par mon administration d'un sévère contrôle de la production, de la consommation.

d) Rationnement immédiat de tous les produits ou denrées de première nécessité.

e) Renforcement de la surveillance des prix pour enrayer la hausse et entente avec le département du Nord pour une taxation unitaire des prix.

Points nécessitant la mise en œuvre de moyens dont ne dispose pas le département. Pour la catégorie des produits qui, dès maintenant, font totalement défaut, énumérés ci-dessus, seule l'importation peut apporter un remède, mais le problème dépasse le cadre départemental.

À cet égard, deux questions priment : sel, huile, sans que les autres denrées doivent pour cela être négligées. Seule une reprise des échanges avec les départements exportateurs de toutes ces denrées ou produits résoudrait les difficultés insolubles dans l'état actuel des choses.

Ressources que le département possède en excédent :

a) Blé. Sur rapport des spécialistes le département se trouverait en mesure d'exporter 200.000 quintaux de farine. Cette quantité se trouve inférieure aux évaluations antérieures du fait des ponctions opérées par l'administration allemande, et des cessions consenties à la Belgique sur l'ordre des autorités allemandes (120.000 quintaux). Je dois ajouter que l'autorité allemande m’a mis en demeure de prendre un arrêté interdisant l'exportation des blés et farines dans les départements au sud du Pas-de-Calais.

b) Sucre. La mainmise de l'administration sur les stocks de cette denrée est en voie de réalisation et mon arrêté de réquisition générale de tous les stocks sucriers est actuellement à l'approbation de l'autorité allemande. L'estimation des existants, déjà malaisé à établir par suite d'un énorme pillage, ne permettra de dégager les quantités exportables que lorsque les spécialistes auront pu évaluer la récolte future des betteraves dont la croissance a beaucoup souffert du fait de la guerre.

c) Alcool. Le service des alcools dispose dans le Pas-de-Calais d'un stock de 300.000 à 400.000 hectolitres dont les 2/3 peuvent être destinés à l'exportation.

Destination des excédents. Cette question soulève le problème des transports auquel le Pas-de-Calais ne se trouve pas en mesure de donner solution, même partielle.

Communications

Service postal

Seul un service du courrier officiel (préfecture et administrations publiques) a pu être organisé dans le département. Il est assuré non sans difficulté par motocyclette ou voiture automobile entre la préfecture et les sous-préfectures, par cyclistes des chefs-lieux d'arrondissement aux communes.

Aucune relation régulière n'est assurée avec les départements voisins (Nord et Somme).

L'application de toute mesure nouvelle est subordonnée à l'autorisation préalable des autorités allemandes. À partir du 22 juillet, un courrier commercial sera permis à l'intérieur de chaque arrondissement, les relations avec les arrondissements voisins demeurant interdits. Il est formellement défendu au service postal d'assurer le transport des correspondances autres que celles qui présentent un intérêt économique. L'utilisation des trains pour l'acheminement du courrier admis, sera poursuivie au fur et à mesure du rétablissement des communications ferroviaires. L'exécution du service se heurtera à l'insuffisance du matériel de timbrage dont certains bureaux sont complètement démunis et au défaut de timbres postes destinés à l'affranchissement des correspondances.

Services télégraphique et téléphonique

Aucune communication, même officielle, n'est rétablie. Le réseau téléphonique est utilisé par l'armée allemande qui procède à sa réfection, suivant ses besoins. Dans l'ensemble, de nombreuses liaisons sont interrompues. L'armée allemande a sectionné des câbles de réseau lors de son avance vers la côte, enlevé des postes d'abonnés à batterie locale, prélevé le matériel de ligne et de poste qui lui est nécessaire, mais a respecté la plupart des tableaux multiples et standards. La remise en état du réseau nécessitera au préalable la reconstitution des stocks de matériel qui sont épuisés ou mis largement à contribution par les armées, la fourniture d'outillage dont les agents sont complètement démunis ; les voitures du service des lignes et du montage ont été réquisitionnées pour la plupart. Des tableaux standards et répartiteurs seront à remplacer ; le matériel nécessaire devra également être fourni.

Personnel et locaux des PTT

La plupart des agents sont à leur poste. Toutefois, 20 receveurs sur 151 ne sont pas rentrés. L'inspecteur technique et deux rédacteurs de la direction du Pas-de-Calais sont absents. Les bureaux de Calais-principal, Saint-Venant, Courrières, Oignies sont complétement détruits, celui de Boulogne-sur-Mer très endommagé.

Quelques bureaux sont occupés partiellement ou en totalité par l'armée allemande, notamment les centraux téléphoniques d'Arras, Saint-Pol-sur-Ternoise, Saint-Omer, Calais qui ne sont pas accessibles au personnel d'exploitation.

En vue d'une reprise des services il y aurait lieu de faire rentrer à leur résidence les receveurs et receveuses qui n'ont pas encore rejoint leur bureau ainsi que l'inspecteur du service technique d'Arras et les rédacteurs de la direction départementale. En plus, il serait désirable que deux inspecteurs du service postal, plusieurs rédacteurs mobilisés (prisonniers ou en territoire non occupé) fussent remis à la disposition de l'administration.

En résumé, dans la mesure où les autorités allemandes permettront la reprise des relations ferroviaires et l'accès des locaux, le service postal pourra fonctionner rapidement. La reprise du service des guichets (mandats, caisse d'épargne, pensions, etc.) est de plus subordonnée à la question des Trésoreries. Quant aux services électriques, ils ne pourront être assurés qu’après exécution des travaux importants exigeant la fourniture préalable de matériel et d'outillage qu’il n'est pas possible de me procurer sur place.

Chemin de fer

Le département peut être divisé en trois parties :

1- Une inexploitable par suite de destruction des ouvrages d'art ;

2- Une exploitée par les agents des chemins de fer allemands ;

3- Une autre partie exploitée uniquement par les agents de la SNCF (région houillère).

En ce qui concerne la première partie, on peut citer à titre d'exemple la ligne de Béthune à Lille qui a particulièrement souffert ainsi que la jonction avec la ligne de Lens à Douai et celle de Lens à Lille, par suite de destruction du pont de Dourges.

Sur la ligne d'Arras à Hazebrouck, les ponts situés entre Berguette et Thiennes, et celui entre Arras et Farbus (pont de la Scarpe) ont également été détruits.

La remise en état de ce dernier pont est envisagée pour permettre la circulation des trains de houille.

Depuis trois jours seulement, un premier service (voyageurs et marchandises) fonctionne entre Béthune – Berguette – ArquesSamer et retour, entre Béthune- Lens-Farbus et retour, entre Lens et Dourges et retour, et entre Lens et Béthune, parBully-Grenay-Bruay-Brias-Lapugnoy et Fouquereuil.

Toutes ces gares sont exploitées uniquement par les agents de la SNCF. La partie Sud du département qui comprend la ligne comprise entre Douai et Amiens, Arras-Doullens et Arras-Boulogne par Saint-Pol-sur-Ternoise, Montreuil-sur-Mer est exploitée par les agents des chemins de fer allemands.

Beaucoup de gares sont équipées en partie avec du personnel français réquisitionné sur place et travaillant sous les ordres de l'autorité allemande. La SNCF n'a aucune communication téléphonique dans la partie non exploitée et dans celle exploitée par l'autorité allemande.

Par ailleurs, elle possède les moyens nécessaires pour réparer au plus tôt les ouvrages d'art ; mais la remise en état des cabines, des signaux et appareils de voies, sera assez longue étant donné l'importance des dégâts.

Ponts-et-Chaussées

Actuellement ce service est assuré par l'ingénieur en chef titulaire, un ingénieur d'arrondissement (sur 5 en temps de paix), 14 subdivisionnaires titulaires (sur 40), 4 subdivisionnaires retraités et rappelés, 6 adjoints techniques, 6 agents de bureau, 80 chefs cantonniers, 450 cantonniers.

Il importe de rappeler en première urgence, M. Macarez, ingénieur des ponts et chaussées, chargé en temps de paix à Béthune, d'un arrondissement du service ordinaire et d'un service de navigation devenu particulièrement important par suite des dégâts à réparer sur les canaux. Cet ingénieur a été évacué par Dunkerque en même temps que l'armée des Flandres.

Les communications par route sont assurées dans tout le département, malgré les gênes qui résultent par endroits des destructions de ponts. Les services publics automobiles sont inexistants faute de véhicules et d'essence. Seule une liaison entre Lens et Douai a pu être remise en marche.

De même, les transports par camions de marchandises sont insuffisants, une grande partie des camions ayant été évacués, requis ou démolis.

Les communications par voie d'eau sont complétement supprimées, les canaux étant encombrés de débris d'ouvrages détruits, de péniches coulées et de portes d'écluses sautées.

Une ligne de chemin de fer d'intérêt local, de Lens à Frévent, a repris une exploitation réduite.

Pour l'électricité, les dégâts ont été localisés sur les lignes aériennes de transport et de distribution.

Destructions. Indépendamment des destructions concernant les moyens de communication et dont il est fait état sommairement dans les pages qui précèdent, il y a lieu de noter les importants dommages causés à de nombreuses villes ou villages du département soit par les bombardements aériens, soit par le feu de l'artillerie. Les localités les plus éprouvées sont Arras, Lens, Boulogne-sur-Mer, Calais, Courrières, Fruges, Thérouanne. Il est impossible à l'heure actuelle d'évaluer le nombre d'immeubles atteints et l'importance des dégâts.

Presque partout les distributions d'eau, de gaz et d'électricité ont été interrompues, mais à l'heure actuelle la plupart d'entre elles sont en grande partie rétablies. Quant aux centrales électriques, elles sont intactes.

Les destructions visant l'industrie en général seront exposées au chapitre suivant.

Industries

Industries détruites et fortement endommagées. En règle générale, aucun établissement important du Pas-de-Calais n'a été complètement détruit. Si de très nombreuses usines ont subi des dégâts matériels plus ou moins importants, il s’agit d'avaries réparables dans un délai qui ne doit pas excéder un à deux mois. À titre exceptionnel les établissements comme la sucrerie Béghin de Corbehem, la société nouvelle d'industries chimiques à Libercourt, la société Saint-Sauveur à Arras (constructions mécaniques), la distillerie Poulain à Louez-lès-Duisans, se trouvent soit inutilisables, soit hors d'état de marche pour une durée qui ne saurait être inférieure à plusieurs mois. Pour les autres établissements, il y a lieu de souligner que les vols d'outillage les ont fortement handicapés.

Industries où l'équipement est intact et pour lesquelles la main d'œuvre fait défaut. On ne saurait dire qu’il existe de ces usines dans le Pas-de-Calais ; la main d'œuvre après avoir suivi l'exode des populations civiles est revenue sur place à son lieu de départ et se trouve en quantité suffisante pour assurer le fonctionnement normal des différentes industries.

Industries n'ayant pas encore repris leur activité. À l'heure actuelle, la très grosse majorité des industries n'a pas encore repris son activité. Il s’agit soit de conditions d'ordre général comme l'absence de dirigeants, le défaut de commande, la situation de trésorerie ou le manque de transports, soit de raisons d'ordre particulier que nous allons examiner rapidement ci-après pour chaque catégorie industrielle.

Sucreries distilleries. Ces installations sont, pendant la saison d'été, en période de réfection. Toutes mesures ont été prises pour que les travaux d'entretien soient normalement effectués et que ces usines puissent reprendre leur activité normale à partir d'octobre prochain.

Industries chimiques. Leur activité est commandée par celle des mines qui leur fournissent les matières premières. Elles ne pourront fonctionner que lorsqu’elles pourront être approvisionnées en gaz par les cokeries des mines, c’est-à-dire d'ici à septembre. Il est à noter que cette reprise est particulièrement importante en ce qui concerne la fabrication de l'essence synthétique et celle des engrais qui paraissent être indispensables pour les besoins agricoles.

Papeteries et tanneries. Ces usines reprendront leurs activités dès qu’elles pourront être approvisionnées en matières premières, notamment en pâte de bois, question liée à celle des transports.

Industries textiles. Ces industries comprennent les filatures de coton et de lin, des tissages, une fabrique de soie artificielle et des fabriques de bonneterie. Toutes ces usines sont arrêtées, leur réouverture est subordonnée à leur réapprovisionnement en matières premières (sauf pour les bonneteries).

Cuirs et peaux. Il reste encore des tanneries et fabriques de chaussures fermées en raison de manque de matières premières (produits de tannages et cuirs).

Métallurgie et travaux des métaux. Sauf exception, ces usines sont dans le chômage le plus complet par suite de manque absolu de commandes, des difficultés d'approvisionnement en matières premières et d'absence de débouchés.

Bâtiment. Bien que des dégâts immobiliers importants aient été causés, l'industrie du bâtiment n'a encore repris aucune activité. Cette reprise parait conditionnée par le règlement de la question financière et notamment celle des dommages de guerre. Il est cependant à présumer qu’une reprise lente va se produire pour s’amplifier d'ici quelques mois.

Pierres et terres à feu. Les verreries sont dans l'inaction en raison de l'impossibilité où elles se trouvent de s’approvisionner en matières premières. Les fabriques de produits céramiques, surtout de produits industriels, ne peuvent songer à reprendre leur fabrication avant d'avoir retrouvé leur débouché. Il en est de même des fabriques de ciment artificiel. Quant aux tuileries et briqueteries, un certain nombre d'entre elles ont déjà repris le travail. D'une manière générale, le fonctionnement normal des industries du département dépend du règlement de la situation financière dont il sera question ci-après et de la solution des problèmes de transports.

Industries en activité.

Mines. Les destructions dans l'ensemble, sont peu importantes. Les mines seront en état de marche normale dans un délai maximum de trois mois. La majeure partie des ouvriers (80 à 90 %) est présente, mais plus de la moitié des ingénieurs font encore défaut. L'exploitation a été reprise le 15 juin à raison d'un jour par semaine ; elle a été portée à trois jours à dater du 7 juillet. Les débouchés sont pratiquement insignifiants et le charbon est en grande partie stocké.

Sur une production journalière estimée, à l'heure actuelle, à 60.000 tonnes pour le Pas-de-Calais, 3.000 tonnes seulement sont expédiées sur Paris et 7.000 consommées dans la région.

La question des approvisionnements en bois de mine mérite de retenir toute attention, les compagnies ne possédant que deux mois de stock.

Autres industries. Depuis le début de juin, un certain nombre d'industries ont repris non sans peine leur activité notamment les industries d'alimentation : minoteries, brasseries, malteries, beurreries, fromageries. On peut ajouter aussi les tanneries, fabriques de chaussures, de lingerie et de bonneterie.

Agriculture

Les blés et les avoines donneront une bonne récolte moyenne. La surface de blé à moissonner atteindra au maximum 130.000 hectares contre 135.000 en année normale. La moisson plutôt tardive ne battra son plein que vers le 20 août.

La surface des betteraves sucrières sera réduite d'un tiers par rapport à l'an dernier. Elle atteindra 30.000 hectares sur 45.000 (15.000 hectares n'ayant pu être semés ou démariés à temps). Le rendement moyen supposé est de 25 tonnes.

Les pommes de terre se maintiennent saines et promettent une bonne récolte.

Les lins dont la surface est plus importante que celle de l'an dernier sont restés très courts, surtout dans l'Artois, où la sécheresse s’est faite le plus sentir. Dans le Calaisis, la récolte est normale. La récolte des fourrages est satisfaisante.

Quant aux battages des céréales de la dernière récolte, ils sont arrêtés complètement par suite du manque de force motrice ; courant électrique ou carburant. Des démarches sont faites pour obtenir une solution à cette situation. La conservation des blés en silos laisse à désirer. Des dispositions sont à prendre d'urgence pour leur écoulement.

La mobilisation a prélevé au moins 20.000 hommes parmi les cultivateurs et ouvriers agricoles. Les besoins en main d'œuvre sont donc importants. Il faudrait combler le déficit par le renvoi dans leurs foyers des cultivateurs du Pas-de-Calais prisonniers. En attendant, les autorités allemandes ont été priées de prêter le concours de militaires français ou allemands.

Par ailleurs, dès le 19 juin, j’ai prié les maires d'inviter les agriculteurs à produire le maximum de denrées agricoles et, pour assurer l'exécution des travaux urgents du moment, à faire appel, au besoin, par voie de réquisition aux chômeurs locaux, aux ouvriers, aux jeunes gens et même aux femmes capables de travailler. Cet appel a été entendu. Un assez grand nombre de chefs d'exploitation partis avec leurs chevaux ne sont pas encore rentrés parce que retenus dans des camps de réfugiés. L'intérêt de la production agricole commande de leur permettre de réintégrer leurs fermes.

Cheptel. L'état sanitaire du bétail est bon mais les effectifs des chevaux et surtout des bovins sont considérablement réduits. Une enquête est en cours pour en déterminer l'importance. On peut admettre que la réduction atteint pour les bovins 25 à 30 %.

Questions financières

Situation monétaire

L'autorité allemande a mis en circulation des billets des Reichskreditkassen de 20, 5, 2, 1 reichsmark et 50 pfennig ces billets ont surtout été répandus par le moyen d'avances consenties au préfet par l'intermédiaire du chef de l'administration militaire à Lille ; M. le Regierungsprésident Rudiger, pour les besoins des communes et des services administratifs.

Ces avances s'élevant à ce jour de 10.000.000 R. répartis comme suit :

Avance du 15 juin : 1.300.000 ; avance du 23 juin 1.525.000 ; avance du 27 juin : 1.975.000 ; avance du 4 juillet : 2.500.000 ; avance du 17 juillet : 2.500.000.

Elles ont reçu les affectations ci-après :

Dépenses des communes : 2.762.500 RM ou 55.250.000 francs.

Dépenses des services administratifs : 3.467.000 RM ou 69.340.000 francs.

Administration des Postes : 142.500 RM ou 2.850.000 francs.

Société nationale des chemins de fer : 128.000 RM ou 2.560.000 francs.

Mines de charbon du département : 1.000.000 RM ou 20.000.000 francs.

Les conditions de ces avances n'ont pas été fixées. Il est spécifié sur les reçus qui m’ont été demandés que « le règlement des formalités du contrat de prêt, en particulier le taux d'intérêt, les délais et les modalités de remboursement restent à déterminer ».

L'autorité allemande a également consenti directement des avances de la même monnaie aux industriels. C’est ainsi qu’elle a versé 2.000.000 RM aux mines du Nord et du Pas-de-Calais pour le paiement des salaires de juin.

Les troupes d'occupation ont en outre répandu des reichsmarks des Reichskreditkassen par leurs achats. Le marck est employé dans le commerce concurremment avec la monnaie française. Son utilisation rencontre quelques difficultés pour les menus achats du fait que le billet de la moindre coupure (50 pfennigs) représente déjà le franc français d'après le change fixé par l'autorité allemande.

Il n'existe pas de stock important de marcks repris aux particuliers par la Trésorerie générale ou par la Banque de France. Ainsi qu’il a été indiqué plus haut, les marcks utilisés sur les avances faites au préfet ne s’élevant à ce jour qu’à 7.500.000, le stock ressort ainsi à 2.500.000.

L'approvisionnement en francs par la Banque de France a repris le 16 juillet courant. À cette date, il a été versé 25 millions à la Trésorerie générale. Un nouveau versement de 4 millions a été fait le 17. Une somme importante doit être cherchée demain à Paris. Pour parer à l'insuffisance des ressources, il n'a pas été édicté de moratoire général, mais les dépenses de l'État et des collectivités publiques n'ont été que partiellement acquittées. N'ont pu être payées que les dépenses suivantes : traitements et salaires, indemnités de fonctions soumises à retenues, indemnités de résidence et indemnités pour charges de famille, à concurrence de moitié, avec minimum de 800 francs pour les employés titulaires, 600 francs pour les auxiliaires de plus de 20 ans et 500 francs pour les auxiliaires de 20 ans au plus, abstraction faite des indemnités pour charges de famille ; pensions à concurrence de moitié avec minimum de 1800 francs par trimestre ; allocations militaires ; allocations aux vieillards, infirmes et incurables privés de ressources, allocations aux femmes en couche et frais de séjour des enfants assistés ; allocations de chômage ; secours aux familles nécessiteuses ; dépenses des bureaux de bienfaisance et des hospices. Il n'a pas été émis de monnaies locales en raison du refus opposé par l'autorité allemande. Certaines émissions auxquelles il avait été procédé sans autorisation préalable ont dû faire l'objet de retraits.

Situation bancaire

I. Le fonctionnement des banques n'a repris, partiellement d'ailleurs, que tout récemment. Il ne peut être donné aujourd'hui de renseignements précis qu’en ce qui concerne la ville d'Arras. Dans cette localité, à la suite d'avances d'un million par établissement qui ont été faites pour permettre de verser à la clientèle industrielle et commerciale les sommes nécessaires pour le paiement des salaires, les banques ci-après ont rouvert leur porte : Banque Dupont, Crédit Lyonnais, Crédit du Nord, Société générale.

La banque nationale de crédit a pu fonctionner sans avance de l'État grâce aux fonds dont elle était détentrice (2.200.000 francs).

Le comptoir national d'escompte n'a pu encore reprendre d'opérations en raison de la mort presque soudaine du sous-directeur rentré à Arras.

Les banques susvisées n'ont pas les moyens de rembourser leurs déposants. Elles ne pourront avoir qu’une activité très réduite tant qu’elles n'auront pas récupéré leur comptabilité et qu’elles ne seront pas mises par leur siège social en possession des ressources nécessaires.

Les succursales de la Banque de France du département ne paraissent pas avoir repris jusqu'ici leurs opérations.

II. Caisse d'épargne

D'après les renseignements en ma possession, aucune Caisse d'épargne des arrondissements d'Arras, Béthune et Saint-Omer n'a repris ses opérations. Certaines d'entre elles ont sollicité les fonds nécessaires pour permettre de donner suite aux demandes de remboursement des déposants.

La Banque de France devant de nouveau à brève échéance réapprovisionner les caisses du Trésor, il sera possible de satisfaire à ces demandes si le ministère des Finances se montre favorable à cette mesure.

Questions sociales

Les deux inspecteurs du travail en résidence dans le département sont à leur poste.

Services d'assistances et de prévoyance sociales

Assurances sociales

En raison de l'évolution rapide des événements qui ont précédé l'envahissement du département, les caisses du Pas-de-Calais n'ont pu, pour la plupart, se replier, de sorte que tous les documents, fichiers et archives, sont restés en place. La désorganisation économique qui a suivi l'occupation n'a pas permis une reprise immédiate des opérations des caisses d'assurances sociales. Le rétablissement progressif des activités commerciales et industrielles permet actuellement d'envisager la réouverture des guichets et le paiement des prestations, tant aux assurés malades qu’aux femmes enceintes et aux pensionnés des assurances sociales. Il apparait d'ailleurs que la quasi-totalité des organismes du département du Pas-de-Calais seront en mesure de fonctionner dès que les disponibilités financières qu’elles possédaient à la Trésorerie générale et à la Caisse des dépôts et consignations pourront être à leur disposition, étant d'ailleurs entendu que la Caisse primaire départementale pourra également se substituer à toute caisse qui serait défaillante pour une raison quelconque (absence du conseil d'administration, du directeur, etc.).

En tout état de cause, les caisses d'assurances sociales procèdent actuellement à la réorganisation de leurs services, à l'apurement de leurs comptes, à l'instruction des dossiers en cours et à l'établissement des mandats de paiement qui ne deviendront exécutoires qu’au moment où des fonds pourront leur être remis.

Il y a lieu de noter enfin que le service régional des assurances sociales de Lille a rappelé aux employeurs, par voie de presse, qu’ils étaient tenus d'opérer à nouveau le précompte des cotisations d'assurances sociales sur les salaires de leurs ouvriers et employés.

Chômage et main d'œuvre

Dès le début de juin, il a été opéré dans chaque commune du département, à un recensement des personnes sans travail. Les résultats de cette enquête sont récapitulés sur le tableau ci-joint (annexe n° 2). Dans l'ensemble du département, 15.000 ouvriers environ sont sans travail, compte tenu de certaines communes importantes qui n'ont pas encore fourni les renseignements demandés. Il est procédé actuellement à la réorganisation des services de placement du département, de façon à ce que ceux-ci puissent être, le moment venu, en mesure de fournir aux chefs d'établissements une main d'œuvre préalablement sélectionnée, tant en ce qui concerne l'industrie et le commerce que l'agriculture.

D'une manière générale, la plupart des communes ont utilisé et utilisent encore la main d'œuvre masculine sans travail à des travaux de déblaiement, de confortement d'immeubles et divers autres travaux édilitaires. Il est à noter que la main d'œuvre actuellement excédentaire ne saurait être utilisée dans les conditions prescrites par le télégramme annexé à votre dépêche du 12 juillet que mon collègue de Lille vient de me communiquer. Il n'y a en effet à procéder ici à aucun licenciement du fait de l'arrêt brutal de toute l'activité économique. Il a été demandé aux employeurs d'embaucher le plus possible de main d'œuvre et de donner la priorité au personnel ayant les charges de famille les plus lourdes.

Le service de l'inspection du travail est en liaison constante avec les services agricoles. Dès que les résultats de l'enquête sur le chômage auront été définitivement obtenus, il sera procédé, en accord avec ceux-ci, à l'orientation de la plus grande quantité possible de main d'œuvre actuellement non utilisée dans l'industrie pour les besoins agricoles. Le service de l'inspection du travail est de même en collaboration avec les municipalités en vue de l'utilisation des chômeurs pour des travaux d'utilité publique.

Accidents du travail. Les communications étant coupées avec les sièges des compagnies d'assurances, les agents locaux ou régionaux ne veulent s’engager vis-à-vis des industriels ou commerçants. Il en résulte une gêne des plus sérieuses à la reprise de l'activité économique du fait des responsabilités accrues des employeurs. Il est indispensable que cette question soit réglée dans le minimum de temps possible ; elle ne saurait l'être que par la reprise de relations postales normales. Dans cette attente, le service de l'inspection du travail a donné aux employeurs le conseil d'adresser aux agents des compagnies d'assurances une note par laquelle ils s’engageront à continuer leurs police d'assurance dans les conditions fixées par celles-ci ou dans des conditions générales à déterminer.

Dispensaires et œuvres pour l'enfance

La majorité du personnel de l'Office départemental d'hygiène social est restée dans le département. Un tableau donnant l'état des dispensaires antituberculeux et polyvalents est annexé à ce rapport (annexe n° 3). Les médecins absents ou mobilisés ont été remplacés soit par l'inspecteur adjoint d'hygiène, soit par des médecins militaires prisonniers provisoirement libérés. Il est à prévoir que bientôt les consultations reprendront dans tous les dispensaires où il n'y a pas trop de grosses réparations à faire.

Les assistantes sociales de l'office d'hygiène ont presque toute repris leur service. Les assistantes sociales des municipalités ou des caisses d'assurance sociale sont en partie à leur poste.

Les œuvres de protections de l'enfance se sont trouvées désorganisées, sur les 200 consultations de nourrissons une vingtaine seulement fonctionnent, l'absence des médecins, la destruction ou le pillage des locaux empêchent la réouverture des autres.

Des crèches fonctionnent à Calais, Boulogne-sur-Mer, Montreuil et Saint-Omer ; d'autres vont être réorganisées à Arras et dans les centres miniers.

Les Gouttes de lait ont dû provisoirement être remplacées par des distribution de lait frais, les appareils stérilisateurs étant détériorés et les biberons introuvables.

Les consultations prénatales peu nombreuses jusqu’à présent seront reprises dès que possible.

Les maternités qui avaient été détruites sont en partie réorganisées.

Le service social de l'enfance (surveillance à domicile) pourra être repris dans les villes et dans les centres miniers. Mais la difficulté des communications et la rareté de l'essence rendront impossible son rétablissement dans les campagnes.

Quant à la protection de l'enfance contre la tuberculose, elle ne peut être assurée comme auparavant ; les parents contagieux ne trouvant plus place au sanatorium départemental utilisé par l'armée et les enfants susceptibles de placement Grancher pouvant difficilement être isolés à l'heure actuelle.

J’ajoute que l'assistance médicale à domicile est assurée par les médecins demeurés à leurs postes et que le paiement des allocations de mai et juin aux vieillards et aux femmes en couche a été effectué.

Enfin, pour venir en aide aux personnes momentanément privées de ressources, j’ai pris, à la date du 26 juin un arrêté dont ci-joint copie (annexe n°4).

Le Préfet

30 septembre 1940

Arras, le 30 septembre 1940.

Le préfet du Pas-de-Calais à Monsieur le général de corps d'armée, délégué général du Gouvernement Français dans les territoires occupés.

Vous avez bien voulu me prier de reprendre point par point les questions traitées dans mon rapport du 19 juillet dernier (faisant suite à la circulaire du 12 juillet) et de préciser l'état actuel et la nature de l'évolution de chacune de ces questions. J’ai l'honneur de vous faire connaître que, si dans tous les domaines, de nombreux problèmes ont pu être résolus depuis deux mois, la situation générale n'en demeure pas moins toujours incertaine.

Aussi bien, le Pas-de-Calais, qui appartient à la zone réservée limitée au sud par la Somme, continue d'être le théâtre d'opérations militaires.

Dès le début de son rapport du 19 juillet, mon prédécesseur signalait que « la reprise » à laquelle nous voulons nous consacrer dépendait pour une large part de la mise en marche des différents services des PTT et des chemins de fer ainsi que de la réouverture des établissements de crédit.

Ces conditions sont aujourd'hui réalisées dans leur ensemble ; mais, ainsi que nous le verrons plus loin, les mesures prises n'ont pas encore obtenu tout leur effet et, pour que le développement de la vie administrative économique et sociale réponde aux efforts de tous, de nombreuses améliorations s’avèrent indispensables.

Un problème domine tous les autres : celui du ravitaillement.

Il y a lieu, par-dessus tout, de tenir compte des conditions même de l'occupation qui, dans cette région toute spéciale, sont inévitablement plus impérieuses que dans d'autres départements. Je dois à la vérité de dire que les rapports entre les autorités françaises et allemandes sont corrects et que la collaboration qui existe entre elles demeure loyale ; mais la tâche administrative persiste à être le plus souvent complexe et délicate du fait que les directives arrêtées soit par l'Oberfeldkommandantur, soit par la Feldkommandantur départementale, sont ou non respectées ou modifiées dans leur interprétation par les Ortskommandantur locales et je parle plus spécialement de celles qui sont établies pour un temps souvent très limité par les troupes de passage.

Nous nous appliquons néanmoins, mes collaborateurs et moi-même, à surmonter ces difficultés, en multipliant dans toute la mesure du possible, les contacts directs avec les autorités d'occupation.

Nous avons aussi l'occasion à maintes reprises, de nous entretenir mon collègue du Nord et moi-même, de l'application dans nos départements de la législation française.

Notre point de vue, qui d'ailleurs vous a été exposé par le préfet du Nord par ses rapports du 28 août et des 17 et 22 septembre courant, font l'objet de réserves très nettes de la part de l'administration militaire allemande.

M. le lieutenant général, chef de l'Oberfeldkommandantur 670 nous a bien donné son accord notamment à l'application de la loi du 23 août 1940 tendant à la répression de l'alcoolisme, mais à condition que les interdictions de vente et de consommation visées par la loi ne s’appliquent pas aux ressortissants allemands.

Pour une réglementation encore toute récente, celle du rationnement des différentes denrées, des taux autres que ceux qui sont fixés par la ministre de l'Agriculture nous sont opposés.

Et dans sa communication du 20 septembre 1940, le général Niehoff stipulait « qu’en ce qui concerne les autres lois publiées jusqu’à ce jour au Journal officiel, ainsi que les arrêtés et décrets », son avis nous parviendra dans une semaine environ.

Je ne veux pas réitérer ici la thèse, qu’en accord avec moi, M. Carles a soumise à votre appréciation et dont la conclusion tend à ce que le Gouvernement veuille bien nous investir des pouvoirs nécessaires pour prendre en son nom les dispositions qui pourront s’imposer.

Questions administratives

La situation des services publics s’est sensiblement améliorée depuis un mois. Les fonctionnaires dont la marche pesait lourdement sur la marche des services, sont à peu près tous rentrés, et ainsi que vous le verrez par les rapports concernant les différentes rubriques de votre circulaire, il est possible de dire maintenant que la vie administrative a repris presque normalement.

À certains de ces services, j’ai cru bien faire d'affecter à titre provisoire des agents inemployés et percevant quand même leur traitement, agents dont le sort n'a pas encore été réglé par les ministères desquels ils relèvent et qui appartiennent notamment au Génie, à l'Intendance et au Recrutement.

Si nous pouvions obtenir pour les fonctionnaires chargés de mission à l'extérieur tous les laissez-passer qui leur sont indispensables, nous constaterions sans aucun doute des résultats plus favorables encore dans la reprise de la vie administrative.

Une question capitale se pose encore, c’est celle de la désignation de toute urgence d'un intendant qui assurera la direction du service du ravitaillement. Je me permets d'insister pour que satisfaction me soit donnée sans tarder.

Il y a aussi la question de la gendarmerie, qui n'est pas encore totalement réglée, et cependant combien il serait important que la totalité des effectifs de gendarmes du temps de paix réintègre les brigades.

J’ai évidemment souligné aux yeux des autorités compétentes allemandes la nécessité d'obtenir des autorisations de retour pour les gendarmes non encore rentrés et aussi pour leurs officiers. Je sais que l'Oberfeldkommandantur, partageant mon sentiment sur la question, s’emploie activement à la régler ; mais je crois que si M. le délégué général envisageait la possibilité de signaler mon vœu aux autorités supérieures allemandes avec lesquelles ses services sont en rapport, la solution souhaitée interviendrait plus rapidement.

J’appelle également l'attention de M. le délégué général sur la nécessité de pourvoir, dans un très bref délai, au remplacement des uniformes des gendarmes et gardes mobiles dont la tenue doit toujours être impeccable et qui malheureusement porte des effets déjà très usagés. Il faudrait prévoir aussi des équipements spéciaux pour les brigades motorisées. Des rapports ont été fournis.

L'administration municipale constitue actuellement pour ceux qui en ont la charge une tâche écrasante. Elle s’effectue dans toutes les communes soit par les maires, soit par les adjoints, soit aussi par les présidents des délégations spéciales ou les comités de guerre qui, je m’empresse de l'ajouter, disparaissent progressivement pour céder la place aux conseils municipaux au fur et à mesure de la rentrée des conseillers.

L'exécution des ordres donnés par l'armée allemande et les diverses Kommandantur impose à ces magistrats des obligations que la législation française écarte.

Je m’entremets constamment pour que les directives de votre importante circulaire en date du 2 septembre soient respectées et pour qu’il soit opposé un refus ferme mais courtois aux exigences sortant du cadre des lois ou des conventions.

Les incidents locaux qui peuvent survenir à ce sujet me sont signalés et je m’exerce à aplanir toutes les difficultés qui se présentent. C’est ainsi par exemple que quelques communes ont été frappées d'amendes ou de contributions spéciales comme sanctions à des faits répréhensibles dont le plus souvent d'ailleurs les auteurs ne sont pas découverts. C’est ainsi, en outre, que des otages sont désignés que je cherche à faire libérer aussi rapidement que possible. C’est ainsi encore que des maires qui sont l'objet de dénonciations ou qui manquent d'activité suffisante, sont délibérément destitués par les autorités allemandes et que quelques fois il n'est pas tenu compte des décisions que j’ai cru devoir prendre au point de vue de la discipline municipale.

Je ne vous apprendrai donc rien en vous énumérant les différents cas que soulève la superposition à notre administration de l'administration allemande, dont les chefs d'ailleurs, je dois le reconnaitre, s’empressent, sur démarches que je fais ou précisions que je donne de remettre les choses au point.

Il est cependant une question que je vous demande de bien vouloir examiner, c’est celle qui concerne le traitement que certaines Kommandantur veulent voir attribuer à des magistrats municipaux pour rémunérer une activité que ceux-ci ne peuvent plus exercer dans la conduite de leurs affaires personnelles. Voici un exemple : le maire de Montreuil très pris par la mairie, ne peut trouver le temps d'exercer sa propre profession. À la demande de la Kommandantur locale, le conseil municipal décide de lui accorder une indemnité mensuelle de 3.000 francs. S’en tenant à la réglementation en vigueur, mon prédécesseur objecta justement que s’il est possible d'accorder à un magistrat municipal des frais de représentations et le remboursement de dépenses effectuées dans l'intérêt du service, il ne peut être admis (les fonctions de maire étant gratuites) que ce maire reçoive un traitement. Je vous donne ici la réponse qu’il y a quelques jours j’ai reçue de la Feldkommandantur : « les conditions actuelles extraordinaires réclament à un tel point l'activité des maires et adjoints qu’il ne leur reste plus de temps pour leurs occupations privées. Il en résulte que les fonctionnaires ci-dessus sont obligés de s’adjoindre des auxiliaires pour leur profession. Cela représente une dépense qu’ils doivent faire dans l'intérêt du service. Il est donc juste qu’ils reçoivent pour cela une indemnité. Je donne donc mon accord en ce qui concerne la disposition qu’a prise l'Ortskommandantur de Montreuil par laquelle ils recevront une bonification dont le montant sera fixé par l'Orstkommandantur ».

Je suis persuadé que la démarche que je vais faire permettra de trouver une solution conforme aux principes en vigueur ; mais si je vous signale ce fait, c’est pour vous demander surtout s’il n'y aurait pas lieu de procéder à une modification de la loi du 5 avril 1884 en vue de permettre une interprétation plus libérale et répondant mieux aux circonstances actuelles. Le texte qui pourrait intervenir constituerait une règle qui limiterait les prétentions des quelques magistrats municipaux qui, à raison de ces circonstances, tiendraient à se placer dans la même situation que le maire de Montreuil.

Les communes du département ont retrouvé la libre jouissance de leurs ressources normales, elles peuvent ordinairement satisfaire aux besoins urgents de leurs services municipaux. Dans certains cas, lorsqu’elles ont à faire face à une dépense importante et qui n'était pas prévisible, elles demandent désormais une avance sur le Trésor français. Le montant total des avances de cette nature s’élève à la date de ce jour à 15.497.765 francs. Précédemment, comme il a été indiqué, des avances en reichsmark avaient été consenties aux communes par les autorités allemandes. Le total de ces avances se monte à 4.551.660 RM.

Enseignement. À la date du 18 juillet, la réorganisation des services de l'enseignement, ainsi que j’ai eu l'honneur de vous l'exposer, était déjà commencée sur de larges bases ; je n'ai donc que très peu de renseignements complémentaires à ajouter à ce rapport, à savoir :

Locaux et personnel.

a) Destruction. Dans la plupart des communes où les locaux scolaires n'ont reçu que des dommages peu graves, le personnel enseignant et les municipalités se sont employés à les remettre en état par des moyens de fortune, le plus souvent, mais la sécurité et l'hygiène des enfants sont assurées. Pour les communes où les réparations ou les reconstructions demandent des travaux plus importants faits par des hommes de métier, un rapport a été soumis à la commission départementale des grands travaux à entreprendre.

b) Personnel. Peu à peu le personnel titulaire des écoles primaires et celui des établissements d'enseignement du second degré rentrent à leur poste. De plus de 1.200, le nombre des auxiliaires est descendu à 881 à ce jour. Aucun des inspecteurs primaires absents n'a pu rentrer, mais les inspecteurs retraités rappelés en fonction et les directeurs délégués assurent convenablement le service.

Mesures prises. La réouverture de toutes les classes primaires et primaires supérieures, secondaires et techniques a été assurée dans le département dès le 2 septembre.

À Arras, les deux écoles normales et les deux collèges sont toujours occupés par l'autorité militaire allemande, mais l'établissement mixte du second degré a été rouvert le 2 septembre. À mesure que les professeurs rentreront, les cours d'enseignement secondaire et ceux de l'enseignement primaire supérieur reprendront graduellement les disciplines qui leur sont propres.

Quant aux élèves maitres et aux élèves maitresses de nos écoles normales, ils ont été répartis dans les divers centres d'enseignement du second degré du département où il existe une préparation au Brevet supérieur. Ils recevront une bourse égale aux frais d'entretien d'un élève de l'école normale.

Dans la région côtière, le service scolaire est de plus en plus difficile à assurer en raison de l'occupation des locaux scolaires par les troupes. Néanmoins, tout le personnel est en place, en de nombreux endroits, l'instituteur fait classe dans son logement. Quand ce n'est pas possible, il réunit les enfants et leur donne du travail par écrit. La liaison entre les maitres et les élèves reste assurée partout.

Questions économiques

Ravitaillement

Situé dans la zone de guerre, le département du Pas-de-Calais compte actuellement, après le retour des évacués ou réfugiés, environ 1.200.000 habitants auxquels s’ajoutent, sans possibilité d'évaluation approximative, les troupes allemandes de combat et d'occupation.

Difficultés de ravitaillement. Le tableau de la situation alimentaire, dressé lors de mon dernier rapport, s’est modifié comme il suit.

a) Denrées faisant absolument défaut : lait condensé, conserves de toute nature, fruits secs, denrées coloniales ou produits coloniaux, céréales exotiques, riz, orge, vin.

b) Denrées faisant partiellement défaut : beurre (60%), œufs (60%), fromage (80%), lait (50%), viande (60%).

Causes des difficultés de ravitaillement.

a) Difficultés d'ordre général. Si la situation s’est particulièrement améliorée à l'intérieur même du département, par le retour progressif à des conditions de vie économique plus normales (rétablissement de la poste, des banques, des chemins de fer, etc.), les obstacles à la circulation, la réduction des moyens de transport, le manque de carburant, demeurent de graves inconvénients pour l'exécution du ravitaillement.

D'autre part, la démarcation établie par l'autorité occupante place le Pas-de-Calais rattaché économiquement et administrativement à Bruxelles, qui, du point de vue du ravitaillement, paralyse la reprise des échanges normaux avec le reste du territoire national, empêche l'exportation de la surproduction, interdit l'importation des produits déficients.

b) Difficultés d'ordre administratif. Le service du ravitaillement général du Pas-de-Calais est dirigé par un fonctionnaire de la préfecture, à défaut de l'intendant installé dans la plupart des départements et régulièrement habilité à réaliser des opérations financières que ne peut entreprendre le service actuel.

Le service de l'intendance a quitté Arras avant l'occupation, ses archives et son personnel sont dispersés, aucune continuité n'a donc pu être assurée entre le service antérieur et le service présent et il est actuellement impossible de résoudre nombre de problèmes qui réclament une solution urgente.

Les décisions gouvernementales, ou bien n'arrivent pas à destination du Pas-de-Calais ou bien lui parviennent avec un grand retard, et dans la plupart des cas ne sont pas applicables au département, faute de pouvoir obtenir le consentement de l'autorité occupante (carte de rationnement en particulier).

Le service du ravitaillement se trouve donc dans une situation extraordinaire : d'une part, le manque de liaison avec le ministère du ravitaillement se fait particulièrement sentir, d'autre part, il est à peu près impossible d'exécuter les instructions adressées par le ministère du ravitaillement.

Mesures prises pour remédier à ces difficultés. Le plan général établi lors de mon premier rapport reste valable et les résultats déjà obtenus permettent d'assurer que les efforts entrepris n'ont pas été vains.

Points nécessitant la mise en œuvre de moyens dont ne dispose pas le département. Ce chapitre vise les produits faisant totalement défaut dans le département, produits énumérés ci-dessus.

À cet égard, il serait utile que le ministère du ravitaillement pût obtenir la mise à la disposition et l'expédition à destination du Pas-de-Calais de lait condensé, de conserves de toutes natures. Le rétablissement des relations postales a permis de reprendre contact avec les industries productives, mais celles-ci se trouvent réquisitionnées par la Ravitaillement général et d'autre part, les difficultés des transports ne permettent pas d'organiser des transports par voie de route, pour des destinations lointaines.

En ce qui concerne le vin, les commandes adressées au ministère du ravitaillement n'ont pas reçu de suite et il serait urgent qu’une expédition de vins du pays parvînt à mon département.

Ressources que le département possède en excédent.

a) Charbon. Les mines du Pas-de-Calais ont retrouvé presque complètement leur activité et les exportations normales ont repris.

b) Blé. Sur rapport du directeur des services agricoles, le département serait en mesure d'exporter 600.000 quintaux de blé, compte tenu des besoins de l'armée allemande qui ne sont pas connus.

c) Sucre. Les sucreries du Pas-de-Calais détiennent avant le départ de la prochaine campagne, un stock global de 2.000 tonnes de sucre qui pourrait être exporté. Je dois ajouter que ces deux produits se trouvent visés par l'arrêté d'interdiction d'exportation hors du département Nord Pas-de-Calais, que l'autorité allemande a mis mon prédécesseur en demeure de prendre au mois de juillet.

d) Alcool. Le service des alcools dispose dans le Pas-de-Calais, d'un stock important dont les 2/3 pourraient être exportés.

Destination des excédents. Au cas où l'interdiction d'exportation édictée par l'autorité occupante pourrait être levée, les produits excédentaires ci-dessus pourraient être dirigés par voie de fer aux destinations que prescrirait le ministère du ravitaillement général. En conclusion, il peut être dit que la situation du département au point de vue alimentaire n'est pas actuellement très mauvaise. La désorganisation totale née par le fait de guerre est réparée en partie. Dans l'ensemble, les habitants n'ont pas encore réalisé la gravité de la situation et ne se rendent pas compte des plus amples restrictions que les mois à venir doivent leur apporter inévitablement.

Pour le pays minier, il doit être signalé cependant que le rendement du travail des ouvriers a baissé du fait de l'insuffisance de nourriture, l'ouvrier ayant l'habitude traditionnelle des tartines de beurre et du café, denrées dont l'une a disparu du marché et dont l'autre existe en quantités très insuffisantes. Il y a là une situation de fait qui ne laisse de préoccuper le service du ravitaillement du département.

Communications

Service postal

Depuis le 10 août 1940, l'acheminement des objets de toutes catégories a été repris à l'intérieur de la zone occupée et les guichets réouverts au public pour toutes les opérations intéressant le service postal et les services financiers.

Le transport du courrier dans le département était encore assuré jusqu’au 8 septembre inclus par des services automobiles et des relais cyclistes. L'utilisation de quelques trains sur certaines lignes intéressant la région a permis de réduire le nombre de services automobiles et surtout le nombre des relais cyclistes parfois très pénibles.

À noter à ce sujet que les agents des postes utilisant la bicyclette pour les besoins du service éprouvent de grandes difficultés à se procurer les accessoires nécessaires à l'entretien de leur vélo. Des facteurs cyclistes ont déjà dû abandonner l'usage de la bicyclette d'où ralentissement de la distribution dans leur secteur. Les relations interdépartementales ainsi que celles avec Paris et au-delà ont pu être sensiblement améliorées.

Service télégraphique

Suspendu tant au point de vue officiel qu’au point de vue privé.

Service téléphonique

Jusqu’à présent, la reprise du service téléphonique est limitée au trafic urbain. Sur 803 réseaux que comporte le département du Pas-de-Calais, 8 seulement sont réouverts, ceux de : Arras, Bapaume, Berck-Plage, Béthune, Bruay-en-Artois, Lens, Montreuil-sur-Mer et Saint-Pol-sur-Ternoise.

Ils desservent au total 105 abonnés autorisés contre 2907 au 1er avril 1940.

Des instructions viennent d'être demandées à la direction régionale des PTT à Lille en vue de la remise en état des 79 nouveaux réseaux ; 361 abonnés reliés à ces réseaux ont exprimé le désir de pouvoir reprendre l'usage de leur poste. Toutefois la reprise du service dans ces réseaux est subordonnée à la réfection préalable des installations intérieures des bureaux et des lignes d'abonnés. L'estimation des destructions d'artères et de centraux n'est pas terminée. d'une façon générale les fils ont été coupés aux abords des villes et villages. Dans certaines régions (Saint-Inglevert, Licques) l'armée allemande a récemment détruit en totalité les artères sur routes. Vers la côte, les artères sur voie ferrée ont particulièrement souffert, par exemple :

1) De Rang-du-Fliers à Boulogne-sur-Mer : entièrement détruite à la traversée de la Canche à Étaples (600 mètres).

2) De Boulogne-sur-Mer à Calais : détruite au pont de Terlincthun à Wimereux, Marquise, Caffiers (au total environ 3 kilomètres).

Les dégâts causés aux installations intérieures des bureaux sont, dans de nombreux cas, limités. Cependant à Aire-sur-la-Lys, Audruicq, Carvin, Courrières, Havrincourt, Saint-Venant notamment, les meubles détruits par l'incendie ou mis hors d'usage sont à remplacer.

Le central le plus important du département, celui de Boulogne-sur-Mer, restera fermé pour une période indéterminée. Depuis le 12 septembre courant, l'accès de l'immeuble situé dans un quartier dont l'évacuation totale a été ordonnée est rigoureusement interdit. De plus, un violent bombardement britannique effectué le lendemain, de 20h30 à 1h du matin, a occasionné une fois encore des dégâts importants : cloisons de séparations renversées, nombreuses fenêtres et portes arrachées et brisées, toiture ouverte en plusieurs endroits, etc. Un programme de réorganisation du réseau téléphonique établi par la direction régionale des PTT à Lille pour l'ensemble de la région (Nord, Pas-de-Calais, Somme), a reçu l'approbation de la Feld-Nachrichten-Kommandantur 24. Ce programme prévoit principalement pour le département du Pas-de-Calais le rétablissement :

1) De toutes les installations des bureaux centres de groupement et des bureaux locaux rattachés à ces centres, ainsi que des lignes d'abonnés ;

2) Des circuits reliant les bureaux centres de groupement au central téléphonique d'Arras. Celui-ci serait, en outre, en relation directe avec Lille et, suivant une récente note de l'administration centrale des PTT, avec Amiens.

Mais la réalisation de ces programmes présente de multiples difficultés. Il convient tout d'abord de signaler l'insuffisance du personnel technique dont dispose l'administration des PTT eu égard à l'importance des travaux à effectuer. Sur un effectif normal de 283 agents, le personnel technique ne compte actuellement que 170 unités. Les équipes en résidence dans les régions de Boulogne-sur-Mer et Calais ont été réquisitionnées jusqu’à ce jour par l'armée d'occupation pour la construction de lignes militaires. Dans ce secteur du département aucun travail de réfection de lignes n'a donc pu être entrepris.

La pénurie de main d'œuvre se fait également sentir dans les autres circonscriptions. À Arras, par exemple, 40 demandes de rétablissement de ligne d'abonnés ne seront satisfaites que dans un délai relativement long, faute d'agents des lignes disponibles, les trois équipes de la résidence procédant à la réfection d'artères sur voie ferrée et route.

D'autre part, l'insuffisance du matériel de remplacement entrave pour une large part la progression du travail de reconstitution. Les magasins, depuis les événements de mai dernier, ont été vidés en presque totalité de leur contenu, soit par pillage, soit et surtout, en raison des prélèvements importants opérés par l'armée allemande. Pour rétablir les circuits et les lignes d'abonnés, les équipes utilisent du fil de récupération dont les sections sont généralement très courtes. Elles ne disposent, par ailleurs, que d'un petit outillage réduit et des fournitures telles que la soudure, le charbon de bois, font à peu près défaut.

J’ajouterai encore que les moyens de transport du personnel et du matériel ne correspondent pas aux besoins constatés et ne comprennent quant à présent qu’une camionnette et un camion pour l'ensemble des circonscriptions de Saint-Pol-sur-Ternoise, Arras, Béthune et Lens. Les véhicules automobiles stationnés à Boulogne-sur-Mer et de Saint-Omer sont réquisitionnés par les autorités allemandes.

Quoi qu’il en soit, un certain nombre de petits circuits locaux ont pu être réparés. Mais il n'est pas certain qu’ils soient encore utilisables au moment où l'autorisation de les exploiter sera accordée. Certains d'entre eux ont été à nouveau sectionnés par les troupes d'occupation, d'autres réquisitionnés dès la fin des travaux.

En conclusion, il n'apparaît pas que le service téléphonique puisse être assuré de façon normale dans le département du Pas-de-Calais avant de longs mois, non seulement en raison des difficultés qui viennent d'être exposées, mais aussi si l'on admet comme vraisemblable que les artères et les installations pourront souffrir de nouveaux dégâts résultant de la continuation des opérations militaires.

Personnel. De nombreux agents n'ont pas encore rejoint leur poste en raison de l'interdiction de franchir la ligne Somme-Aisne. À défaut d'une rentrée générale de tout le personnel, il serait nécessaire que les agents indispensables soient remis au plus tôt à la disposition de l'administration des PTT ; le bon fonctionnement des services ne peut être assuré qu’à cette condition.

Locaux de service. Sur 210 immeubles occupés par l'administration, 5 sont détruits ou irréparables, 23 sont endommagés mais réparables. Les services qui fonctionnaient dans des immeubles détruits ont été transférés dans d'autres locaux. Dans les immeubles endommagés, les réparations les plus urgentes (réfection des toitures, portes et fenêtres) ont été effectuées. La remise en état des bureaux se poursuit. Quelques bureaux continuent d'être occupés en totalité (Maresquel et Wailly-Beaucamp) ou partiellement par les autorités allemandes.

Chemins de fer

Depuis le 18 juillet, l'activité ferroviaire s’est accrue dans tous les domaines. On fait circuler maintenant sur la presque totalité des lignes des trains de voyageurs, de marchandises ou des trains mixtes voyageurs-marchandises.

Le transport des voyageurs s’intensifie au fur et à mesure que les relations ferroviaires s’améliorent. La quasi-totalité des gares a été ouverte au service commercial, pour l'ensemble des services, et on note déjà des arrivages importants, principalement de denrées de la région parisienne, de Normandie et de Bretagne.

L'amélioration constante que l'on cherche à réaliser dans ce domaine sera certainement susceptible de créer de nouveaux courants de transports pour le ravitaillement de la population. Le plus gros trafic de marchandises consiste aux transports des houilles. C’est ainsi qu’au mois de juillet, on expédiait du bassin houiller du Pas-de-Calais quelques trains par jour, alors qu’actuellement on peut compter sur une expédition journalière d'environ 30 trains de ce bassin. Accessoirement, on peut indiquer que les installations se rétablissent peu à peu et que des études sont actuellement en cours pour la remise en état des bâtiments principaux, halles PV, halles messageries, etc. La reconstruction progressive des ponts permettra vraisemblablement, dans un avenir très proche, de créer de nouveaux courants de transports.

Ponts et chaussées

1) Situation. La démobilisation a permis à un certain nombre d'agents de reprendre leur poste, par ailleurs certains fonctionnaires du service maritime ont été repris par le service ordinaire, et ceci a donné la possibilité de ne plus utiliser, à partir du 1er septembre, les retraités qui avaient été rappelés l'an dernier. Actuellement, l'effectif comprend, en dehors de l'ingénieur titulaire, 3 ingénieurs d'arrondissement (sur 5 en temps de paix), 35 ingénieurs subdivisionnaires titulaires (sur 40), 21 adjoints techniques, 5 agents de bureau, 88 chefs cantonniers, 457 cantonniers.

2) Occupations. Le personnel doit assurer l'entretien des routes nationales et départementales. En plus de ce travail courant du temps de paix, rendu difficile par la présence des armées d'occupation qui réquisitionnent les matériaux approvisionnés sur les routes, le service a été chargé de :

a) La construction ou reconstruction de ponts provisoires en remplacement des ponts détruits ;

b) La réorganisation des transports publics routiers ;

c) Les réparations aux immeubles, endommagés par fait de guerre.

Les routes ont été remises en état par comblement des trous, ornières, causés par les démolitions et les dégels du printemps dernier à l'aide des équipes de cantonniers, mais les goudronnages annuels n'ont pu être faits.

La reconstruction des ouvrages provisoires et ouvrages présentant une passe marinière pour la navigation est en cours sur le canal de la Deûle et va commencer sur les autres canaux en suivant les travaux de déblaiement exécutés par le service de la navigation.

Pour les transports routiers, on met en place une organisation avec centres de groupage de fret, de façon à diminuer les transports à vide ; mais les moyens de transports routiers sont encore très insuffisants ; sur un tonnage utile de 6.600 tonnes du temps de paix, il n'y a plus actuellement qu’un tonnage utile de 1.600 tonnes.

Quant au service des réparations aux immeubles endommagés par fait de guerre, il vient d'être constitué, aussitôt reçue la circulaire interministérielle du 16 août, avec un appoint d'agents du service d'apurement des dommages de la guerre de 1914, et commence à recevoir les demandes des intéressés.

- Fonctionnaires absents à rappeler. Il s’agit des prisonniers. La difficulté des communications provenant des allocations limitées d'essence nécessite une décentralisation dans l'organisation des chantiers et leur surveillance, aussi convient-il de faire occuper chacun des postes d'ingénieurs divisionnaires. D'autre part, le service des réparations aux immeubles endommagés ne saurait être assuré dans les conditions de rapidité voulues qu’à l'aide d'un appoint d'agents qualifiés.

- Communications. Les communications par routes sont assurées, un peu allongées en certains endroits où des ponts détruits de peu d'utilité n'ont pas été remplacés par un ouvrage provisoire. Mais, comme il a été dit plus haut, il y a insuffisance notoire de camions. Ceux qui sont en état ne sont pas toujours utilisés, faute de carburant. De plus, des réquisitions d'usage en sont opérées journellement par les armées d'occupation pour leurs travaux et l'organisation des transports en souffre.

Les communications par voie d'eau ne sont pas rétablies. Le canal de la Deûle sera libéré d'entraves dans le courant d'octobre.

Les services de la SNCF ont repris partiellement mais souffrent du manque de wagons. Pour les voies ferrées d'intérêt local, une exploitation a été reprise sur les lignes à voie droite de Lens à Frévent et de Berck vers Anvin-Calais et fonctionne à plein pour le transport de marchandises.

- Destructions. Les destructions aux routes, aux services d'eau et d'électricité ont été réparées presque partout. Par contre, les réfections des ponts définitifs n'ont pas été encore entreprises à cause des difficultés d'approvisionnement en acier.

- Main d'œuvre. Le service des ponts et chaussées emploie un effectif d'environ 1.500 chômeurs à des travaux de remise en état des accotements, des fossés, des chaussées et au renforcement des équipes de cantonniers insuffisantes.

C) Destructions.

Le recensement par commune des immeubles détruits par faits de guerre a été effectué. Voici les chiffres :

Immeubles complétement détruits : 4.000 environ.

Immeubles endommagés et réparables : 18.000 environ.

On peut évaluer les dégâts à une somme approximative de 900 millions.

Il est malheureusement nécessaire de noter que l'œuvre de destruction se poursuit sur la côte. Des dégâts considérables ont en effet été occasionnés ces jours derniers par les bombardements notamment à Calais et à Boulogne-sur-Mer et dans les régions avoisinantes.

Dans toute la mesure du possible nous nous évertuons à appliquer les différents textes visant le déblaiement et les réparations nécessaires. Il faut cependant constater que d'une manière générale un effort remarquable de la part des sinistrés a été réalisé et la bonne saison a permis à beaucoup de faire le nécessaire pour se défendre contre les intempéries prochaines.

Il reste hélas beaucoup d'immeubles à sauver de la destruction et si les dispositions envisagées pour la fabrication de matériaux et leur approvisionnement ne peuvent pas être facilitées en raison des circonstances par les autorités allemandes, les bonnes volontés et l'action des services techniques seront obligatoirement arrêtées par le manque de matériaux. Le Gouvernement nous a prévenu qu’il se préoccupait de la construction de baraques qui seraient ultérieurement mises à la disposition des communes sinistrées. C’est une initiative dont la valeur sera particulièrement appréciée et en ce qui concerne mon département, je fournis au ministre intéressé toutes indications utiles.

Industrie

1) Industries détruites ou fortement endommagées. À part la région boulonnaise et calaisienne pour laquelle il est difficile de fournir des renseignements définitifs en raison de sa situation spéciale, je n'ai rien à ajouter aux indications contenues dans mon rapport du 19 juillet 1940, sauf que la sucrerie Béghin à Corbehem a déjà réalisé une partie importante des travaux de remise en état et pourra très vraisemblablement fonctionner au début de la prochaine campagne.

2) Industries dont l'équipement est intact et pour lesquelles la main d'œuvre fait défaut. Il n'existe aucune de ces industries dans le département. La main d'œuvre se trouve en quantité très suffisante pour assurer le fonctionnement normal des différents établissements industriels.

3) Industries n'ayant pas encore repris leur activité. Des modifications assez sensibles se sont produites depuis l'envoi de mon rapport du 19 juillet. À l'heure actuelle, la plupart des industries ont repris tout au moins en partie leur activité, sauf en ce qui concerne : - La plupart des usines de constructions mécaniques et métallurgiques dont le ravitaillement en matières premières fait défaut ; - Les fabriques de ciments et les tuileries briqueteries ; - Les verreries et fabriques de produits céramiques. La raison de l'inactivité de ces usines résulte surtout de l'absence de transports, soit pour approvisionner ces usines en matières premières, soit pour l'enlèvement des produits fabriqués.

4) Industries en activités.

Mines.

1) Le problème de ravitaillement des populations des départements du Nord et du Pas-de-Calais ne peut encore être considéré comme résolu. La production des mines a repris dans des conditions satisfaisantes, mais une partie importante de cette production doit être stockée, par suite de l'insuffisance des moyens de transport. L'autorité allemande se réserve d'ailleurs le droit de décision en matière de répartition des charbons pour les deux départements.

2) La remise en état des canaux entre le bassin minier et Lille d'une part, Paris d'autre part, s’effectue assez rapidement. Un délai de un à deux mois sera sans doute nécessaire pour que les transports par eau reprennent. Le problème des péniches se posera probablement avec acuité. Les transports de charbon par fer ont repris depuis un mois à peu près pour toutes les zones des deux départements du Nord et du Pas-de-Calais. Elles ont également repris sur Paris et au-delà et plus récemment sur l'Est. Le manque de wagons tombereaux vides, qui s’aggrave sensiblement depuis le début de septembre, menace de constituer un obstacle à peu près insurmontable pour l'exécution des programmes d'expéditions.

3) Un ordre de priorité ayant été établi pour les expéditions des troupes allemandes, Reichsbahn, SNCF, métallurgie de l'Est, gaz et secteurs électriques, il est à craindre, si la question du matériel disponible n'évolue pas favorablement, que les autres catégories de consommateurs ne reçoivent que des quantités très réduites de charbon.

Alimentation. Dans l'ensemble l'activité de ces industries signalées dans mon dernier rapport a persisté bien que notamment pour les brasseries et malteries il existe une grosse difficulté d'approvisionnement en matières premières.

Industries chimiques. Il est à noter la reprise de toutes les industries annexées aux mines dont l'importance est particulièrement grande dans le département. Ces établissements travaillent avec un effectif voisin de celui occupé en mai 1940 avec une durée de travail de 40 heures par semaine.

Tanneries et fabriques de chaussures. Ces industries ont repris leur activité et travaillent environ à 50% de leur production normale, mais il est à craindre par suite de la réquisition quasi-totale des cuirs par l'armée allemande, que leur activité soit ralentie ou même complètement arrêtée d'ici 2 à 3 semaines.

Bâtiment. Une certaine activité se manifeste dans les entreprises de la région minière. Pour le reste du département l'activité reste faible et il serait nécessaire que les grands travaux prévus puissent commencer dès que possible afin d'occuper la main d'œuvre actuellement en chômage.

Je signalerai également la difficulté présentée pour les usines en activité par les transports ; ceux-ci sont améliorés depuis deux mois mais d'une façon très insuffisante pour permettre à l'industrie de retrouver une activité normale.

Agriculture

Terres incultes et fermes abandonnées. Dans le département du Pas-de-Calais, aucune terre labourée ne sera laissée inculte, sauf les terres que se réserve l'autorité militaire allemande ou celles qui font partie des communes de la côte soumise au bombardement.

Des entraves à l'exploitation du sol sont apportées dans les régions où existent des terrains d'aviation.

Une enquête sur les exploitations abandonnées a révélé qu’il y a encore 16 exploitations agricoles, situées pour la plupart dans l'arrondissement d'Arras, dont le chef d'exploitation évacué n'a pu encore rentrer parce que les autorités militaires s’y opposent. Ces fermes sont toutes gérées avec la collaboration des comités communaux de la production agricole.

Des démarches sont actuellement faites, par l'intermédiaire de la Feldkommandantur pour faciliter la rentrée de ces exploitants.

Travaux agricoles et rendements des cultures. La récolte des céréales, favorisée par un temps sec a été faite dans les délais normaux, avec une main d'œuvre fortement réduite. l'arrondissement d'Arras a seul bénéficié de la collaboration de 800 soldats français, prisonniers de guerre. Dans les autres arrondissements, des prisonniers de guerre devaient aussi aider aux travaux de récolte mais des difficultés imprévues n'ont pas permis de les répartir dans les fermes. l'approvisionnement en ficelle lieuse n'a pas donné lieu à de trop grandes difficultés. Dans l'ensemble, la récolte de blé est nettement inférieure à celle de l'an dernier qui était très bonne. Le rendement en grains a été évalué à 18 quintaux contre 26 en 1939 et 22 quintaux en année moyenne. Ce faible rendement est dû aux semis tardifs et à l'échaudage résultant d'une forte invasion de rouille. Le grain est sec mais i renferme beaucoup de grains maigres.

Les autres récoltes ont été bonnes, à l'exception de celle de la pomme de terre qui est irrégulière et ne représente guère que les 2/3 de la récolte l'an dernier.

Les rendements de la betterave sucrière seront plus importants qu’on ne l'avait prévu en juillet. On estime qu’ils atteindront 28 à 30 tonnes par hectare en moyenne. Des dispositions sont prises pour les arrachages et pour le travail en sucrerie. La main d'œuvre complémentaire nécessaire aux arrachages, sera fournie par des prisonniers de guerre. Les betteraviers insistent auprès des sucreries, par l'intermédiaire de leur commission betteravière pour que des dépôts soient créés, comme en temps normal, dans tous les centres de réception. Ces dépôts constituent, en effet, le tampon nécessaire permettant le déchargement rapide des chariots et évitant une perte de temps qui retarde les semis de blés.

Neuf sucreries sur douze travailleront, ainsi que la distillerie de Verton qui représente la distillerie la plus importante de France. Un accord est intervenu entre les industriels du Nord et du Pas-de-Calais et mes services pour réduire au maximum les transports, en évitant les chevauchements de leurs zones de ramassage.

Cheptel. La direction des services vétérinaires repris son activité dès le début juin. Elle s’est efforcée d'apporter remède non seulement à la désorganisation de ses services mais encore aux conséquences sur le cheptel de la guerre, du passage des troupes et des réfugiés dans les campagnes.

Au point de vue des soins aux animaux, la situation reste déplorable par manque de vétérinaires praticiens. Sur 60 vétérinaires sanitaires habitant le département 30 sont rentrés, l'âge variant pour 24 d'entre eux de 55 à 74 ans. 23 vétérinaires sont prisonniers de guerre. 7 sont en zone occupée au-delà de la Somme ou en France libre et ne peuvent rejoindre leurs foyers.

Au point de vue épizootique, la fièvre aphteuse apparait envahissante, bien que moins grave qu’au cours de la dernière épidémie de 1938 ; le manque de soins aux animaux et de surveillance des zones infectées se font cruellement sentir.

J’ajouterai que le contrôle des abattages, l'inspection des viandes et denrées alimentaires d'origine animale sont complétement désorganisés. Un tiers à peine des abattoirs et tueries particulières sont inspectés par suite de l'absence de vétérinaires qui en ont la charge et les difficultés de transports pour les autres vétérinaires qui pourraient parfois en faire l'intérim.

Dans les agglomérations minières de l'arrondissement de Béthune, la viande et la fabrication des viandes travaillées ne sont pas inspectées pour la plus grande part et la santé publique en court le plus grand risque.

Chevaux. Les régions de culture industrielle, la région d'Artois notamment, accuse un manque de chevaux que l'on pense combler en partie par des achats et en partie par des prêts de chevaux à l'armée allemande. La rareté des chevaux a entrainé une augmentation très sensible de leurs prix. Les poulains de 18 mois valant 10 à 12.000 francs, les chevaux de 15 à 20.000 francs.

Bovins. La réduction des effectifs, dont le recensement en cours accusera l'importance a également fait augmenter le prix des vaches laitières qui atteignent jusqu’à 6000 francs. d'autres part, la conséquence la plus directe de cette situation est la diminution de la production du lait et du beurre.

La situation désastreuse actuelle du cheptel fortement amoindri explique les difficultés du ravitaillement en viande d'autant que le département ne peut en temps normal se suffire à lui-même. Il se fait chaque année dans le Pas-de-Calais une importation de 20 à 25.000 têtes de bétail que l'on engraisse dans le département. Le manque de ces animaux, les réquisitions répétées depuis un an, les perte d'animaux du fait de la guerre et de l'invasion, les réquisitions par les autorités occupantes, les abattages désordonnés auront une très grave répercussion sur l'avenir.

Principales difficultés rencontrées par l'agriculture.

Main d'œuvre. Un grand nombre d'agriculteurs mobilisés sont prisonniers de guerre. Il serait extrêmement désirable de les renvoyer dans leurs foyers en congés de captivité.

Carburants. Leur répartition aux agriculteurs s’organise progressivement. Dans l'arrondissement d'Arras Saint-Pol, les contingents accordés jusqu’au 31 octobre représenteront approximativement les 2/3 des besoins strictement nécessaires. Ailleurs, les contingents ne sont pas connus.

Fil de fer pour presse, fers à cheval et clous à ferrer. Les entrepreneurs de battage et les maréchaux ont des difficultés à s’approvisionner en ces produits parce qu’il n'existe pas de fabrique dans le département, et qu’ils ont beaucoup de difficultés pour s’approvisionner en dehors.

Aliments du bétail. Les réserves fourragères de foin notamment sont fortement entamées dans la partie du département où séjourne la cavalerie allemande. Ailleurs, la diminution des surfaces de betteraves va entrainer une réduction très importante des disponibilités en pulpe. Cette situation est fortement aggravée par la très faible quantité de tourteaux et autres aliments concentrés du bétail pouvant exister dans le commerce.

Questions financières

Situation monétaire

En plus des billets des Reichskreditkassen de 50, 20, 5, 2 et 1 reichsmark et de 50 pfennig, sont également maintenant en circulation, par suite sans doute des achats des soldats allemands, les pièces ordinaires de 1, 2, 5 pfenning. Je crois savoir que les Reichskreditkassen vont en outre émettre des pièces de 5 et 10 reichspfennig.

Le remboursement des avances en reichsmark faites par l'autorité allemande par l'intermédiaire des préfets du Nord et du Pas-de-Calais a été demandé par cette même autorité. Il a été convenu que la partie de ces avances versés aux mines serait remboursée par l'intermédiaire du Crédit du Nord. Le reste des avances devait être remboursé par l'intermédiaire de la Banque de France de Lille qui retirerait à cet effet dans toutes les succursales et bureaux rattachés de ces deux départements les encaisses en reichsmark et en franc belges et les transférerait la Reichskreditkasse à Lille. Les francs belges déposés dans les banques privées devaient également servir au remboursement, la Reichskreditkasse à Lille livrant à ces dernières des quittances des francs belges apportés et ces quittances étant remboursées en francs français par la Banque de France.

La Banque de France devait effectuer ces remboursements par multiples de 10.000 RM. Ces remboursements devaient être portés en compte, moitié pour le département du Nord, et moitié pour le département du Pas-de-Calais, valeur un jour après le versement. Si la Banque de France craignait que l'application de ces conditions de remboursement entrainât une gêne de la circulation monétaire, elle devait présenter un rapport motivé à l'Oberfeldkommandantur pour obtenir un délai.

En fait le Crédit du Nord n'a pas remboursé directement à la Reichskreditkasse à Lille les avances faites aux mines ; il a effectué ses versements à la Banque de France.

Les 10.000.000 RM et 200.000.000 francs d'avances faites par l'intermédiaire de la Préfecture du Pas-de-Calais, sont dès maintenant entièrement remboursés.

Les comptables du Trésor ont à eux seuls remis à la Banque de France 4.510.028 RM.

Les succursales de la Banque de France du Pas-de-Calais avaient en outre en caisse au 13 septembre 5.122.400 RM et 954.375 francs belges. A la même date la Trésorerie générale de ce département avait 135.378 RM et on peut évaluer à 500.000 les Reichsmark et à 800.000 les francs belges (reçus au cours primitif de 100 francs belges pour 200 francs français) détenus à la même date par les autres comptables du Trésor du département.

Je signale que les banques privées sont dans l'obligation de faire le change des francs belges qui leur sont apportés et de remettre ces francs belges à la Reichskreditkasse à Lille.

l'approvisionnement en francs par les soins de la Banque de France a repris normalement.

Situation bancaire

Le fonctionnement des banques a repris normalement dans le département. d'après les renseignements recueillis, toutes les agences et sous agences des grandes banques (Banque de France, Banque Dupont, Banque nationale pour le commerce et l'industrie, Crédit Lyonnais, Crédit du Nord, Société générale) ont été rouvertes à l'exception des sous agences de Lens de la Banque nationale pour le commerce et l'industrie et du Comptoir national d'escompte. Ces établissements ont récupéré leur comptabilité et sont régulièrement approvisionnés de fonds par leurs sièges sociaux. Ils remboursent leurs déposants et accordent les avances et crédits dans les conditions habituelles.

Leur activité est d'ailleurs assez réduite, parce qu’étant donné le marasme économique, les besoins de crédit sont peu étendus. Les commerçants qui épuisent leurs stocks et éprouvent les plus grandes difficultés pour les reconstituer, loin d'avoir le plus souvent besoin d'argent, ont au contraire des disponibilités qu’ils ne peuvent employer et qu’ils déposent dans les banques. Il en est de même de beaucoup d'industriels qui ne peuvent assurer leur approvisionnement en matière première.

Toute reprise économique sérieuse est subordonnée avant tout aujourd'hui au rétablissement de transports ferroviaires normaux permettant la reconstitution des stocks du commerce, l'approvisionnement des usines en matières premières et l'écoulement des produits fabriqués.

Les représentants des banques désireraient vivement avoir la possibilité : 1/ de téléphoner à leur siège social (le plus souvent à Paris) pour la solution des questions urgentes ; 2/ se rendre sans difficultés à ce siège pour le règlement des questions délicates et importantes.

Ils ont en général à leur disposition le personnel nécessaire.

Caisses d'épargne. Toutes les caisses d'épargne du département ont repris leurs opérations normales à l'exception de celle de Bapaume qui s’était repliée hors du département, dont le caissier vient seulement de rejoindre son poste et qui ne tardera d'ailleurs pas à fonctionner de nouveau.

Elles remboursent leurs déposants sans aucune limitation depuis le 1er septembre.

Voici à titre de renseignement le mouvement des dépôts dans ces établissements depuis avril. (voir tableau en page 76).

Si les excédents des retraits ont été aussi faibles depuis juin, c’est que depuis l'occupation jusqu’à la fin d'août un plafond (250 francs par livre et par quinzaine) avait été fixé pour les remboursements à la demande de la Trésorerie générale qui, par suite des difficultés des transports de fonds, n'aurait pas en effet été en état de fournir aux caisses d'épargne les ressources nécessaires pour faire face à des retraits massifs des déposants. Cette restriction pour les remboursements a été levée, comme il a été dit plus haut, à partir du 1er septembre.

Situation des services du Trésor

Depuis le 22 juillet dernier les services du Trésor sont assurés d'une façon à peu près normale dans l'ensemble du Département tant à la Trésorerie générale que dans les recettes des finances et les perceptions.

La Banque de France ayant pu mettre à cette date une somme de 200 millions de francs à la disposition de Trésorier payeur général, en complément d'un versement de 20 millions fait le 15 juillet, le paiement des dépenses arriérées de l'État, du Département et des communes a été commencé immédiatement (reliquat des traitements de mai et juin des différents fonctionnaires, reliquat sur pensions échues de mai à juillet, coupons de rentes et valeurs). Pour faciliter les paiements des allocations militaires et des secours aux personnes privées de ressources, des régisseurs de dépenses furent institués dans toutes les villes et localités importantes et dans la région minière.

Par la suite, l'approvisionnement en francs par la Banque de France étant redevenu Norma, on a pu supprimer, à partir du 1er septembre, les limitations que les circonstances avaient imposé d'apporter au remboursement des bons du Trésor et de la Défense nationale arrivés à échéances ainsi qu’aux retraits des caisses d'épargne.

J’ajoute que le rétablissement des relations postales à partir du 12 août a eu une répercussion heureuse sur la marche des services du Trésor au point de vue surtout des possibilités du service recouvrement.

Recouvrement. Les recouvrements, demeurés presque nuls pour les mois de juin et juillet, ont sensiblement repris en août et il est permis d'escompter une nouvelle amélioration au cours des prochains mois, bien que dans les villes les comptables doivent faire preuve de modération pour tenir compte de la situation actuelle. Les reste à recouvrer sur impôts directs s’élèvent fin août pour les exercices antérieurs aux sommes suivantes :

Exercices antérieurs à 1937 : 2.524.000 francs.

Exercices antérieurs à 1937 et 1938 : 4.051.000 francs.

Exercices antérieurs à 1939 : 52.266.000 francs.

Il a été recouvré de mai à août sur les exercices antérieurs à 1937 : 14.000 francs.

Sur les exercices de 1937 et1938 : 213.000 francs.

Et sur l'exercice 1939 : 7.376.000 francs.

Les recouvrements au titre de 1940 s’élèvent fin août à 61.733.000 francs sur un montant de titre atteignant 69.798.000 francs. Pendant la période de mai à août, ils ont atteint 20.023.000 francs. Il s’agit pour la plus grosse part de la contribution nationale de 2,5 et 15 % et de l'impôt cédulaire sur les traitements.

Les rôles généraux des anciennes contributions directes n'ont été en effet émis qu’en août et seulement pour les communes rurales, à l'exception de celle d'Equihen-Plage créée en 1940. Quant à la confection des rôles pour les villes recensées, elle est arrêtée par le manque d'imprimés. Le directeur des contributions directes espère toutefois bientôt recevoir les cadres dont il a besoin pour achever ce travail.

Aucun rôle général d'impôts sur le revenu n'est encore émis.

Le tableau ci-après donne la comparaison des recettes centralisées à la Trésorerie générale au cours de l'année 1939 et des différents mois d'avril à août de l'année courante.

Recettes centralisées à la Trésorerie générale au cours de l'année 1939 et des différents mois d'avril à août de l'année courante

Émission des bons du Trésor. L'émission des bons du Trésor et de la Défense nationale, devenue presque nulle au début de la période d'occupation, accuse une progression sensible pendant les mois de juillet et août. Le tableau ci-dessous fait connaitre les émissions pendant les mois d'avril à août.

6 mois - 1 an 2 ans 3 ans
avril 1940 30.943.500 60.507.500 24.332.500
mai 15.723.500 26.669.000 9.663.000
juin 353.500 221.000 25.500
juillet 4.641.500 1.652.000 1.385.000
août 7.821.500 6.121.500 3.843.500

Questions sociales

Assurances sociales

Toutes les caisses d'assurances sociales ayant des adhérents dans le Pas-de-Calais ont repris leur fonctionnement :

- Les caisses maladie maternité depuis le début du mois d'août ;

- Les caisses vieillesse invalidité depuis la deuxième quinzaine d'août.

Pour ces dernières, de grosses difficultés subsistent pour rétablir le contact avec leurs pensionnés. Les assurés retraités ont été priés, par la voie de la presse, de signaler à leurs caisses leur nouvelle adresse ou confirmer leur ancienne.

Les caisses d'assurances sociales du Pas-de-Calais dépendent du service régional des assurances sociales de Lille dont le fonctionnement a repris depuis le début de juillet. l'activité de ce dernier se trouve, d'une part, considérablement réduite en raison du marasme d la vie économique à laquelle est lié le recouvrement des cotisations et, d'autre part, singulièrement compliquée par les difficultés de toute nature surgissant des événements récents et de la situation actuelle. De graves problèmes se poseront, sans doute, à brève échéance, pour toutes les caisses, sur le terrain financier.

Main d'œuvre et chômage

Les dispositions prévoyant le paiement des allocations de chômage par les soins de l'employeur n'ont pu être appliquées dans les départements du Nord et du Pas-de-Calais par suite de l'absence de communications entre ces départements et le ministre du Travail en cours du mois de juillet. Ce système, par ailleurs tout à fait provisoire, prévu jusqu’au 15 août ayant été successivement prorogé jusqu’au 15 septembre, puis jusqu’au 15 octobre. Il y a lieu de réaliser au plus tôt un contrôle effectif des salariés privés de ressources, par la remise en vigueur des dispositions du décret du 6 mai 1939 sur les fonds de chômage, ce régime pouvant entrer en vigueur à la date du 1er octobre prochain.

Le service de l'inspection du travail vient de procéder à une nouvelle enquête sur le chômage. Bien qu’il manque encore, et pour cause, les renseignements concernant certaines communes de l'arrondissement de Boulogne dont Calais, on constate une diminution très importante du nombre de chômeurs indiqué par l'enquête effectuée au cours du mois de juillet 1940 et fixant à 40.000 environ le nombre de salariés des deux sexes privés de travail pour l'ensemble du département.

Il ne semble pas que le total actuel des chômeurs doive excéder 20.000.

Une importante partie de ce contingent doit pouvoir être utilisée pour l'exécution des plans de grands travaux arrêtés par la commission départementale au cours de sa dernière réunion.

Accidents du travail. Une liaison a été établie entre les diverses compagnies d'assurances afin que le service des indemnités pour accidents du travail soit repris normalement. A cet effet, une permanence a été organisée par les agents des compagnies d'assurances à la chambre de commerce d'Arras.

Œuvres pour l'enfance

Les gouttes de lait fonctionnent mais avec irrégularité en raison de la difficulté de l'approvisionnement en lait.

Les crèches ne fonctionnent pas ; un effort va être tenté dans ce sens.

Quant aux consultations de nourrissons et aux consultations prénatales, elles sont assurées au fur et à mesure que les médecins peuvent rejoindre leur poste.

Les placements Grancher sont interrompus.

l'inspection médicale des écoles se fera dans les grandes villes.

Les vaccinations habituelles antivarioliques et antidiphtériques ont lieu normalement.

J’ajoute qu’à l'approche de l'hiver, j’ai invité les maires à créer avec l'aide financière du département des comités d'entraide ayant pour but de procurer aux enfants pauvres les vêtements chauds dont ils ont besoin.

Dispensaires

Les dispensaires de l'office départemental d'hygiène ci-dessous désignés ont repris leur activité : Vitry-en-Artois, Frévent, Montreuil, Étaples, Boulogne-sur-Mer, Calais, Audruicq, Saint-Omer, Lillers, Béthune, Bruay, Bully, Lens, Hénin-Liétard, Carvin.

Le dispensaire d'Arras ouvrira le 1er octobre. Celui de Calais fonctionne sans radiologie. Bertincourt n'a pu être réouvert mais on envisage sa reconstitution à Bapaume. Les dispensaires de Desvres et d'Hesdin sont occupés par les Allemands, les appareils de radiologie sont détériorés.

Il a été impossible de se procurer le matériel, rayon X, écran, ampoules, etc. et les monteurs nécessaires pour les réparations des appareils de radiologie.

Une demande adressée à l'Oberfeldkommandantur pour avoir l'autorisation d'aller à Paris chercher le matériel n'est pas retenue.

Lutte antivénérienne. La lutte antivénérienne se poursuit activement d'accord avec les autorités allemandes.

Voici enfin un bref aperçu de l'activité des différents services d'assistance. Dans l'ensemble, les service d'assistance ont retrouvé toute l'activité compatible avec la situation actuelle.

a) Sanatoria, hôpitaux départementaux et communaux. Fonctionnant normalement dans les parties disponibles de ces établissements. A noter toutefois que par ordre des autorités d'occupation, le sanatorium d'Helfaut a dû être évacué tout récemment sur l'établissement de Liessies (Nord).

b) Assistance à domicile. Le nombre des médecins ayant rejoint leur poste permet d'assurer les soins indispensables à la population indigente.

c) Assistance aux vieillards, aux femmes en couche, à la famille, prime à la première naissance. Depuis le mois de juillet, le mandatement de ces diverses allocations est normalement assuré par les services de la préfecture, sur les fonds du budget départemental.

d) Assistance aux personnes momentanément privées de ressources. Les dispositions provisoires prévues par l'arrêté préfectoral du 26 juin 1940 ont permis aux maires de pourvoir aux besoins essentiels des familles privées de ressources. A compter du 1er octobre prochain, les fonds de chômage reprendront leur activité, dans le cadre des règlements. Les personnes dont l'état nécessiteux ne résulte pas de manque de travail continueront de recevoir l'assistance nécessaire.

Bien que depuis un mois dans ce département, je puis me permettre de déclarer que, malgré les difficultés de l'heure et les obstacles que nous avons à surmonter, tous les services publics ont fait les plus grands efforts pour reprendre leur activité, grâce aux hommes énergiques, conscients de leurs devoirs et de leurs obligations qui les dirigent, grâce aussi à leurs collaborateurs de toutes catégories.

En soutenant le dévouement manifesté, en cherchant à imprimer l'impulsion nécessaire dans le cadre des prescriptions du Gouvernement, en prenant toutes initiatives que la situation commande, j’estime que nous parviendrons avant peu de temps à des améliorations plus appréciables encore.

Nous avons tous confiance dans l'avenir.

Le préfet

A. Bussière

20 novembre 1940

Paris, le 2 décembre 1940

Le préfet, délégué du ministère de l'Intérieur A Monsieur le ministre secrétaire d'État à l'Intérieur (Cabinet)

J’ai l'honneur de vous adresser ci-joint un rapport en date du 20 novembre 1940 sur la situation du département du Pas-de-Calais, rapport parvenu à la délégation le 25 novembre et diffusé par ses soins aux ministères intéressés.

M. le préfet du Pas-de-Calais signale que la marche des services est toujours contrariée par l'absence de nombreux fonctionnaires qui ne parviennent pas à se faire délivrer leur autorisation de retour.

Il insiste pour obtenir de nouveaux effectifs de gendarmerie et réitère sa demande de remplacement de l'uniforme trop usagé des gendarmes et gardes mobiles. En ce qui concerne la réinstallation des lignes téléphoniques interdépartementales et le demandes de laissez-passer dont devraient bénéficier certains chefs de service pour prendre contact avec leurs administrations à Paris, j’ai saisi de la question les autorités supérieures allemandes, de façon à appuyer l'intervention de Préfet auprès des autorités locales.

D'autre part, j’appelle l'attention du service du ravitaillement sur l'intérêt qui s’attache à l'intégration de l'économie particulière du Pas-de-Calais dans le système général. J’interviens dans le même sens auprès du secrétaire général de la Santé Publique, de façon à ce que le département puisse être muni d'urgence de matériel sanitaire dont il a besoin.

Par ailleurs, M. le préfet demande à l'administration supérieure d'examiner l'importante question de secours aux habitants privés de ressources. Sur son intervention, les maires allouent des secours qui, calqués sur les allocations de chômage, entraînent pour les municipalités des charges qui pèsent trop lourdement sur les finances locales.

Le préfet, enfin, demande des directives pour le regroupement de la Légion française des anciens combattants du Pas-de-Calais, actuellement divisée en deux parties sensiblement égales.

Je joins à mon envoi, un second exemplaire du présent rapport, de façon à vous permettre de faire éventuellement transmission à la Présidence du Conseil. Le Préfet délégué du ministère de l'Intérieur.


Arras, le 20 novembre 1940

Le préfet du Pas-de-Calais à Monsieur le général de corps d'armée, délégué général du Gouvernement français dans les territoires occupés

Si j’ai reçu votre télégramme du 5 novembre, par poste, le 6 novembre, je n'ai eu connaissance de la circulaire annoncée en date du 22 octobre 1940 émanant de M. le ministre secrétaire d'État à l'Intérieur que ces jours derniers.

C’est pourquoi le présent rapport arrivera avec quelques retards, ce dont je vous demande de vouloir bien m’excuser.

Étant donné que les faits qu’il relate sont arrêtés à la date du 20 novembre, je me contenterai, si vous n'y voyez aucun inconvénient, de ne vous envoyer mon prochain rapport qu’à la fin du mois prochain, étant entendu évidemment que si, entre temps, survenaient quelques modifications importantes, je ne manquerais pas de vous les signaler par rapport spécial.

Depuis mon dernier rapport, et ainsi que vous voudrez bien le constater par la suite, plusieurs questions touchant à l'intérêt général ont pu être réglées dans des conditions satisfaisantes. Mais la situation générale aux points de vue administratif, économique, financier et social est loin d'être redevenue normale.

C’est qu’en effet, le département du Pas-de-Calais, comme le Nord d'ailleurs, est toujours dans une zone spécialement réservée au qu’au surplus il continue de comprendre dans son territoire une partie (celle de la côte) sur 25 km en profondeur, où les difficultés sont plus accentuées du fait de la présence des troupes de combat et des organisations militaires administratives particulières qui échappent pour l'administration proprement dite et dans les contacts avec la population civile, aux organes habituels des départements occupés qui sont : l'Oberfeldkommandantur, les Feldkommandantur, et les Ortskommandantur.

Il en résulte des inconvénients de toutes sortes, des obstacles de toutes natures, des incompréhensions, des chevauchements ou des superpositions d'attributions qui s’opposent à la reprise ou à la continuation de l'activité dans tous les domaines, et je ne prévois pas pour maintenant encore quelques soient les efforts faits par nous tous, une amélioration sensible de cet état de choses si préjudiciables à nos intérêts.

Néanmoins, le moral de tous est élevé, la confiance et l'espoir règnent.

A noter spécialement l'attitude magnifique des populations de la côte, des villes de Calais, Boulogne-sur-Mer, Étaples, Le Touquet, Berck. Les bombardements sont presque incessants partout, les dégâts sont considérables et les victimes nombreuses. Il y a eu peu de repliements. Citons par exemple Calais dont la population normale était de 60.000 habitants et ù se trouvent encore 50.000 âmes. Boulogne-sur-Mer qui a encore 47.000 habitants sur 52.000. On couche dans les caves mais on travaille le jour.

La résignation et le courage de toutes ces populations méritent d'être cités et je ne saurais trop louer le sous-préfet de Boulogne-sur-Mer, M. Morin, les magistrats municipaux de ces villes et tout le personnel des services publics qui font leur devoir avec une haute conscience et donnent à tous un bel exemple de sang-froid et de dévouement.

Les populations des autres parties du département, quoique exposées moins fréquemment, font preuves également de ces mêmes qualités.

Les attaques des avions britanniques encore toutes récentes (Arras, Bruay, Mazingarbe, Pont-à-Vendin, Saint-Venant, etc.) ont été supportées sans la moindre panique.

État d'esprit public

L'opinion publique ne s’extériorise guère. Néanmoins, il n'est pas difficile de se rendre compte que la plupart des gens demeurent dans l'expectative, s’habituant mal à une occupation dont les rigueurs ne sont guère atténuées ces derniers temps.

En effet, des mesures sévères, des initiatives inopportunes, des décisions dont l'esprit est souvent mal interprété provoquent mécontentement et anxiété. Obligation à la population de surveiller les lignes téléphoniques de l'armée allemande ;

Arrestation d'hommes valides dans les communes où des fils ont été coupés (ces hommes, qui sont souvent des cultivateurs dont l'absence est nettement préjudiciable aux travaux agricoles, au ravitaillement de la population et de l'armée d'occupation elle-même, sont emmenés pour une destination et pour une durée inconnues).

Amendes infligées aux communes pour les mêmes raisons ;

Réquisitions massives de blé, d'avoine, fourrage, etc. ;

Obligations pour les cultivateurs voisins de camps d'aviation d'effectuer des corvées de travail ;

Mis à la charge des collectivités des frais de dépenses qu’il est difficile de considérer comme frais d'occupation.

Impossibilité de rentrer dans la zone interdite ou d'en sortir et difficulté d'obtenir des laissez-passer ;

Pas de relations téléphoniques ;

Restriction de la circulation automobile.

Dans le même ordre d'idée, et ainsi que je l'ai déjà signalé, les autorités d'occupation viennent d'infliger aux ouvriers mineurs qui n'ont pas travaillé le jour du 11 novembre, une amende égale à la valeur de deux journées de travail.

Toutes ces mesures créent évidemment un fâcheux état d'esprit.

Les communistes ne manquent pas, par ailleurs, d'exploiter le mécontentement provoqué notamment par le rationnement et les difficultés de ravitaillement. Leur propagande est d'autant plus difficile à combattre qu’elle s’exerce sournoisement et que, par contre et, en particulier dans les mines, les dirigeants des groupements ouvriers consciencieux ne font aucun effort sérieux pour les neutraliser.

Les services de police sont très diligents, et ainsi que je vous ai rendu compte plusieurs fois, ils ont pu ouvrir de nombreuses informations et procéder à quelques arrestations. Je m’emploie spécialement à soutenir cette action, je dois reconnaitre que moins de tracts que précédemment sont mis en circulation.

Je saisis, et au besoin je provoque toutes les occasions possibles pour faire comprendre l'œuvre immense de rénovation que le gouvernement de M. le Maréchal Pétain a entreprise pour faire valoir les réalisations acquises comme la haute portée morale des mesures déjà intervenues. Mes collaborateurs, des personnalités étrangères à l'administration mais avec lesquelles je suis en relations constantes, m’apportent à cet égard un concours aussi précieux que dévoué.

En ce qui concerne en particulier le ravitaillement, je m’efforce de remédier partout et le plus promptement possible aux difficultés qui me sont signalés (voir paragraphe spécial ci-après).

Les habitants du Pas-de-Calais sont paisibles ; ils ont trop et trop souvent soufferts de la guerre pour ne pas aspirer à travailler dans la paix, ils ont pour M. le Maréchal Pétain leur illustre patriote, le plus profond respect et la plus grande admiration ; les anciens combattants de la guerre 14-18 en particulier lui ont voué un attachement et une confiance sans borne. Ils l'aideront comme ils aideront le Gouvernement, car ils estiment, à l'exemple de tous les français, que les destinées de notre patrie ne peuvent être en meilleures mains.

Il est évident que l'on est impatient de connaitre le résultat des entretiens actuellement en cours. A noter que la publication du protocole concernant les prisonniers de guerre et les internés ont produit une réconfortante impression et beaucoup d'espoir. Je m’empresse d'ajouter que les relations entre les chefs de service français et les autorités allemandes (Oberfeldkommandantur, Feldkommandantur, et Ortskommandantur) demeurent parfaitement courtoises, dignes, correctes, et qu’en ce qui me concerne, en particulier, j’ai pu, à plusieurs reprises dans mes multiples interventions, protestations et démarches constater chez celles-ci une bonne volonté évidente e le souci de faciliter mon administration.

Questions administratives

La marche des services est toujours contrariée par l'absence de nombreux fonctionnaires qui ne parviennent pas à obtenir leur autorisation de retour. Je réitère cependant mes démarches à cet effet.

La vie administrative est plus compliquée de ce fait mais elle est néanmoins assurée grâce au dévouement accru des directeurs et des chefs de service et de leur personnel présent. A signaler toutefois la rentrée du directeur des Services agricoles et de trois rédacteurs de la préfecture.

Nous n'avons toujours pas d'intendant pour assurer la direction du service départemental du ravitaillement mais nous avons appris sa nomination, ce qui nous permet d'espérer son arrivée prochaine.

En ce qui concerne la gendarmerie, rien de nouveau. Nos effectifs sont toujours très réduits, ce qui ne laisse pas de rendre difficile la surveillance et la répression.

Je rappelle encore une fois la nécessité de pourvoir dans un très bref délai au remplacement des uniformes des gendarmes et gardes mobiles, je me permets d'insister sur ce point particulier.

Étant donné les difficultés pour obtenir des laissez-passer en faveur de certains chefs de service qui ont absolument besoin, pour nécessité de service, de se rendre à Paris dans leurs administrations centrales, ne serait-il pas possible que chaque ministère puisse faire accorder à son représentant dans le Pas-de-Calais un laissez-passer d'Arras à Paris et retour ?

Quelques fonctionnaires, notamment l'ingénieur en chef des ponts et chaussées ont été munis de cette autorisation par le département duquel ils relèvent. Au point de vue du télégraphe et du téléphone, il y aurait lieu de faire activer la réinstallation des lignes entre Paris et les départements du Pas-de-Calais et du Nord. Nous recevons par poste, acheminés par Amiens, les télégrammes qui nous sont destinés et nous ne pouvons encore téléphoner ni à Paris, ni en préfecture du Nord et du Pas-de-Calais, ni entre préfecture et sous-préfectures de ces départements.

A l'heure où de nombreuses instructions doivent être exécutées rapidement, où des renseignements nous sont demandés de toute urgence non seulement par la délégation générale, non seulement par les ministères, mais encore par les autorités d'occupation, il est à peine besoin de souligner l'intérêt primordial qu’il y aurait à ce que ces améliorations soient effectuées le plus tôt possible.

Administration municipale. Elle constitue de plus en plus une charge très lourde. Les autorités allemandes sont très exigeantes et les maires auxquels nous demandons nous-mêmes beaucoup sont totalement débordés.

Aussi ai-je enregistré depuis quelques temps de nombreuses démissions, motivées par le mauvais état de santé des maires qu’appuyent des certificats médicaux appropriés. d'autres magistrats municipaux répondent à mon appel et demeurent en fonctions. Le problème est grave. d'ailleurs, le gouvernement s’en est justement préoccupé et la loi annoncée concernant la réforme municipale sera particulièrement opportune (je vous ai adressé un rapport à ce sujet le 12 novembre).

Le nombre des comités de guerre diminue de plus en plus, les conseils municipaux qui ont retrouvé leur majorité peuvent délibérer valablement. Les avances en reichsmark consenties aux communes par les autorités allemandes ont été remboursée en totalité à ces dernières par l'État français. Des avances sur le Trésor continuent à être octroyées après avis du receveur municipal aux collectivités locales qui n'offrent pas de disponibilités budgétaires. Le montant total de ces avances s’élève à la date de ce jour à [22].710.481 francs.

D'accord avec le trésorier payeur général, j’ai invité les communes à prendre toutes mesures en vue du remboursement des avances qu’elles ont reçues (avances en reichsmark et avances sur les Trésor français) à l'exception des avances consenties pour le service des réfugiés et de celles destinées à faire face aux frais d'occupation qui sont à la charge de l'État français.

Enseignement Il n'y a que peu de modifications à signaler à la situation de septembre dernier.

Un peu partout, on a maintenant procédé aux réparations de première urgence et mis, par des moyens de fortune souvent, les classes en état de recevoir les enfants cet hiver. Là où les dégâts causés par la guerre nécessitent des travaux d'importance aux écoles qui ne peuvent être rouvertes, on a trouvé des locaux de remplacement où les élèves seront suffisamment abrités du froid et des intempéries.

A l'exception de la « zone avancée » du Boulonnais et du Calaisis, la question délicate de l'occupation des locaux scolaires par les troupes allemandes a été le plus souvent résolue au mieux des intérêts de l'école, grâce aux persistantes démarches du personnel de l'inspection primaire et à la bonne volonté de la Kommandantur intéressée.

Dans la zone maritime, les accommodements sont moins faciles en raison de l'importance des effectifs militaires. En maints endroits, on a trouvé des locaux de remplacement ; quand ils sont insuffisants on fait des classes de ½ temps. Là où ils font défaut, l'instituteur et l'institutrice font classe dans leur logement personnel et donnent aux enfants qui y viennent à tour de rôle du travail à faire à la maison.

Tous les établissements du second degré fonctionnent et je ne citerai que les quatre établissements de Calais (deux collèges et deux écoles primaires supérieures) qui reçoivent plus de mille étudiants (deux de Boulogne-sur-Mer), deux collèges, deux écoles pratiques, qui en comptent eux aussi plus de mille.

Partout, l'enseignement public est assuré depuis le 2 septembre, sauf à Calais où les établissements ne fonctionnent à plein que depuis le 1er novembre. A l'heure actuelle, pas une commune n'est privée d'enseignement.

Quant au personnel, nous ne comptons plus que 48 maîtres et maîtresses primaires non rentrés et 680 instituteurs disparus, prisonniers, démobilisés en zone libre ou restés sous les drapeaux. Tous sont suppléé par des auxiliaires de guerre.

Même situation dans l'enseignement du second degré, toutes proportions gardées.

En résumé, la situation déjà satisfaisante que j’avais l'honneur d'exposer en septembre dernier, s’est sensiblement améliorée encore. Nous avons pu, malgré les grandes difficultés de communications, en multipliant les centres d'examen, faire passer tous les certificats, brevets et baccalauréats pour la plus grande satisfaction des familles, tout en assurant ainsi la continuité des études et du recrutement des établissements d'enseignement. Enfin, les écoles normales primaires n'ayant pu rouvrir pour assurer la fin des études des élèves-maîtres de 2e et 3e années, ceux-ci ont été répartis dans les écoles primaires supérieures préparant au brevet supérieur. Une préparation par correspondance a été par ailleurs assurée pour ceux d'entre eux qui sont trop éloignés d'un centre de préparation. Les candidats reçus au concours de 1940 sont tous entrés en 2e B, soit au lycée de Saint-Omer, soit dans un collège pour y commencer leur préparation au baccalauréat. Dès que les internats pourront être réouverts, ils seront groupés en une section spéciale dans un même établissement.

J’ajoute que la présence des inspecteurs titulaires dans leurs circonscriptions respectives serait aujourd'hui des plus utiles. Trois inspecteurs primaires sont prisonniers en Allemagne, trois autres ont été nommés à titre provisoire hors la zone interdite. La présence de ces hommes jeunes et actifs, en libérant de leurs obligations actuelles cinq retraités âgés, serait du meilleur effet pour cimenter la reconstruction d'un service qui n'aura subi, j’ose le dire, que le minimum de désorganisation dans les conjonctures actuelles.

Questions économiques

Ravitaillement

La question du ravitaillement du département du Pas-de-Calais au cours des prochains mois d'hiver, ne laisse pas de me causer de vives inquiétudes et j’ai déjà eu l'honneur, dans de précédents rapports, notamment à propos de la nécessité des importations de beurre et de fromage en provenance de Normandie et de Bretagne, de signaler les nombreuses difficultés qui se présentent, surtout pour les régions minières.

Cet exposé n'a pas d'autre objet que de faire le point de la situation présente du département, pour qu’intervienne une solution qui me paraît souhaitable à plus d'un titre, c’est-à-dire l'intégration du Pas-de-Calais dans le plan national du ravitaillement.

Est-il nécessaire de rappeler que le Pas-de-Calais, département de 1.200.000 habitants, a toujours fourni à l'économie général un apport précieux, par :

La richesse de son sol et de son sous-sol ;

Ses industries houillères, agricole, maritime et diverse ;

Ses ports et ses stations balnéaires ;

l'essor de ses entreprises de constructions, notamment au lendemain de la Grande Guerre ;

Les réseaux tenus des voies de communication des chemins de fer et de navigation intérieure.

Par son activité générale enfin, le Pas-de-Calais contribuait de large manière à la prospérité nationale, mais, lui aussi comme tant d'autres continue de payer son lourd et douloureux tribut à la crise actuelle.

J’analyserai brièvement les causes des difficultés de l'heure :

Le bouleversement, la désorganisation totale provoquée à la suite des événements de 1940 ;

Les réquisitions antérieures des armées françaises et britanniques ;

Les réquisitions militaires actuelles sur certaines productions indispensables ;

Les déficiences de la production, tant agricole qu’industrielle :

La pénurie quasi-totale des stocks de matières premières ou de produits finis ;

l'arrêt de certaines usines ou leur mise en route à un rythme très réduit ;

Les achats importants des détachements ou des soldats allemands ;

Les « ponctions » au profit de la Belgique et du Nord ;

La diminution du cheptel ;

La production extrêmement réduite des produits de la ferme ;

Le ralentissement, pour ne pas dire la disparition des courants d'échanges commerciaux par suite de la situation spéciale du Pas-de-Calais (difficultés de franchissement de la Somme) ;

Le régime d'économie autarcique non encore levé dans tous les départements ;

Le régime des prix différents entre les départements voisins ;

l'insuffisance et la précarité des moyens de transports et de communication (automobiles, relations ferroviaires, postales, téléphoniques) en raison des entraves apportées par l'autorité occupante ;

Les attributions réduites de carburant ;

Les refus nombreux opposés aux demandes de laissez-passer ;

l'accaparement, les fraudes, l'incertitude générale…

Telles sont les difficultés auxquelles les services du ravitaillement se heurtent dans la tâche qu’ils accomplissent avec le souci d'atténuer, sinon de remédier, à une situation complexe et délicate.

Quelle est actuellement l'organisation du service du ravitaillement du Pas-de-Calais ?

Jusqu’à présent et en l'absence de l'intendant militaire, le service départemental du ravitaillement a été assuré par un personnel nullement préparé pour la tâche qui lui a été confiée sous la pression des nécessités immédiates. Ce personnel s’est adapté au mieux mais ses moyens d'intervention sont limités comme d'ailleurs son effectif :

Trois employés titulaires de la préfecture,

Quelques employés auxiliaires doivent remplir journellement une mission dont l'importance n'échappe pas.

J’ai heureusement un chef de bureau de la préfecture qui dirige le service. Il s’agit de M. Courtois qui fait preuve de qualités exceptionnelles et qui est un véritable chef, connaissant admirablement le Pas-de-Calais, sachant prendre toutes initiatives et ayant au plus haut degré conscience de son devoir.

La mise en vigueur des mesures de rationnement au 28 octobre dernier a déclenché un vaste système d'organisation de l'économie générale du département, du contrôle de la production, de la distribution et de la consommation qui rend éminemment souhaitable la nomination d'un intendant militaire, que la règlementation a d'ailleurs prévu comme directeur du service du ravitaillement.

A cet égard, vous m’avez signalé que la nomination d'un intendant départemental était imminente et je vous remercie des diligences qu’il vous sera possible de faire pour que l'arrivée de cet intendant dans le Pas-de-Calais, puisse avoir lieu dans les plus bref délais.

Cette nomination apportera certes une aide précieuse à l'organisation définitive du service du ravitaillement, mais elle ne doit pas être considérée comme une mesure suffisante. La question de l'intégration de l'économie du Pas-de-Calais dans l'économie générale se pose de plus en plus et doit être résolue dans le plus bref délai.

Les raisons d'ordre pratique n'échapperont pas, pas plus que celle d'ordre psychologique.

Il est indispensable que les mesures du rationnement, différente on le sait dans la région du Nord, y soient désormais appliquées de la même manière et suivant les mêmes modalités que dans le reste de la France.

Les [périodes] de rationnement doivent coïncider, la contexture des feuilles de consommation doit être identique et les rations doivent être fixées aux même taux de manière à supprimer tous les inconvénients qui me sont signalés journellement à propos de l'application des mesures de rationnement. C’est ainsi que certaines catégories de travailleurs viennent seulement d'être définies par l'autorité occupante, et qui s’opposent par plus d'un côté aux instructions générales du ministère du Ravitaillement.

Les raisons psychologiques apparaissent d'elles-mêmes. Les populations du Pas-de-Calais comprennent mal qu’elles soient exceptées du régime commun. Le comité départemental que j’ai constitué et qui comprend des personnalités de toutes les branches de l'activité économique, industrielle, commerciale et agricole, très compréhensives et d'un sens avisé, appuie fortement le souhait que je formule.

Enfin, ‘j’indiquerai que, du fait de son isolement, le Pas-de-Calais a vécu généralement sur ses propres ressources depuis les événements de mai dernier. Peu d'exportations, des importations nulles. Les courants d'échanges commerciaux ne sont pas rétablis avec le reste du territoire. Quelques rares laissez-passer, à la suite d'interventions combien pressantes de ma part, ont été ces jours derniers accordés à quelques commerçants pour s’approvisionner en dehors du Pas-de-Calais. Les ressources locales s’épuisent.

IL EST URGENT QUE DES SOLUTIONS INTERVIENNENT.

Depuis mon arrivée dans le département, j’ai fait méthodiquement des efforts persévérants, tenaces, pour l'organisation du ravitaillement des populations du Pas-de-Calais, et sans cesse ont été répétées mes démarches auprès de la Feldkommandantur ou Oberfeldkommandantur, mais des résultats plus tangibles n'apparaîtront, à mon sens, que si le département entre rapidement dans le cycle de l'économie nationale.

Il est nécessaire en effet que le Pas-de-Calais bénéficie des ressources nationales au même titre que les autres départements, comme il est nécessaire que ses produits excédents soient expédiés sur d'autres départements.

Communications

Service postal

Depuis le 14 octobre, les trains allemands circulant sur la ligne Arras-Étaples ont pu être utilisés. La direction régionale à Lille doit intervenir en vue d'obtenir d'autres trains allemands sur la section Hazebrouck-Calais et Calais-Étaples.

Si satisfaction était obtenue, une amélioration des relations postales des bureaux de la région côtière pourrait être réalisée par suite de la suppression des services automobiles qui éprouvent de grandes difficultés de circulation dans ce secteur.

d'autre part, des relais cyclistes seraient supprimés, certains autres seraient diminués. Ce résultat est à considérer en raison de la presqu’impossibilité pour les agents des postes de se procurer des pièces de rechange et en particulier les pneus qui sont nécessaire à l'entretien de leur bicyclette. Cette situation deviendra de plus en plus critique si dans un proche avenir une solution n'a pu intervenir.

Par suite de la mise en marche d'un train direct Paris-Lille et retour, les relations avec le Nord et la Somme, ainsi que celles avec Paris et ses au-delà sont devenus plus normales, mais les retards des trains, fréquents et parfois importants, se répercutent sur les délais d'acheminement.

Service télégraphique

Toujours suspendu tant au point de vue officiel qu’au point de vue privé.

Service téléphonique

Dans un précédent rapport, je signalais que sur 803 réseaux que comporte le Pas-de-Calais, 8 seulement étaient réouverts, savoir : Arras, Bapaume, Berck-Plage, Béthune, Bruay-en-Artois, Lens, Montreuil-sur-Mer et Saint-Pol-sur-Ternoise. Depuis le 23 septembre 1940, le service téléphonique est à nouveau suspendu à Montreuil-sur-Mer et à Berck-Plage.

Par lettre du 26 octobre 1940 la direction régionale des postes à Lille a fait connaître à la direction d'Arras que la Feld-Nachrichten-kommandantur 24 venait d'autoriser le rétablissement du trafic téléphonique à l'intérieur des groupements sous certaines réserves.

En premier lieu la reprise du trafic demeure interdite dans les groupements de Boulogne-sur-Mer, Berck-Plage, Calais, Étaples, Guînes-en-Calaisis, Montreuil-sur-Mer et Paris-Plage. Cette interdiction s’étend aussi au groupement d'Hesdin. En effet le 9 octobre, l'Ortskommandantur de cette ville s’opposait par écrit à la reprise du service. Par ailleurs, le 1er novembre courant, un représentant de la Feld-Nachrichten-kommandantur 24 mettait la receveuse du bureau considéré dans l'obligation d'évacuer immédiatement la salle du téléphone. En second lieu, pour les autres groupements, l'autorisation est subordonnée, pour chaque localité, à l'accord de la Feld-Nachrichten-kommandantur 24.

En conséquence, les mesures suivantes ont été adoptées.

Dès que le trafic téléphonique est prêt à être établi dans une localité, c’est-à-dire que l'installation intérieure a été reconnue en état de fonctionner, la direction régionale des postes de Lille en est informée et provoque alors l'autorisation de la Feld-Nachrichten-kommandantur 24.

A ce jour, la reprise du service téléphonique est effective dans les 22 réseaux énumérés ci-après : Allouagne, Anvin, Arras, Auchel, Bapaume, Béthune, Bruay-en-Artois, Calonne-Ricouart, Cambrin, Hénin-Liétard, Houdain, Isbergues, Lapugnoy, Lens, Lestrem, Ligny-Saint-Flochel, Lillers, Marles-les-Mines, Nœux-les-Mines, Pernes-en-Artois, Richebourg l'Avoué, Saint-Pol-sur-Ternoise.

Toutefois, trois seulement de ces bureaux participent au service téléphonique interurbain de groupe, ce sont : Anvin, Ligny-Saint-Flochel et Pernes-en-Artois.

La mesure sera étendue aux autres bureaux précités dès la réfection des circuits de raccordement.

Enfin des autorisations sont attendues concernant la réouverture des bureaux de : Heuchin, Lapugnoy et Liévin.

Les difficultés signalées sans mon précédent rapport au sujet du rétablissement des circuits télégraphiques et téléphoniques ne sont pas aplanies. l'outillage, le matériel et les moyens de transport font toujours défaut. l'essence qui est allouée pour les voitures du service technique ne couvre qu’une partie des besoins, notamment à Béthune.

Jusqu’à ce jour le rétablissement de certaines lignes a pu être effectué au moyen de fils récupérés sur les artères détruites ou endommagées mais cette récupération ne peut se poursuivre, le fil restant étant inutilisable.

Personnel. De nombreux agents n'ont pas encore rejoint leur poste en raison de l'interdiction de franchir la ligne Somme-Aisne. A défaut d'une rentrée générale de tout le personnel, il serait nécessaire qu’un certain nombre fussent remis au plus tôt à la disposition du directeur ; le bon fonctionnement des services e peut être assuré qu’à cette condition.

Locaux de service. La remise en état des locaux endommagés se poursuit. Quelques bureaux continuent à être occupés par les autorités allemandes.

Chemin de fer

Depuis mon dernier rapport du 30 septembre dernier la reprise de l'augmentation des transports ferroviaires a continué à un rythme accéléré. Toutes les lignes sont parcourues par des trains de voyageurs. 3 relations directes Paris-Lille sont rétablies dont une par Douai-Arras, une par Lens-Arras et la troisième par Douai-Cambrai. La SNCF compte au 15 novembre améliorer encore ces relations à la faveur de la reprise par ses services de la plus grande partie des lignes intéressant le département. Toutes les gares sont maintenant ouvertes au service commerciale et le trafic des denrées va s’augmentant de jour en jour.

Les chiffres de chargement dans le cinquième arrondissement de l'exploitation en septembre et octobre sont significatifs :

Pommes de terre : 2.708 tonnes contre 201 tonnes. Autres denrées : 7.015 tonnes contre 670 tonnes.

On relève une progression dans le tonnage des houilles transportées : 1.484.000 tonne en octobre contre 1.057.000 tonnes en septembre et spécialement pour le bassin minéralogique d'Arras 1.035.000 tonnes contre 703.000 tonnes.

La SNCF expédie actuellement de 70 à 76 trains de houille par jour.

Ponts et chaussées

1. Situation. Actuellement l'effectif du personnel comprend :

l'ingénieur en chef titulaire

4 ingénieurs d'arrondissement sur 5 en temps de paix

33 ingénieurs des TPE sur 44

28 adjoints techniques et agents de bureau sur 46

545 cantonniers et cantonniers chefs sur 870

2. Occupations. Aucun fait nouveau depuis mon rapport du 30 septembre.

3. Destructions. Deux ponts définitifs détériorés sont remis en état, l'un à Louez-les-Duisans (travail terminé), l'autre à Saint-Nicolas-lez-Arras (travail en cours).

Destructions. Comme on le sait, le Pas-de-Calais, continue d'être le théâtre d'opérations militaires. L'œuvre de destruction se poursuit sur la côte. Pour ne citer qu’un exemple, la ville de Boulogne-sur-Mer comptait au 1er novembre 800 immeubles complétement détruits et 2000 gravement endommagés.

A Calais, les chiffres sont encore plus élevés mais difficilement contrôlables du fait que la partie Nord de la ville est interdite à la population civile. Je me préoccupe de la question des baraquements qui pourraient abriter les populations sinistrées jusqu’ici recueillies par des parents ou amis ou dans des locaux aménagés par les municipalités.

Ainsi qu’on le verra plus loin, je suis en pourparlers avec le ministère de la production industrielle et du travail dont j’ai reçu récemment un délégué. Il est prévu d'une part l'installation de baraquements à proximité des villes qui ont le plus particulièrement souffert, d'autre part, le stockage du matériel nécessaire à l'édification dans certains centres éloignés de la côte, de baraques destinées à recevoir le cas échéant les populations qui pourraient être évacuées.

Je signalerai en outre, indépendamment des destructions de la guerre, les ravages causés récemment dans mon département par un violent cyclone.

Je me permets de rappeler ici la demande que j’ai faite au ministère de l'Intérieur tendant à l'octroi de secours d'urgence au titre des calamités publiques. Sans doute conviendrait-il aussi d'envisager la possibilité d'indemniser les collectivités et particuliers des dommages subis.

Industrie

1) Industries détruites ou gravement endommagées : aucune modification aux indications de mes rapports précédents.

2) Industries dont l'équipement est intact et pour lesquelles la main d'œuvre fait défaut : aucune modification.

3) Industries n'ayant pas encore repris leur activité : des modifications très sensibles se sont produites depuis l'envoi de mon dernier rapport par la remise en route d'industries très importantes, ainsi qu’il est indiqué dans le paragraphe suivant. A l'heure actuelle, on peut considérer que la plupart des industries du département sont remises en route ou sont sur le point de l'être, seules, les difficultés de transport gênant soit l'approvisionnement en matières premières, soit l'expédition des produits fabriqués, empêchent une reprise à peu près totale de l'activité économique.

4) Industries en activité : ainsi qu’il est signalé ci-dessus, les diverses branches d'industries ont repris, soit en totalité, soit partiellement, leur activité normale.

Mines. Les houillères travaillent actuellement 6 jours par semaine, mais la production reste très inférieure à celle qu’elle était en avril 1940 (88.000 tonnes par jour contre 120.000 tonnes), pour les raisons suivantes :

1) l'effectif du personnel du fond a fléchi, par suite des rapatriements d'ouvriers mosellans et du départ d'un certain nombre de mineurs étrangers en Allemagne.

2) La durée du travail au fond a été ramené de 8h45 à 7h45.

3) Le rendement individuel est sensiblement inférieur encore au rendement normale, d'environ 15%.

Néanmoins, les stocks (charbons, coke et agglomérés) sont en augmentation constante et dépassent 1.600.000 tonnes. Le grave problème est en effet toujours celui des expéditions qui se heurtent à des difficultés considérables par suite de la pénurie du matériel roulant. La voie d'eau n'a pu reprendre ses expéditions que fin octobre et ne constitue encore qu’un appoint très faible.

Par suite des priorités de transport réservées à la Wehrmacht et à la Reichsbahn, de même qu’à la métallurgie de l'Est, les possibilités de transport pour l'économie française ne représentent qu’une faible fraction des besoins. Cette situation ne paraît pas en voie d'amélioration au début de novembre.

Autres industries. Depuis l'envoi de mon dernier rapport, je crois devoir signaler la reprise produite dans les catégories ci-après :

Papeterie. Papeteries Béghin à Corbehem. Confection de vêtements (divers ateliers). Industries textiles : cette reprise est très gênée par le contingent de matières premières (30%) accordé aux usines.

Métallurgie et travail des métaux. La plupart des affaires importantes se sont remise en marche mais avec effectif réduit.

Fabrique de produits céramiques et verrerie. Toutes ces usines sont soit en route, soit sur le point de reprendre leur activité.

Agriculture

1. Fermes abandonnées. Il reste très peu d'exploitants agricoles qui ne soient pas rentrés dans leurs fermes.

2. Travaux agricoles et rendements des cultures.

Blé. A) Récolte 1939-1945. La récolte de blé est extrêmement déficitaire. Le grain a souffert presque partout de l'échaudage, de sorte que non seulement le rendement est anormalement faible, mais le taux d'extraction ne pourra guère dépasser 78% au lieu des 82% prévus. La production du département, qui a dû faire face aux prélèvements de l'armée allemande et de la Belgique, couvrira tout juste les besoins du Pas-de-Calais, à condition que les exportations soient arrêtées et que cesse l'emploi clandestin de blé pour l'alimentation du bétail, des porcs en particulier, auxquels manquent les céréales exotiques et les issues.

B) Campagne 1940-1941. Les semailles sont exécutées dans les terres d'argile à silex et sur les plateaux élevés du Boulonnais. Ailleurs, dans les régions de culture très intensives, les semis se poursuivront très activement à partir du 10 novembre. Dans l'Artois, ils ne seront pas retardés par les arrachages des betteraves qui n'occupent guère plus d'un cinquième de la surface habituelle.

Avoine. l'avoine a souffert de la sécheresse, les rendements sont moyens et les disponibilités pour la vente, réduites au chiffre normal de 327.000 quintaux. Conformément aux instructions du commandant militaire en Belgique et dans le Nord de la France, l'Oberfeldkommandantur 670, à Lille, a imposé au département du Pas-de-Calais un contingent de 500.000 quintaux d'avoine à fournir jusqu’au 15 janvier 1941. Cette quantité dépasse de beaucoup les excédents d'une année normale et à fortiori d'une année de guerre où toutes les importations d'aliments du bétail sont arrêtées. Pour réunir les contingents fixés, l'Oberfeldkommandantur 670 a décidé de limiter les rations journalières des chevaux à 4 kg pour les chevaux d'agriculture et à 5 kg pour ceux de l'industrie et du commerce. La ration de 4 kg est, de l'avis général des cultivateurs, tout à fait insuffisante pour le cheval Boulonnais, dont le poids est élevé et auquel on demande partout un travail pénible et soutenu. Si les 500.000 quintaux sont effectivement réquisitionnés, nos chevaux seront incapables de fournir le travail qu’on doit exiger d'eux et, d'autres part, les autres animaux, consommateurs forcés d'avoine, en l'absence de tourteaux et de céréales exotiques, ne fourniront pas les quantités normales de lait, de beurre, de viande, etc.

Pommes de terre. La récolte a été plutôt faible. Elle dépasse cependant les besoins du département. La presque totalité de la récolte est déjà écoulée. Les prix de la taxe ont été respectés.

Betteraves sucrières. Les arrachages sont en cours et se poursuivent rapidement. Les livraisons en gare, commencée du 10 au 15 octobre, sont excessivement ralenties par l'insuffisance des wagons tombereaux mis à la disposition des planteurs et par le refus des fabricants de sucre de constituer des dépôts à proximité des gares. Les rendements atteindront facilement les prévisions. La production de racines pourra atteindre 750.000 tonnes, qui fourniront environ 100.000 tonnes de sucre, contre 110.000 tonnes de sucre en année normale.

Cheptel vif. Un recensement général du bétail a été fait le 3 septembre 1940. Il a donné lieu aux observations suivantes :

Chevaux : le nombre de chevaux de trois ans et au-dessus est inférieur de 8.036 unités à l'effectif enregistré en décembre 1938, c’est-à-dire en temps normal.

Bovins : le nombre de vache laitière est aussi moins élevé. Il y en a 10.000 de moins qu’en 1938 et en 1939. Les bœufs sont en très forte diminution. Seules les catégories des élèves accusent un effectif plus élevé : 135.563 contre 113.117 en novembre 1938, soit une augmentation de 22.456 têtes.

Ovins : les ovins subissent une diminution de près de 40%. De 81.629 en novembre 1938, ils tombent à 49.700.

Porcins : leur nombre est peu modifié.

En somme, le département qui ne se suffit pas à lui-même en matière de viande de boucherie et qui doit annuellement introduire 25.000 têtes de bétail maigre, se trouve de plus en plus déficitaire. Il se trouve ainsi dans l'impossibilité d'exporter aucune viande.

Alimentation du bétail. l'alimentation correcte des animaux domestiques va devenir extrêmement difficile. Les chiffres suivants, précisant l'importance des importations, en donneront une idée : on importait annuellement des autres départements et des colonies pour la seule nourriture du bétail :

Tourteaux : 350.000 quintaux

Céréales (orge, maïs, seigle) : 675.000 quintaux

Total : 1.025.000 quintaux. Soit plus d'un million de quintaux d'aliments concentrés.

Principales difficultés rencontrées par les agriculteurs.

Main d'œuvre. Le maintien en captivité de près de 10.000 agriculteurs, ouvriers agricoles et artisans ruraux provoque un déficit de main d'œuvre que les ouvriers provenant des usines en chômage ne sauraient combler. Il faudrait que des congés de captivité puissent être accordés aux agriculteurs prisonniers de guerre.

Carburants. Un gros effort a pu être fait à ce sujet. En octobre, il a été mis à la disposition de l'agriculture un contingent de carburants liquides susceptibles de couvrir près de 30 % des besoins, mais la répartition de ce carburant n'a pu s’effectuer sans rencontrer de sérieuses difficultés. l'arrondissement de Boulogne-sur-Mer et les communes côtières ont même reçu des cartes de pompage pour la totalité des besoins exprimés. En novembre, les contingents alloués couvriront une nouvelle tranche de 15%. Il importe essentiellement que l'essence et le gas-oil arrivent normalement aux pompes si l'on veut que les battages et les travaux de culture soient effectués à la cadence prévue.

Questions financières

Situation monétaire

La situation monétaire est redevenue normale dans l'ensemble du département. Tous les comptoirs de la Banque de France disposent d'un approvisionnement suffisant de billets en toutes coupures pour satisfaire à tous les besoins.

Le retrait des Reichsmark continue à s’effectuer régulièrement, les comptables du Trésor seuls ont remis, au 321 octobre dernier, aux caisses de la Banque de France, 6.249.886,5 RM, soit 124.997.730 francs.

L'intégralité des avances consenties par les autorités allemandes, au début de la période d'occupation, y compris l'avance de 500.000 RM, soit 10 millions de francs, faite directement à la ville de Lens, a été remboursée à la Reichskréditkasse à Lille.

Situation bancaire

Aucune amélioration n'a été constatée dans la situation bancaire depuis mon rapport du 30 septembre. Les bureaux de Lens de la Société générale et du Comptoir national d'escompte restent toujours fermés par suite de l'absence du personnel. Les directeurs des agences d'Arras seraient désireux d'obtenir l'autorisation de s’y rendre un ou deux jours par semaine, en automobile, avec quelques agents, pour maintenir le contact avec la clientèle. Ils sollicitent en conséquence la délivrance de laissez-passer pour leurs voitures.

Des capitaux disponibles importants ne paraissent pas, à l'heure actuelle, trouver à s’employer, les dépôts de fonds dans les banques continuent de grossir ainsi que les souscriptions aux bons à court terme.

Une amélioration de cette situation ne pourra être envisagée qu’après le rétablissement total des moyens de transports ferroviaires normaux.

Situation des services du Trésor

Depuis mon rapport du 30 septembre dernier, une partie des comptables et agents du Trésor, demeurés en dehors du département, ont pu réintégrer leur poste. En dehors des prisonniers, il ne reste plus à rentrer actuellement qu’une dizaine d'agents dont le retour serait très désirable.

Recouvrement. l'amélioration dans le recouvrement des impôts directs constatée au cours des mois d'août s’est poursuivie en septembre et octobre.

A la fin de ce dernier mois la situation se présentait comme suit :

Restes à recouvrer sur exercices antérieures à :

1937 : 2.519.103 francs

Restes à recouvrer sur exercices à :

1937 : 617.671 francs

1938 : 3.192.116 francs

1939 : 47.536.084 francs

Les recouvrements au titre de 1940 s’élevaient fin septembre à 103.895.408 francs, dont :

27.138.743 francs sur rôles émis par l'administration des contributions directes,

38.045.995 francs au titre de la contribution nationale de 2 et 5%,

27.634.397 francs au titre de la contribution nationale de 15%,

11.076.273 francs au titre de l'impôt cédulaire sur les salaires.

L'émission des rôles de 1940 s’est poursuivie au cours de ces derniers mois, seuls ceux concernant les villes recensées de Boulogne-sur-Mer, Calais, Le Touquet et les communes Équihen-Plage et Outreau restant à émettre.

En raison des dégâts causés par faits de guerre dans les villes de Calais et de Boulogne-sur-Mer, la distribution des avertissements ne se fera qu’après examen de la situation de chaque contribuable par le percepteur et par le contrôleur des contributions directes en vue du dégrèvement d'office des impôts se rapportant à des immeubles sinistrés.

Le tableau ci-après donne la comparaison des recettes centralisées à la Trésorerie générale au cours des mois de septembre et octobre 1940 avec celles des mois de l'année 1939.

Recettes centralisées à la Trésorerie générale au cours des mois de septembre et octobre 1940 avec celles des mois de l'année 1939

Émission de bons du Trésor. l'émission des bons du Trésor et de la Défense nationale s’est poursuivie d'une façon satisfaisante au cours des derniers mois écoulés. Le tableau ci-après donne la comparaison avec la période correspondante de l'année précédente

Émission de bons du Trésor

Caisse d'épargne. Toutes les caisses d'épargne du département, y compris celle de Bapaume, ont repris leurs opérations dans qu’une limitation soit apportée à leur activité normale. Ci-dessous la comparaison des résultats obtenus au cours des mois de septembre et octobre 1940 avec ceux des mêmes mois de l'année précédente :

Opérations des Caisses d'épargne

Excédent de retrait au cours de ces deux mois en 1939 : 6.015.882

Excédent de retrait au cours de ces deux mois en 1940 : 2.408.886

Questions sociales

Assurances sociales

Toutes les caisses d'assurances sociales ayant des adhérents dans le Pas-de-Calais, fonctionnent, à l'heure actuelle, presque normalement en ce qui concerne les versements des prestations.

Les difficultés que je signalais, au sujet des pensions vieillesse, ont été surmontées dans une grande mesure et l'échéance de décembre pourra être réglée dans les conditions habituelles. Dans un avenir prochain on pourra être fixé sur les rentrée des cotisations.

Main d'œuvre et chômage

Le service de l'Inspection du Travail a pris en main l'organisation des services de placement et le contrôle des fonds de chômage. Le nombre des sans travail qui, lors de mon dernier rapport s’élevait à 20.000 environs, n'est plus aujourd'hui que de 16.907 (dont 8.348 hommes et 8.559 femmes).

Le programme général que j’ai soumis à l'administration supérieure représente près de 100 millions de travaux.

Déjà des projets se montant au total à 14.439.400 francs et permettant l'emploi de 1.961 ouvriers ont reçu l'approbation de M. le ministre de la Production industrielle et du Travail. Certains travaux sont commencés, les autres vont être incessamment mis en œuvre.

Tenant compte du fait que certains des chantiers prévus sont en dehors de toute zone industrielle et qu’il est particulièrement important à redonner à la jeunesse du travail, l'Inspection du travail à, d'accord avec moi, procédé à une enquête sur le nombre de chômeurs célibataires de 16 à 30 ans qui pourraient être utilement enrôlés en compagnie de travailleurs susceptibles d'effectuer des déplacements. Ce nombre s’élève à 880. Cette question mérite de retenir l'attention. Il ne s’agit pas seulement de recruter de la main d'œuvre mais aussi des cadres aptes à diriger les jeunes gens, à susciter chez eux l'amour du travail et à créer une ambiance favorable au développement de l'esprit de solidarité.

Santé publique

Le personnel du service départemental d'hygiène est au complet sauf le docteur Salmon, inspecteur adjoint et le docteur Rémy, médecin spécialisé, toujours prisonniers en Allemagne.

314 médecins assurent actuellement les soins à la population civile, soit 23 médecins de plus qu’à la fin du mois de septembre. Au début de l'hiver dernier, le département ne comptait que 180 médecins.

190 pharmacies sont ouvertes, soit 5 de plus que le mois dernier. Leur approvisionnement est toujours difficile ; ce sont les objets de pansements qui font le plus défaut.

L'état sanitaire continue d'être satisfaisant ; les cas de maladies saisonnières comme la grippe et les bronchites ne paraissent pas très nombreux.

Au point de vue de maladies transmissibles, aucune épidémie. Les cas de scarlatine (48), de diphtérie (45) sont sporadiques ; cependant dans la région des mines la diphtérie a tendance à se multiplier. Les vaccinations sont en cours.

Service de désinfection. l'activité des agents des postes secondaires se trouvera prochainement limitée si des pneumatiques de rechange pour bicyclette ne peuvent être fournis.

Le réapprovisionnement en désinfectants courants se fait plus facilement.

Hospitalisation.

Lens. Situation améliorée. Les vieillards de l'hospice ont été répartis dans différents hospices du département ; les salles qu’ils occupaient servent à l'hospitalisation des malades et blessés (150 lits).

Arras. La réparation des locaux est presque terminée, l'hôpital dispose de 200 lits, 50 lits pourraient être encore aménagés si les matériaux nécessaires à la réfection d'une partie des bâtiments pouvaient être libérés de la réquisition. Des démarches sont en cours à cet effet.

Calais. La remise en état des salles plus ou moins détruites par un bombardement est en voie d'achèvement. Les malades et blessés vont pouvoir quitter les caves où on avait dû les placer. Des facilités ont été accordées par l'autorité allemande pour pouvoir évacuer vers Saint-Omer les malades ou blessés transportables.

Montreuil. A été occupé, les malades transportés à la chartreuse de Neuville-sous-Montreuil où ils ont des conditions juste suffisantes. Maison maternelle de Saint-Pol-sur-Ternoise. Est occupée par l'autorité allemande qui a mis à sa disposition la partie de l'hospice qui donne abri aux blessés militaires français. La maison maternelle reprendra son fonctionnement régulier dès la fin de ce mois.

Sanatorium d'Helfaut. Installé maintenant dans un pavillon du sanatorium de Felleries-Lyessies (Nord). Les 200 lits ainsi occupés par les tuberculeux du Pas-de-Calais sont insuffisants pour satisfaire aux besoins du département.

Besoins de pansements. Le manque de gaze et de matériel de pansements se fait durement sentir. Certains hôpitaux comme celui d'Hénin-Liétard vont être obligés d'user de moyens de fortune pour faire les pansements ; ils devront s’interdire de faire certaines opérations qui nécessitent une rigoureuse asepsie.

Protection de l'enfance La distribution de lait frais aux enfants du 1er âge se fait avec plus de régularité. Mais les bêtes étant actuellement nourries avec la pulpe de betterave et de nombreux enfants digérant mal le lait ainsi produit, on doit s’attendre à une demande plus importante de lait concentré ou de farines alimentaires pour enfants. Il faudrait prévoir, dans la mesure du possible, un approvisionnement beaucoup plus abondant que celui accordé jusqu’ici. Quelques crèches ont repris leur fonctionnement.

Les consultations de nourrissons reprennent petit à petit mais comme toujours en cette saison, leur activité se ralentit. Avec l'aide des assistantes sociales, secondées par les infirmières bénévoles de la Croix Rouge, des visites à domicile des nourrissons sont en voie d'organisation.

Lutte antituberculeuse Aux dispensaires de Desvres et Hesdin déjà occupés par les Allemands se sont ajoutés ceux d'Audruicq, Arques et Montreuil. Le dispensaire de Calais, en partie détruit, est installé provisoirement dans un autre local. Les travaux d'aménagement de celui d'Arras ne sont pas encore achevés. 15 dispensaires sur 23 ont jusqu’ici fonctionné régulièrement. La remise en état des appareils de radio est en cours.

Lutte antivénérienne Se poursuit activement en accord avec l'autorité sanitaire allemande. J’ai cru devoir donner tous ordres utiles pour que soit créé sans tarder un dispensaire antivénérien à Béthune où la prostitution sévit dangereusement.

Assistance et famille

Dans un rapport précédent j’ai donné un aperçu du fonctionnement des différents services d'assistance dans mon département. Je me permettrais d'attirer l'attention sur les personnes qui ne peuvent prétendre aux secours d'assistance proprement dit, ni aux allocations servies aux chômeurs ou aux réfugiés.

Secours aux habitants privés de ressources

De nombreuses personnes, privées de ressources par suite des événements, s’adressent aux pouvoirs publics pour être aidées. Ce sont des industriels, des commerçants, des artisans, sans occupation, des rentiers, des pensionnés, qui ne jouissent pas actuellement de leurs revenus, des veuves, des femmes d'internés, des victimes militaires ou civiles de la guerre, sans pension, des ouvriers sans travail et ne remplissant pas les conditions requises pour recevoir les allocations chômages.

J’ai conseillé aux maires de secourir ces personnes nécessiteuses au moyen d'allocations calquées sur celles du chômage et prélevées sur les fonds communaux. De nombreuses municipalités ont répondu à mon désir ; mais elles font observer que cette nouvelle charge pèse lourdement, en particulier dans les villes, sur les finances locales. Elles sollicitent l'aide de l'État.

Je serais particulièrement obligé à l'administration supérieure d'examiner cette importante question et de me faire connaître dans quelle mesure l'État pourrait participer à ces dépenses nouvelles, nées de la guerre.

Secours national. Comité départemental de secours aux populations civiles. Le comité, crée dans le département conformément aux instructions de M. le Ministre, secrétaire d'État à l'Intérieur du 27 septembre 1940, a tenu sa première réunion le 23 octobre. Les grandes lignes du plan d'action ont été tracées. Les secours s’organisent.

Je m’attache personnellement à cette tâche importante et urgente, en accord avec le délégué départemental au secours national. En ce qui touche les sinistrés, je crois devoir appeler l'attention sur la nécessité de hâter la fourniture des baraquements que j’ai demandés à M. le ministre de la Production industrielle le 3 octobre. Un premier envoi vient de m’être annoncé, à destination des communes de Courrières et d'Oignies.

Carte nationale de priorité. Les facilités accordées par cette nouvelle disposition aux familles nombreuse ont été bien accueillies par l'ensemble de la population. Une disposition identique prise en faveur des personnes âgées seules éviterait à celles-ci des attentes pénibles dans les magasins de ravitaillement.

Assistance à la famille. Le décret du 11 octobre 1940 (JO du 13 octobre 1940) a fixé les modalités d'attribution des allocations d'assistance à la famille. Or, du fait de l'abrogation, à dater du 1er avril 1940, des lois des 14 juillet 1913 sur l'assistance aux familles nombreuses et du décret du 18 avril 1939, sur l'encouragement national aux familles nombreuses, qui privait de très nombreuses familles du bénéfice des allocations qu’elles percevaient jusqu’alors, mon prédécesseur avait estimé devoir, sans attendre la parution du règlement d'administration publique annoncé, mettre immédiatement en vigueur les dispositions du chapitre IV du décret du 29 juillet 1939 sur l'assistance à la famille.

Toutes instructions nécessaires ont été données aux maires dès le 18 mars 1940.

Les mesures prises, qui répondent aux prescriptions du 11 octobre, ont permis d'éviter toute interruption dans l'attribution des allocations.

Mutilé, anciens combattants de la guerre 1914-1918. Les services de l'office départemental des mutilés, combattants, victimes de la guerre et pupilles de la nation continuent à fonctionner normalement. L'office a fait connaître par des communiqués à la presse les diverses dispositions prises par M. le secrétaire général des anciens combattants en faveur des victimes de la guerre 1914-1918 et 1939-1940. Les demandes de renseignements et d'aides adressées à l'office sont chaque jour plus nombreuses.

Les difficultés de communication rendent toujours impossible les réunions du conseil d'administration et des commissions, les décisions sont prises sur proposition d'une commission restreinte comprenant les représentants des deux groupements d'anciens combattants les plus importants du département (union nationale des combattants et union fédérale) après avis des correspondants locaux de l'office et des maires.

Une liaison est établie entre l'Office et la Croix-Rouge française et le Secours national pour l'aide à apporter aux prisonniers de guerre ressortissant de l'Office et à leurs familles.

Les relations de l'Office avec les diverses administrations permettent une solution rapide de toutes les questions relatives aux anciens combattants et aux victimes de la guerre.

Le fonctionnement de la section départementale des pensions s’est beaucoup amélioré et permet actuellement la liquidation.

Il faut plus que jamais, et tous doivent le comprendre, écarter toutes les causes de division pour s’unir autour de M. le Maréchal Pétain et de son Gouvernement dont l'œuvre magistrale, si généreuse et si bienfaisante s’impose si fortement à l'admiration et à la reconnaissance.

Le préfet

Signé : A. Bussière

30 décembre 1940

Arras, le 30 décembre 1940

Le préfet du Pas-de-Calais à Monsieur l'ambassadeur de France, délégué du gouvernement dans les territoires occupés.

En exécution des instructions de M. le ministre de l'Intérieur, rappelés par note du 22 octobre 1940 sous le timbre cabinet du ministre 60/SA-I, que vous avez bien voulu me transmettre sous référence n° 4.295, j’ai l'honneur de vous faire parvenir mon rapport sur la situation du département du Pas-de-Calais à seule fin que le Gouvernement soit mis non seulement au courant de l'état d'esprit public, mais également des conditions de la reprise de l'activité économique.

Si nous sommes obligés de constater que les difficultés découlent de la situation dans laquelle se trouve le département du Pas-de-Calais, toujours en zone interdite, par conséquent toujours quelque peu isolé de l'autre partie de la France, avec une zone côtière où la présence des troupes de combat complique obligatoirement les choses, je dois à la vérité de reconnaitre qu’il s’est produit, depuis la date de l'envoi de mon dernier rapport, c’est-à-dire le 20 novembre 1940, une très sensible amélioration due à une organisation plus rationnelle de l'administration allemande dans les différentes régions du département, dont les chefs, notamment ceux de la Feldkmmandantur et des Ortskommandantur, ont adopté des règles mieux coordonnées et plus précises.

Ces administrateurs, auprès desquels mes collaborateurs et moi, nous nous évertuons à apporter toutes suggestions susceptibles de faciliter les rapports qui existent entre eux et mes administrés et, sans que nous hésitions le cas échéant à formuler les protestations que provoquent de notre part certaines décisions, font preuve de la plus grande courtoisie et d'un très vif désir de nous entendre et d'adopter notre point de vue toutes les fois que c’est possible.

Mais évidemment, nous n'avons pas toujours gain de cause, car les ordres venant de plus haut doivent être exécutés à la lettre et sans délai. Je peux citer par exemple cette question aussi douloureuse des otages qui sont internés lorsque notamment des câbles téléphoniques ont été coupés dans certaines localités. Une vingtaine d'entre eux, la veille de Noël, ont été libérés et ont regagné Béthune où ils avaient été pris.

C’est ainsi également que plusieurs travailleurs, désignés dans la région minière parmi les évadés, parmi les démobilisés en situation irrégulière, parmi les prisonniers en congé de captivité, ont été renvoyé dans leurs foyers, à la suite de mes démarches.

C’est ainsi aussi que le général Niehoff, Oberfelkommandant, devant qui la cause des mineurs frappés comme sanction du paiement du montant de deux journées de salaire pour arrêt du travail pendant la journée du 11 novembre, cause plaidée par mon collègue Carles du Nord, par moi-même et surtout avec tant de chaleur par M. Ingrand, représentant le ministre de l'Intérieur à la délégation générale, a dispensé les mineurs, par une décision qui a fait un très gros effet dans toute la région minière, d'effectuer le paiement des deux derniers tiers qui restaient à régler.

C'est ainsi, en outre, que nos interventions au sujet de la réalisation de certains travaux demandés, à notre sens inconsidérément, par des formations militaires, ont été accepté (exemple : l'électrification du hameau de Saint-Cécile-Plage, près de Camiers, travaux qui représentaient une dépense très élevée).

Il est certain que nous n'avons pas toujours le succès que nous escomptons ; il est certain aussi que de nombreuses difficultés subsistent, mais encore une fois, il y a depuis un mois une amélioration certaine dont je souhaite la continuation.

Vous verrez dans l'exposé qui va suivre, que tout est loin d'être parfait… vous verrez aussi que la question des laissez-passer délivrés au compte-gouttes et après de longues attentes est loin d'être résolue et vous voudrez bien vous rendre compte au surplus des inconvénients extrêmement graves au point de vue du ravitaillement général qui résultent de ce fait que le département du Pas-de-Calais, comme le département du Nord, n'est pas encore intégré à l'économie française.

État d'esprit public

Pour ce qui est de l'état d'esprit des populations, il s’est sans doute modifié dans le sens favorable. Le prestige de M. la Maréchal Pétain s’impose de plus en plus dans nos régions. Les différents actes de son Gouvernement dans tous les compartiments, les initiatives prises pour secourir les malheureux, les sinistrés, les réfugiés, pour faire démarrer les travaux de déblaiement et de reconstruction, pour encourager le commerce l'industrie, pour rendre à la famille et en particulier à la famille paysanne la place à laquelle celle-ci peut légitimement prétendre, tout cet ensemble développe de plus en plus la confiance de nos populations envers le Grand Soldat, l'éminent Chef d'État qui, avec ses collaborateurs rénovera la France meurtrie.

Grâce à la nouvelle loi municipale qui établit une juste distinction entre les communes rurales et urbaines, les maires que nous nommerons ou que nous proposerons à la nomination de M. le ministre de l'Intérieur, dégagés de contingences qui paralysaient très souvent leurs efforts, deviendront des administrations dans toute l'acception du mot et l'activité déployée selon cette nouvelle formule sera particulièrement profitable à l'intérêt général.

Il est indéniable que la nouvelle législation retient l'intérêt de tous ; les populations se sentent gouvernées et ont foi dans l'avenir.

Un fait qui prouve bien ce que j’avance est l'expression de la vérité : c’est le succès remporté dans ce département, cependant si éprouvé, par la campagne du secours d'hiver. Nous n'avons pas encore tous les résultats, mais nous pouvons dès maintenant envisager que nous arriverons à une souscription qui atteindra le million, et je ne tiens pas compte des quantités appréciables d'articles de lingerie, de vêtements qui ont été versés au Secours national.

Une très forte émulation s’est produite, c’est un hommage à M. le Maréchal Pétain qui est originaire de notre département, hommage fait d'admiration sans limite et de reconnaissance infinie au Chef de l'État.

J’ai eu l'occasion ces derniers jours de réunir à titre privé, près de quarante dirigeants des anciennes associations de combattants et de mutilés de 1914-19187 et quelques combattants de 1939-1940. Les uns et les autres reflétant très nettement la pensée de leurs camarades, veulent demeurer groupés autour de M. le Maréchal Pétain. Ils sont impatients, eux aussi, d'être en mesure de prononcer le serment du Légionnaire.

Activité des éléments extrémistes. Communisme. La propagande communiste continue de s’exercer clandestinement par des distributions de tracts et par l'apposition de papillons sur les murs et, pour la rendre plus sensible aux français qui réprouvent les idées communistes, certains de ces tracts et de ces papillons placent cette propagande sous le signe de l'Angleterre et de l'ex-général de Gaulle.

Les « de Gaullistes », il en existe sans aucun doute dans le département, ne se livrent à aucune manifestation répréhensible.

Les services de police ne restent pas inactifs. De nombreuses perquisitions ont été opérées depuis le début novembre chez certains militants communistes, plusieurs informations ont été ouvertes par les différents parquets du département.

Parmi les mesures qui ont été prescrites par M. le Ministre, secrétaire d'État à l'Intérieur, celle concernant l'interdiction de vendre, sans autorisation administrative, des appareils et papiers dits duplicateurs, est rigoureusement appliquée dans le Pas-de-Calais. Deux arrêtés préfectoraux ont été pris à cet effet, les 27 novembre et 17 décembre 1940.

Par contre, je n'ai pas cru devoir prendre un arrêté spécial pour interdire en public les auditions radiophoniques anglaises : celles-ci étant absolument prohibés et sous les peines les plus sévères par une ordonnance, en date du 27 juillet 1940, de M. le commandant militaire pour la Belgique et la Nord de la France.

Quant à l'internement administratif des militants communistes, mesure qui, sans aucun doute, serait particulièrement opportune, son application présenterait actuellement dans mon département certaines difficultés : la plupart des immeubles ou propriétés pouvant convenir sont occupés par les troupes allemandes et, d'autre part, la garde et la surveillance des internés serait peu aisée du fait de l'insuffisance des effectifs de gendarmerie et de l'absence de pelotons de gardes mobiles.

Cette question a d'ailleurs, à plusieurs reprises, fait l'objet d'un échange de vues avec les autorités d'occupation qui ont jusqu’à présent réservé leur décision.

Les services de police établissent néanmoins les listes des individus indésirables ; ceux-ci sont étroitement surveillés et chaque fois que des preuves suffisantes ont pu être réunies, ceux qui sont reconnus suspects sont déférés à l'autorité judiciaire.

Juifs et étrangers indésirables. Les autorités allemandes, dont la police procède à maintes investigations dans cet ordre d'idées, n'hésitent d'ailleurs pas à prendre les mesures qu’elles jugent utiles pour éloigner du département du Pas-de-Calais ceux ou celles qu’elles considèrent comme indésirables, surtout dans la région importante du département près de la zone côtière ou dans la zone côtière elle-même. Elles se sont préoccupés en général, plus spécialement ces semaines dernières, des étrangers et des juifs résidant dans ces zones, sans considération de nationalité et sans considération d'âge ou de sexe.

Les instructions ont été données directement par les Ortskommandantur locales. Je vous ai fait part de ces faits par rapport particulier.

Les étrangers et les juifs ont été désignés par les autorités allemandes elles-mêmes l'ordre de départ leur a été transmis d'une part par les maires, d'autre part par la gendarmerie française auxquels les listes ont été remises.

Les départs se sont effectués sans incidents. Néanmoins, dans l'arrondissement de Béthune, 36 personnes convoquées et leurs familles se sont enfuies. Par contre, des enfants juifs auraient été exemptés à l'heure du départ, à raison de leur âge et un certain nombre d'ouvriers mineurs qui s’étaient rendus au lieu de rassemblement avec leur famille ont été autorisés à regagner leur domicile sur l'ordre de l'Oberfelkommandantur.

Dès que j’ai eu connaissance de la décision des autorités d'occupation, je me suis imposé de faire toutes démarches utiles, mais il m’a été répondu que si certaines situations pouvaient être examinées, elles le seraient, étant entendu cependant que les ordres donnés devaient être exécutés.

Je ne peux fournir un chiffre exact des personnes qui ont était ainsi refoulées du territoire du Pas-de-Calais, car je ne connais pas le décisions d'exemptions prises au dernier moment. Voici cependant un chiffre approximatif pour les arrondissements de Saint-Pol, Béthune et d'Arras : 460 étrangers environ et une soixantaine de juifs.

Je crois savoir que toutes ces personnes ont été transférées dans le département de l'Aube.

J’ai à peine besoin d'ajouter que ces expulsions ont provoqué une vive émotion dans la région ; beaucoup de ces étrangers étant utilisés dans l'agriculture, ils sont difficilement remplaçables.

Autre cause d'émotion et d'appréhension, c’est celle qui se rapporte au recrutement des travailleurs « volontaires ». Je ne cite ces faits que pour mémoire, étant donné que je vous ai adressé à ce sujet un rapport circonstancié. [indication dans la marge : « non reçu par le DSA »]

Questions administratives

Je répète que la marche des services est toujours contrariée par l'absence de nombreux fonctionnaires qui n'obtiennent pas l'autorisation de prendre ou de reprendre possession de leurs postes.

Je répète aussi qu’il y aurait lieu de faire activer la réinstallation des lignes télégraphiques et téléphoniques entre Paris et les départements du Pas-de-Calais et du Nord. Les télégrammes officiels sont reçus à Amiens et acheminés postalement dans le Pas-de-Calais.

Toujours très compliquée aussi notre administration du fait des décisions des autorités allemandes n ce qui concerne l'application dans les départements du Nord et de Pas-de-Calais, de la législation française.

J’ai déjà eu l'occasion, notamment dans un rapport général du 30 septembre dernier et dans celui du 7 novembre (convention de La Haye du 18 octobre 1907 et convention d'Armistice), de faire connaître le point de vue des autorités occupantes sur le sujet. Aux termes de la communication de M. le Général Niehoff du 20 septembre 1940, les lois parues au Journal officiel ne pouvaient ente en vigueur dans le Pas-de-Calais, qu’après avis de l'Oberfeldkommandantur de Lille. Et effectivement, depuis cette date, les autorités allemandes m’ont notifié à plusieurs reprises la liste des lois qui pouvaient être exécutées sans restrictions et la liste de celles qui ne pouvaient être appliquées qu’avec des restrictions ou des additions.

Or, par lettre du 23 novembre, M ; le Général Niehoff m’a avisé que désormais nos lois pouvaient entre en vigueur dès leur publication, mais qu’il se réservait, dans le cas où de difficultés d'application se présenteraient, d'en empêcher l'exécution ou d'y apporter des tempéraments.

C’est ainsi que le 25 novembre, les 14 et 17 décembre, l'Oberfelkommandantur m’a adressé une liste de lois ou de décrets inapplicables dans son secteur ou ne pouvant être exécutés qu’avec certaines restrictions. Ces textes qui, pour la plupart visent le commerce, l'industrie ou le ravitaillement, feront l'objet d'une transmission spéciale.

Sans doute le nouveau point de vue des autorités occupantes permet-il de ne plus retarder pendant plusieurs semaine la mise en vigueur de toutes les lois en général ; mais elle comporte néanmoins cet inconvénient que ‘exécution d'une loi peut être suspendue peu après son entrée en application.

Aux difficultés rappelées ci-dessus s’ajoutent celles que rencontre la délivrance de laissez-passer pour les chefs de service qui, dans l'intérêt de la bonne marche de l'administration, devraient pouvoir, de temps à autres, se rendre à Paris, auprès des directeurs des différents ministères.

Ne serait-il pas possible que les administrations supérieures réclament ces laissez-passer à Paris même, comme cela a déjà été fait pour certains fonctionnaires, tels que l'ingénieur en chef des ponts-et-chaussées et le directeur des services agricoles ?

Administration municipale. Les difficultés que je vous ai signalées dans mon précédent rapport seront, je le pense, appelés à disparaître, pour une grande part, par l'application de la nouvelle loi sur la réorganisation des corps municipaux. Pour préparer mon travail, j’attends non seulement les instructions de M. le ministre, secrétaire d'État à l'Intérieur, mais encore je crois qu’il est prudent de savoir au préalable si cette loi sera admise par les autorités allemandes compétentes pour la Nord de la France.

Administration départementale. Je prépare en ce moment le budget pour 1941. J’ai eu l'honneur d'adresser tout récemment un rapport sur la question, tendant notamment à obtenir quelques précisions indispensables non seulement sur la valeur du centime dont il conviendra de tenir compte, mais encore sur les prévisions des parts qui seront alloués au Département sur le produit des fonds communs et des divers impôts d'État. Je serais très désireux d'avoir une réponse le plus tôt possible, et je ne le serais pas moins de connaître la décision de M. le ministre, secrétaire d'État à l'Intérieur sur les propositions que je lui ai présentées en vue de la composition de la Commission administrative.

Enseignement. Je n'ai aucun fait saillant à ajouter à mon précédent rapport. Toutes les écoles sont ouvertes normalement, les réparations aux bâtiments se poursuivent dans la mesure des possibilités locales, mais tous les enfants sont à l'abri. Le personnel est sensiblement le même qu’au début de novembre, quelques maîtres sont rentrés et ont repris leur poste, libérant leurs remplaçants auxiliaires. Je n'ai signalé que le décès de M. Évrard, inspecteur primaire honoraire, rappelé à l'activité, tué accidentellement sur la route par un camion de l'armée occupante, au cours d'une tournée d'inspection. l'inspecteur d'académie l'a remplacé par un jeune maître admissible au certificat d'aptitude à l'inspection primaire.

Questions économiques

Ravitaillement

Les mesures de rationnement. Les taux de rationnement établis sont les suivants en ce qui concerne le Nord et le Pas-de-Calais :

1) Consommateurs ordinaires

Pain : 300 grammes par jour

Viande : 360 grammes par semaine

Matières grasses : 100 grammes par semaine (dont 25 grammes d'huile)

Sucre : 900 grammes par mois.

Mélange de café et succédané : 300 grammes par mois

Fromage, pâtes alimentaires, savon : selon les possibilités du ravitaillement

2) Travailleurs

Pain : 300 grammes par jour + 150 grammes par jour

Viande : 360 grammes par semaine + 165 grammes par semaine

Matières grasses : 100 grammes par semaine + 100 grammes par semaine

Les autres denrées sont presque perçues au même taux que pour les consommateurs ordinaires.

3) Mineurs

Pain : 300 grammes + 150 grammes par jour

Viande : 360 grammes + 165 grammes par semaine

Matières grasses : 100 grammes + 100 grammes par semaine + 35 par jour de descente

Pour les autres denrées (sucre, fromage et pâtes), même taux que pour les consommateurs ordinaires.

Savon. Selon la possibilité du ravitaillement en attendant une réglementation prochaine.

4) Cultivateurs

Viande : 360 grammes par semaine pour les cultivateurs qui ne tuent pas pour leur propre consommation

Pain : 300 grammes + 50 grammes par jour

Huile : 100 grammes par mois (25 grammes par semaine).

Le contrôle de la répartition et de la consommation s’effectue régulièrement.

Les difficultés du ravitaillement. J’ai eu l'honneur de vous signaler dans de précédents rapports les difficultés auxquelles je me heurtais du point de vue économique et notamment à propos de la question du ravitaillement.

Ces difficultés s’aggravent de jour en jour.

Depuis le début de mai dernier, le Pas-de-Calais a vécu généralement sur ses ressources propres. Les ressources locales s’épuisent. Les insuffisances de la production, les réquisitions, les prélèvements opérés au profit du département du Nord et de la Belgique, d'autres causes que je vous énumérais précédemment, placent le Pas-de-Calais devant de redoutables éventualités.

La question de la viande, du beurre, des fromages, d'autres produits d'urgent nécessité est particulièrement préoccupante. Les courants d'échanges commerciaux avec le reste du territoire ne sont pas rétablis. Les restrictions à la circulation apportées par les autorités allemandes ont été aggravées par les décisions prises dernièrement par le ministère du Ravitaillement, décisions extrêmement graves car elles interdisent toute expédition de bétail, beurre, de fromages, etc. à destination du Nord et du Pas-de-Calais.

Déjà de nombreuses boucheries ont dû fermer leurs portes notamment dans la populeuse région des mines. Les tickets de consommation de matières grasses ne peuvent être satisfaits. Les pommes de terre même se raréfient. Le Pas-de-Calais qui était gros importateur de bétail (25.000 bêtes par an) et de beurre (8.000 tonnes) n'a plus aucune possibilité de s’approvisionner à l'extérieur du département, alors que son cheptel s’est considérablement appauvri. Les autorités d'occupation elles-mêmes se sont inquiétées d'une telle situation qui ne peut manquer, si les interdictions persistent, de créer les pires difficultés. Journellement je reçois de très vives réclamations à ce sujet, et notamment de la part de dirigeants des compagnies des mines qui se font l'écho du mécontentement des populations industrielles et minières.

Je ne saurais trop insister pour que les interdictions ministérielles soient immédiatement rapportées. Il est indispensable que le département du Pas-de-Calais rentre au plus vite dans le cycle de l'économie nationale. Il doit, en effet, bénéficier des ressources nationales au même titre que les autres départements comme il est nécessaire que ses produits excédentaires, qu’il s’agisse du charbon, du sucre, de la chicorée, soient expédiés sur d'autres départements.

Je vous communique ci-après la liste des produits absolument nécessaires au ravitaillement du département, et je me permets d'appeler votre haute attention sur l'urgence des décisions qui s’imposent dans l'intérêt du ravitaillement.

Besoins mensuels du département du Pas-de-Calais en produits alimentaires de premières nécessités :

Beurre : 400 tonnes

Fromage : 200

Chocolat : 300

Cacao : 15

Café : 300

Thé : 6

Tapioca : 60

Riz : 150

Maïs : 150

Agrumes et bananes : 240

Sel : 720

Pâtes alimentaires : 180

Savon : 200

Lait concentré : 400.000 boîtes

Vin : 36.000 hectos

Fruits secs : 200 tonnes

Fruits au sirop : 80.000 boîtes

Pain d'épices : 100 tonnes

Petits pois : 200.000 boîtes 4/4 et 250.000 boîtes 1/2

Haricots verts : 50.000 boîtes 4/4 et 40.000 boîtes ½

Tomates : 400.000 boîtes

Cassoulet : 20.000 boîtes 4/4 et 50.000 boîtes ½

Bœuf à la gelée : 150.000 boîtes

Corned beef : 75.000 boîtes

Pâtes : 250.000 boîtes

Sardines : 750.000 boîtes

Thon : 175.000 boîtes

Saumon : 50.000 boîtes 4/4 et 120.000 boîtes ½

Homards : 80.000 boîtes

Viande : 1.000 à 1.200 têtes de bétail

Tels sont les produits dont il est indispensable d'envisager l'expédition vers les centre de consommation du Pas-de-Calais.

B. Des organisations professionnelles

La mise en vigueur des mesures de rationnement a déclenché un vaste système d'organisation de l'économie générale du département, du contrôle de la production, de la distribution et de la consommation. A cet effet, ont été constitués, généralement dans le cadre régional, des groupements d'achat et de répartition pour les produits rationnés.

J’en énumère les principaux : Groupement d'achat et de répartition des denrées alimentaires, Groupement de répartition des farines, Comité de gestion des produits laitiers, Comité interdépartemental pour l'organisation de la production et de la répartition des pommes de terre. Groupements interdépartementaux du sucre, de la brasserie, de la chicorée, des légumes secs, Comité interdépartemental d'achat et de répartition de la viande.

De tels groupements sont nécessaires ; leur action, à condition bien entendu qu’elle s’orient et qu’elle s’exerce dans le sens des directives émanant du pouvoir central, apporte aux service du ravitaillement général une aide qui ne peut être méconnue.

Bien informés des questions qu’ils ont à traiter, composés de personnalités qualifiés, compétentes, généralement dévoués à leurs fonctions, les groupements dont il s’agit possèdent, de par leur propre constitution et par le fait même des textes qui les régissent, une autorité incontestable qui, si elle est mise au service de l'intérêt général, doit engendrer d'indéniables résultats.

Les groupements d'achats et de répartition des denrées alimentaires, des farines, le comité de gestion des produits laitiers ont été formés suivant les principes mêmes définis par la législation française. Ils se rattachent en droit et en fait aux organismes centraux dont ils dépendent.

Les autres organisations professionnelles à caractère régional (pommes de terre, viande, chicorée, etc.) sont nées à la suite de conversation, de conférence et dans la plupart des cas d'instructions impératives des autorités supérieures allemandes et si au cours des contacts qui ont eu lieu à ce sujet entre les autorités administratives et les autorités occupantes, mes collaborateurs n'ont ménagé ni leur volonté, ni leurs efforts, pour obtenir que la réglementation française fût en toutes occasions respectée et appliquée, il n'en reste pas moins vrai que la constitution de ces organisations régionales s’est faite à l'image des warenstelles malgré l'opposition que j’en ai personnellement manifestée à de nombreuses reprises.

Mais, ainsi que vous le savez, mon département se trouve dans une situation extrêmement délicate du fait de la position prise par les autorités supérieures d'occupation, au regard de nombreux textes législatifs français. Bon nombre de ces textes sont interdits dans le Pas-de-Calais et dans le Nord ; beaucoup d'autres ne sont applicables qu’avec de telles réserves, qu’avec de telles restrictions qu’on aboutit à la plus grande confusion… sinon à la suppression même du texte.

Dans ce domaine, il serait éminemment désirable que les négociations engagées sous la haute autorité des ministres de l'Agriculture et du Ravitaillement avec les autorités supérieures allemandes pour que la législation française soit invariablement appliquée dans la région du Nord aboutissent le plus tôt possible. Quoi qu’il en soit de ces réserves, les organisations professionnelles définies ci-dessus ont une vaste mission à remplir. l'importance de leur rôle est telle qu’elle conditionne toute l'économie elle-même et si l'on doit escompter des résultats certains de leur activité, il n'en demeure pas moins qu’on en pourrait enregistrer de plus substantiels encore si une liaison, une entente, une cohésion professionnelle, complète, régulière, méthodique et soutenue existait entre les différents organismes qui, pour l'instant et probablement parce que l'adaptation aux situations nouvelles n'a pas eu le temps de se préciser, agissent sans contacts nécessaires suffisants.

Il n'est pas questions, en effet, qui ne soient traitées par un groupement déterminé et qualifié et qui n'intéressent indirectement d'autres groupements s’occupant d'un domaine différent.

Il conviendrait, à mon sens, que dans le cadre départemental, les présidents de chaque organisme professionnel fussent obligatoirement tenus de se réunir pour étudier les questions ayant un trait commun, pour mesurer les conséquences de leurs règlements vis-à-vis des réglementations voisines, pour établir en définitive, les liaisons et les coordinations qui s’imposent.

Jusqu’à ce que la loi ait réglé le fonctionnement de cet organisme supérieur d'économie, la présidence pourrait en être exercée par le préfet assisté du directeur du Ravitaillement général. Il est utile, en effet, que des contacts étroits aient lieu entre les organisations elles-mêmes et l'administration préfectorale et entre les services du Ravitaillement général.

L'organisation du Ravitaillement doit être faite de cohésion, d'efforts communs dirigés dans le même sens, la synthèse des différents éléments qui en ont la charge est d'une indispensable nécessité.

Communications

Service postal

Depuis le 15 novembre, un nouveau train express ayant été rétabli entre Paris-Lille t vice-versa, les relations avec le Nord, la Somme, Paris et ses au-delà ont pu être sensiblement améliorées. d'autre part, les compagnies de chemins de fer d'intérêt local ayant remis en marche des trains de voyageurs, le service postal a pu utiliser, à partir du 1er décembre, ceux d'entre eux dont les horaires lui étaient favorables, ce qui a permis de supprimer quelques relais cyclistes, services qui deviennent de plus en plus précaires en raison du manque d'accessoires pour l'entretien des bicyclettes.

La demande que le directeur des PTT a formulée, par l'intermédiaire de la direction régionale de Lille, tendant à obtenir l'autorisation d'utiliser des trains allemands sur les sections Hazebrouck-Calais et Calais-Étaples n'a pas jusqu’à présent abouti.

En conséquence, l'administration des Postes a fait prolonger à Calais le service automobile Saint-Omer-Audruicq afin de rendre plus normale la desserte de cette région difficilement accessible.

Service télégraphique

Aucune liaison électrique ne fonctionne dans le département. Les télégrammes relatifs aux naissances, décès et maladies ainsi que les télégrammes officiels sont néanmoins admis. Ces correspondances sont acheminées par poste sur le central téléphonique de Paris et inversement.

Service téléphonique

En date du 21 novembre 1940, der Militärbefehkshaber in Belgien und Nordfranckriech a fait connaître les conditions de reprise du trafic téléphonique interurbain à l'intérieur du Nord de la France.

1) Trafic de groupe. Aucune ligne ne peut être exploitée au-delà des limites de chaque groupe sauf autorisation spéciale.

2) Trafic interurbain. Les groupes de Dunkerque, Bergues, Calais, Guînes, Boulogne-sur-Mer, Étaples et Montreuil-sur-Mer ne participent pas au trafic interurbain.

Les abonnés des autres groupes appelés à bénéficier de cette mesure seront nommément désignés.

l'Oberfeldkommandantur 670 adressera aux bureaux les listes d'autorisations correspondantes.

Les heures limites du trafic sont 8 et 19 heures.

Le 22 novembre, la direction régionale des PTT à Lille informait la direction départementale que l'autorité allemande permettait la remise en service des circuits interurbains suivants :

Lille-Béthune : 1 circuits ; Lille-Lens : 3 circuits ; Lens-Arras : 3 circuits ; Arras-Saint-Pol : 2 circuits ; Lille-Arras : 5 circuits ; Lens-Béthune : 1 circuit ; Lens-Hénin- Liétard : 1 circuits.

Jusqu’à présent, une partie seulement de ces liaisons a pu être effectivement livrée à l'exploitation. Depuis une quinzaine de jours, il est possible à la préfecture de téléphoner à Lille et à Béthune.

La remise en état du réseau téléphonique départemental se poursuit aussi activement que possible. Les bureaux réouverts au service, répartis par groupements, sont indiqués ci-après.

Groupement d'Aire-sur-la-Lys : Aire-sur-la-Lys.

Groupement d'Arras : Arras, Achicourt, Agny, Vimy, Vitry-en-Artois.

Groupement de Bapaume : Bapaume.

Groupement de Béthune : Béthune, Auchel, Beuvry, Calonne-Ricouart, Labeuvrière, Labourse, Lapugnoy, Marles-les-Mines, Nœux-les-Mines, Sailly-Labourse, Verquigneul.

Groupement de Bruay-en-Artois : Bruay-en-Artois.

Groupement d'Hénin-Liétard : Hénin-Liétard.

Groupement de Lens : Lens, Avion, Billy-Montigny, Fouquières-lès-Lens, Hersin-Coupigny, Loison-sous-Lens, Liévin, Noyelles-sous-Lens, Sallaumines.

Groupement de Lillers : Lillers.

Groupement de Saint-Omer : Saint-Omer.

Groupement de Saint-Pol-sur-Ternoise : Saint-Pol-sur-Ternoise, Anvin, Auxi-le-Château (service urbain seulement), Brias, Conteville-en-Ternois, Croisette, Diéval, Fleury, Foufflin-Ricametz, Hernicourt, Hestrus, Heuchin, Ligny-Saint-Flochel, Monchy-Cayeux, Œuf, Pernes-en-Artois, Pierremont, Roëllecourt, La Thieuloye, Tincques, Valhuon, Wavrans-sur-Ternoise.

Actuellement, 976 abonnés, sur 12.082 au 1er avril 1940, sont rétablis.

Service technique. En ce qui concerne les services techniques, rien d'important à signaler. Il convient cependant de noter qu’en vue d'activer la remise en état des réseaux téléphoniques et télégraphiques du département, l'administration supérieure se propose d'envoyer dans le Pas-de-Calais un renfort de 50 unités environ, prélevé sur les effectifs de départements peu éprouvés de la zone occupée (Gironde, Landes, Charente-Inférieure, etc.). l'attestation nécessaire à la direction départementale pour lui permettre de demander les laissez-passer indispensables à ce personnel pour le franchissement aller et retour de la Nord-Ost-Linie a pu être obtenue de la Feld Nachrichten Kommandantur 24 à Lille. Toutefois, on ignore encore si les laissez-passer eux-mêmes ont été délivrés et la date à laquelle les agents de renfort seront mise en route.

Locaux de service. La remise en état des locaux endommagés se poursuit. Quelques bureaux continuent à être occupés par les troupes allemandes.

Chemins de fer

A la date du 15 novembre, la SNCF a repris l'exploitation des voies ferrées. Le 15 décembre, les relations par train de voyageurs ont été améliorées.

Le trafic des marchandises s’est accu d'une façon notable. La SNCF, a, en effet, transporté 1.720.000 tonnes de houilles pendant le mois dernier contre 1.400.000 en octobre et ce tonnage sera vraisemblablement dépassé au cours du mois de décembre.

l'accroissement du trafic oblige la compagnie, à certains moments, à prévoir des restrictions pour les catégories de matériels qui font défaut, par suite de la réduction du parc, conséquence des conventions d'armistice.

Pour pallier au manque de matériel, les mesures suivantes ont été prises récemment : prime de chargement ou de déchargement si les opérations de manutentions ont été faites dans les conditions requises ; augmentation des frais de stationnement si le matériel n'a pas été déchargé dans les délais prescrits par les tarifs. l'attention du public a d'ailleurs été attirée sur ces nouvelles dispositions.

Ponts et chaussées

Situation. Actuellement l'effectif du personnel comprend :

l'ingénieur en chef, titulaire

4 ingénieurs d'arrondissement sur 5 en temps de paix

33 ingénieurs des TPE sur 44

37 adjoints techniques et agents de bureaux sur 46

608 canonniers et cantonniers-chefs sur 870.

Occupations. Aucun fait nouveau depuis mon rapport du 20 novembre.

Communications. Le service des chemins de fer s’est amélioré progressivement et assure les transports de la campagne de betterave dans de bonnes conditions. Les camions nécessaires aux transports de betteraves vers les gares ont été également fournis aux sucreries. Destructions. Deux ponts provisoires avec passes marinière ont été mis en service, deux autres ponts en construction à Béthune et Lens. Un pont détérioré est remis en état à Montreuil ; un autre est en cours de reconstruction à Corbehem. Les projets de ceux de Saint-Laurent-Blangy, près d'Arras et Hesdin sont à peu près terminés.

C. Destructions Dans mon rapport du 30 septembre dernier, j’avais donné les renseignements suivants pour tout le département :

Immeubles compétemment détruits : 4.000

Immeubles endommagés et réparables : 18.000

Le recensement le plus récent (courant décembre) permet, compte tenu des nouveaux dommages subis ainsi que les vérifications faites à l'occasion des déblaiements, d'arrêter ainsi, quant à présent, les chiffres des destructions d'immeubles :

Nombre d'immeubles détruits : 5.400 (en chiffres ronds)

Nombre d'immeuble endommagés : 20.000

Nombre de communes ayant subi des dommages de guerre : 372

Dans les localités comportant des zones importantes de destruction il doit être établi un programme national rationnel d'urbanisme et d'aménagement avant d'entreprendre le déblaiement général des quartiers détruits.

La liste des localités ainsi endommagées, tenues aux termes de la loi du 14 mars 1919 – 19 juillet 1924, de préparer un plan de reconstruction vient d'être arrêtée par arrêté préfectoral, après avis de la commission départementale d'aménagement des villes et villages. Elle comprend six communes : Arras, Courrières, Mont-Bernanchon, Robecq et Saint-Venant, Calais. Dans ces six communes, sauf à Calais où la situation est spéciale, les services techniques du département préparent un plan général d'alignement des voies publiques dans les parties détruites comportant, soit l'ouverture de nouvelles rues, soit la déviation de certaines voies, ou de légères modifications dans leur tracé. Lorsque ces plans seront approuvés il sera possible d'entreprendre d'une manière méthodique le déblaiement général et massif des quartiers détruits. En attendant, le déblaiement des immeubles isolés se poursuit.

Quant à la question des baraquements destinés à abriter les populations sinistrées, les efforts entrepris se poursuivent. Un chef de section des constructions provisoires est arrivé dans le département ; il a pris immédiatement en main cet important service.

Au cours des visites faites dans les localités les plus gravement atteintes, il a procédé après études de mes services, au choix des terrains sur lesquels seront édifiés les habitations provisoires.

Le travail de préparation a été activement poussé, en ce qui concerne les villes de Courrières et d'Oignies, plus particulièrement éprouvées. Des baraques sont arrivées à Courrières où le commencement des travaux doit avoir lieu le 10 janvier.

L'édification de cités destinées à abriter les sinistrés est prévu, d'une part aux environs de Calais, Boulogne-sur-Mer et Outreau, d'autre part dans la banlieue d'Arras et de quelques centres importants.

En résumé, 12 cités provisoires sont actuellement à l'étude.

Industries

a) Voici tout d'abord les renseignements concernant les industries autres que celles situées dans la région côtière.

Industries détruites ou gravement endommagées. Aucune modification.

Industries dont l'équipement est intact et pour lesquelles la main d'œuvre fait défaut. En raison de la reprise considérable enregistrée dans la plupart des industries, la main d'œuvre fait défaut, en particulier en ce qui concerne la métallurgie et le travail des métaux, ainsi que le bâtiment. Les bureaux de placement reçoivent des très nombreuses offres d'emploi dans ces catégories sans pouvoir leur donner de suite favorable.

Industries n'ayant pas encore repris leur activité. Toutes les industries importantes se sont, à l'heure actuelle, remise en route, notamment les grandes usines métallurgiques, les verreries, etc. En ce qui concerne l'industrie sucrière, aucune difficulté importante n'a été rencontrée pendant la campagne en cours qui s’exécute selon le plan établi et avec la main d'œuvre disponible. Cependant, je signalerai les difficultés de ravitaillement en matières premières que rencontrent de nombreuses usines et notamment les brasseries et certaines usines métallurgiques s’approvisionnant normalement en Lorraine, et les papeteries.

Industries en activité. Ainsi qu’il est signalé ci-dessus, les diverses branches de l'industrie ont repris, soit en totalité, soit partiellement leur activité normale.

Mines. Les houillères du Nord et du Pas-de-Calais travaillent actuellement 6 jour par semaine. La production est de 90.000 tonnes nettes environ par jour de travail ; le rendement individuel fond avoisine 1.000 kilos.

Grâce à l'amélioration des transports ferroviaires, les expéditions dépassent depuis le 15 novembre 1940, d'environ 50.000 à 60.000 tonnes par semaine la production de l'ensemble du bassin. Les expéditions par eau malgré leur progression sont encore peu importantes (37.000 tonnes par semaine).

Les stocks qui atteignaient en début novembre 1.400.000 tonnes en combustibles crus sont ramenés au 15 décembre à 1.150.000 tonnes environ dont 75.000 tonnes de fines.

Autres industries. Les industries chimiques occupent un total de 3.814 personnes contre 4.779 au début de mai 1940 ; les industries textiles 1.873 contre 3.313 ; le bâtiment : 3.125 contre 3.507 ; ces statistiques étant établies pour les établissements ou entreprises occupant au moins 50 personnes. Depuis l'envoi de mon dernier rapport, l'amélioration la plus sensible s’est produite dans les usines de la métallurgie et du travail des métaux par la remise en route d'établissements très importants comme les aciéries d'Isbergues (effectif actuel : 1.500 ouvriers, remis en route à la date du 1er décembre), ainsi que les verreries (verrerie de Wingles : effectif : 300 personnes, 20 novembre ; verrerie Belote à Calonne-Ricouart, effectif : 150 personnes, 1er décembre).

b) Région côtière

Dans mes rapports précédents, il n'avait pas été donné, faute d'informations très précises, de renseignements détaillés sur la situation de l'industrie dans la région côtière, en particulier dans l'arrondissement de Boulogne et les cantons d'Ardres et d'Audruicq de l'arrondissement de Saint-Omer. Il m’a paru intéressant de donner, aujourd'hui un tableau de cette situation :

1. Établissements détruits qui ne pourront reprendre leur activité sans travaux importants.

Établissements Drouet Fourny, rue Montebello à Boulogne-sur-Mer, fabrique de salaisons et conserves de poissons

Établissements Georges Rondeau, rue des 4 Coins à Calais, fabrique de cartonnages

Établissements Tiburce Lebas, rue des Soupirants à Calais, fabrique de tulles et dentelles

Établissements Vampouille et Duquenoy, rue des 4 Coins à Calais, fabrique de tulles et dentelles

Entreprise Bedrine, 26 rue de l'Amiral Courbet à Calais, entreprise de bâtiments et de travaux publics

2. Établissements dont l'équipement est intact et pour lesquelles la main d'œuvre fait défaut. Néant.

3. Établissements qui n'ont pas repris leur activité bien que disposant sur place de l'équipement et de la main d'œuvre.

Biscuits Vendroux. 90 boulevard Victor Hugo à Calais. l'activité de cet établissement est très réduite : absence de matières premières, blé, sucre et matières grasses.

Société pêche et froid. 23, rue d'Alger à Boulogne-sur-Mer. Impossibilité d'aller en mer avec des bateaux spécialement équipés et d'un tonnage trop important.

Établissements Lunel. Place Capécure à Boulogne-sur-Mer. Salaisons et conserves. Local occupé par les armées allemandes.

Établissements Descotes Lapierre. Rue Montebello à Boulogne-sur-Mer. Salaisons et conserves. Usine partiellement détruite. Directeur décédé.

Société industrielle du poisson. 75 rue du Moulin à vapeur à Boulogne-sur-Mer. Directeur absent.

Fabrique de Laire. 1 quai d'Amérique à Calais. Produits de chimie organique. Fabrication interdite par les autorités d'occupation.

Société Scora à Caffiers. Produits magnésiens. Directeur absent.

Société calaisienne de pâtes à papier. Quai de la Loire à Calais. Zone bombardée et interdite par les autorités d'occupation.

Fabriques de tulles et dentelles. Absence de débouchés, sauf quelques maisons qui ont obtenu quelques commandes de Paris ou confectionnent des articles de lingerie pour les achats des soldats allemands.

Établissements Dufermont. Fabrique de corsets. 43 rue Neuve à Calais. Directeur absent.

Société les Câbles de Lyon. 4 quai de la Loire à Calais. Câbles sous-marins. Zone bombardée et interdite par les autorités d'occupation.

Établissements Géo Martel. Fabrique de faïences d'art à Desvres. Absence du directeur.

Société des ciments de Lafarge et du Teil, à Sangatte. Fabrication interdite dans cette zone par les autorités allemandes.

4. Établissements ayant repris leur activité.

Établissements Charpin Delpierre. Salaisons. Rue de la Scierie à Boulogne-sur-Mer.

Établissements Vanheeckoet. Salaisons. Rue d'Orléans à Boulogne-sur-Mer.

Établissements Vidor Sarraz. Salaisons. Rue d'Orléans à Boulogne-sur-Mer. (bien que partiellement détruite par les bombardements).

Bouclet Zunnequin. Salaisons. Rue Saint-Vincent de Paul à Boulogne-sur-Mer.

Gournay frères. 90 rue du Moulin à Vapeur, à Boulogne-sur-Mer.

R. Hochart. Salaisons. Place Capécure à Boulogne-sur-Mer.

Biguet frères. Salaisons. Rue Damrémont à Boulogne-sur-Mer.

Fourmentin Ramet. Rue d'Orléans. Salaisons à Boulogne-sur-Mer.

Tous ces établissements n'ont qu’une activité restreinte : absence de poissons et d'huiles.

Sucrerie Say. Pont d'Ardres. Ravitaillement de la population.

Sucrerie Say. La Bistade.

L'usine à Gaz. 56 rue du Moulin à Brûler à Calais. Activité normale malgré quelques dégâts occasionnés par les bombardements.

Usine à gaz. Boulevard Daunou à Boulogne-sur-Mer. Activité normale.

Établissements Jaeamels Malbranque. Rue des Soupirants à Calais. Fabrique de cartonnages. Activité réduite. Confection d'emballages pour les colis des soldats allemands.

Journal le Télégramme. Rue Victor Hugo à Boulogne-sur-Mer. Activité normale.

Anciens établissements Paul Gaultier à Pont-de-Briques. Fabrique des cartonnages. Absence de débouchés et de matières premières. Activité très réduite.

Établissements Stein. Fabrique de filets et cordage à Le Portel. Seule la corderie fonctionne. Absence de débouchés.

Les Filés de Calais. Fabrique de rayonne à Pont du Leu, Coquelles. Une partie du personnel est occupée à la fabrication de fibres de rayonne coupées pour mélange avec d'autres fibres.

Établissements Neyme. Atelier de dévidage et de retordage de soie à Nordausques. Cet établissement vient de remettre son activité.

Société anonyme des bonneteries d'Audruicq. Tricotage d'articles en grosse laine. Activité réduite, manque de laine.

Établissements Thierry frères. Rue de la Madeleine à Boulogne-sur-Mer. Fabrique de chaussures. Contingenté par les autorités allemandes.

Établissements Edmond Pagniez. 198 rue des 4 Coins à Calais. Bois du Nord.

Établissements Snauwart. Quai de la Vendée à Calais. Bois du Nord.

Établissements Ph. Rémy. Rue Jules Martin. Bois du Nord. Calais.

Ces trois établissements ont eu leurs stocks réquisitionnés par les autorités allemandes.

Crouy frères. Rue de la Scierie à Boulogne-sur-Mer. Bois du Nord. Travaille pour les autorités allemandes (baraquements).

Lejeune. Rue d'Isly à Boulogne-sur-Mer. Tonnellerie. Travaille pour les autorités allemandes à la construction de baraquements et de divers travaux de menuiserie.

Manufacture de jouets et vanneries. Oye-Plage. Fabrique de jouets en vannerie. Activité réduite.

Usines métallurgiques de Marquise à Rinxent. Appareillage pour usines à gaz. Activité réduite.

Aciéries de Paris et d'Outreau à Outreau. Fonderies et aciéries. Remise en route. Moulage d'acier.

Établissements Brampton. 218 boulevard Lafayette à Calais. Chaînes cycles. Une partie du personnel travaille à la production de chaînes industrielles et cycles.

Rogliano. Cale de radoub à Calais. Réparations navales. Partiellement détruit, travaille pour l'armée allemande.

Les câbles de Lyon. Quai de la Loire à Calais. Câbles sous-marins. Zone inaccessible.

François et compagnie. Rue des Fleurs à Calais. Tôlerie industrielle. Va remettre en route.

Dion et Lavoine. Boulevard Curie à Calais. Construction électro mécaniques. Travaille pour la marine allemande.

SICER. Rue d'Orléans à Boulogne-sur-Mer. Réparations navales. Une grande partie du personnel travaille pour la marine allemande.

Sermajor Gilbert. Rue de la gare à Boulogne-sur-Mer. Plumes métalliques. Activité réduite. Va arrêter la fabrication, l'usine ayant subi de très gros dégâts.

Blanzy Poure. Rue de la Bréquerecque à Boulogne-sur-Mer. Plumes métalliques, emboutis.

Baignol et Farjon. Rue d'Orléans à Boulogne-sur-Mer. Travaille à la fabrication de crayons, plumes et emboutis.

Usine Ondia. 2 avenue de Paris à Boulogne-sur-Mer. Construction radioélectrique. Activité très réduite. Manque de débouchés.

Emballages métalliques. Quai de la Crique à Boulogne-sur-Mer. Tôlerie métallique. Activité réduite. Travaille à la confection d'emboutis.

La boîte métallique illustrée. 15 rue de Verdun à Boulogne-sur-Mer. Tôlerie métallique. Activité réduite. Remis en route après destruction.

ACMB. Boulevard de Chatillon à Boulogne-sur-Mer. Réparations navales. Travaille pour la marine allemande dans une zone inaccessible.

FAPMO. Rue de la Verte Voie à Outreau. Pompes, moteurs. Travaille pour la marine allemande.

Société des carrières de la vallée heureuse et du haut banc à Hydrequent. Activité normale. Travaille à l'extraction de matériaux pour travaux publics.

Thélu et Delval. Quai du commerce à Calais. Bâtiments, travaux publics. Activités réduites, remise en état des réseaux routiers et des canaux.

Létendart Farrands. Avenue Salengro à Calais. Bâtiments, travaux publics. Activité très réduite. Extraction de graviers pour les allemands.

Compagnie générale des eaux. Boulevard Daunou. Distribution d'eau. Activité normale. Travaux de reconstruction et pour l'armée allemande.

Établissements Debosque. Avenue de Paris à Boulogne-sur-Mer. Bâtiment. Activité presque normale.

F. Landrot. Rue Soulès à Boulogne-sur-Mer. Bâtiment. Activité réduite, travaille pour l'armée allemande et la reconstruction d'édifices.

Société des ciments la Couronne, à Dannes. Ciments artificiels. Activité réduite. Liquide les stocks pour l'armée allemande.

Fourmaintreaux Delassus. Desvres. Céramique d'art. activité réduite. Absence de débouchés.

Veuve F. Masse. Desvres. Faïences d'art. activité réduite. Vient de se remettre en route.

Société des ciments français à Desvres. Ciment artificiel. Activité normale. Travaille pour les autorités allemandes.

Société des ciments Portland de Marseille, à Lottinghen. Activité normale. Travaille pour les autorités allemandes.

Société des ciments Lavocat, à Nesles. Ciment artificiel. Activité réduite. Travaille un peu pour les autorités allemandes.

Société des produits céramiques et réfractaires, à Outreau. Remise en route du matériel. Liquidation des stocks.

Agriculture

1) Production végétale

Betteraves sucrières. Les arrachages de betteraves sucrières sont partout terminés. Le rendement moyen est voisin de 30 tonnes à l'hectare. La superficie cultivée, qui atteint en année ordinaire 45.000 hectares a été réduite à 26.000 hectares du fait des événements de guerre. La densité, partout élevée a souvent été voisine de 9.

Les difficultés de transport, par fer et par camion ont été beaucoup plus grande cette année que l'année dernière. Les cultivateurs ont dû arrêter les transports, parfois des semaines entières, faute de wagons. Dans la région de Montreuil notamment, où la betterave est beaucoup cultivée, des silos ont dû être établis le long des routes, pour attendre le moment de l'expédition. Le travail des sucreries a été retardé, parce que les premières usines n'ont commencé à tourner que le 15 octobre et que les transports par fer et par camion, dans la région côtière notamment ont été longtemps insuffisants. La plupart des usines devront continuer à travailler en janvier. Ce n'est qu’à la fin du mois prochain que l'on pourra préciser la production du sucre de l'ensemble des usines, laquelle a été estimée à 100.000 tonnes.

Battage des céréales. Les battages des céréales ont beaucoup préoccupé les cultivateurs, notamment ceux qui doivent utiliser les carburants liquides. Les prescriptions de l'autorité occupante de battre et de livrer tous les blés aux organismes stockeurs pour le 15 février 1941 et de fournir un important contingent d'avoine pour la même date imposaient un immense travail. Bien que le courant électrique et la vapeur servent à battre approximativement la moitié des récoltes les besoins de décembre en carburants liquides étaient importants. Ils s’élevaient aux chiffres suivants :

Essence : 141.170 litres.

Gas-oil : 85.750 litres.

Fuel-oil : 3.530 litres.

Le contingent alloué n'étant que de 24.000 litres d'essence et de 24.000 litres de gas-oil, les battages n'ont pu être exécutés suivant le rythme prévu. En se basant sur les quantités de carburants distribuées depuis le début de la campagne on peut estimer que dans le Pas-de-Calais, on a pu battre 40% des céréales.

Les rendements fournis par le blé confirment les prévisions faites dès la moisson ; dans l'ensemble ils atteindront 17 à 18 quintaux de moyenne.

Quant à l'avoine, le rendement prévu de 23 quintaux ne sera pas atteint ; il devra être abaissé à 21 quintaux. l'autorité occupante a imposé un contingent à réquisitionner de 625.000 quintaux, se décomposant comme suit :

500.000 quintaux pour l'armée allemande

100.000 quintaux pour les chevaux des non-producteurs d'avoine

25.000 quintaux pour la fabrication des aliments composés du bétail.

A la fin de décembre, 100.000 quintaux d'avoine étaient réquisitionnés par l'intermédiaire des commissions de réception et reçus par les négociants des coopératives. l'autorité allemande a également prévu de prélever 110.000 tonnes de paille. Les achats ont commencé début décembre.

Lin. La récolte du lin de la dernière campagne est en cours de vente. Les lins rouis à terre sont achetés pour la plus grande partie par les teilleurs français ; les lins verts, par les teilleurs belges. Le rendement a été irrégulier. Il est cependant bon dans l'ensemble et très bon dans quelques régions de l'Artois. En ce qui concerne les graines exportées en Belgique en même temps que les pailles non battues, un accord vient d'être conclu pour leur réintroduction en France entre le syndicat des teilleurs belges et l'association des liniculteurs français, sur la base de 8 kilos de graines par 100 kilos de paille.

Céréales en terre. Les seigles, escourgeon et avoine d'hiver ont bénéficié d'une arrière-saison très favorables qui leur a permis d'atteindre un fort développement avant les froids. Les surfaces ensemencées sont en légère augmentation sur celles de l'an dernier, le cultivateur se trouvant dans l'obligation d'alimenter ses animaux avec les seuls produits de se ferme.

Les blés ne sont pas encore semés partout. La surface ensemencée est plus importante que celle qui étaient enregistrée l'an dernier, à la même époque. Dans l'ensemble, on peut estimer que les 2/3 sont semés ; la région en retard étant la région côtière.

2) Production animale

Chevaux. Les chevaux de traits sont recherchés notamment par les cultivateurs de l'Artois où l'évacuation et l'armée allemande ont fait des dégâts importants. La rareté a considérablement élevé les cours, de sorte que l'on paie les poulains de l'années 10.000 francs, les 18 mois : 15.000 francs, les chevaux : 25.000 francs, parfois plus.

Bovins. Les vaches laitières ont suivi le mouvement de hausse. La belle vache laitière qui valait 5.000 francs il y a quelques mois, cote actuellement 8.000 francs.

La production du lait affaiblie par l'insuffisance et le blocage rendu nécessaire des aliments concentrés : grains, sons, tourteaux, doit faire face à des besoins accrus : besoins de troupes allemandes stationnant dans les communes et besoins de la population. La production locale disponible pour la population civile étant réduite, les arrivages des autres départements étant d'autre part très faibles, on comprend aisément les difficultés dans lesquelles se débat le comité de gestion des produits laitiers.

Alimentation des animaux. l'une des questions les plus importantes que doit résoudre actuellement le cultivateur est l'alimentation des animaux. Un comité départemental de répartition des produits indispensables à l'agriculteur a été créé. La première tâche est de s’occuper de l'approvisionnement en aliments du bétail. Il doit répartir équitablement les stocks disponibles dans le département ainsi que les quantités qui pourront qui être attribuées par le bureau national des aliments du bétail à Paris. Les stocks de tous aliments qui existent actuellement dans le département sont très faibles eu égard aux exigences du cheptel et des troupes d'occupation. Il y a un déficit pour tous les produits à l'exception de la mélasse.

Des compléments de tourteaux, issues de blés, farines animales, etc. viennent d'être demandés au bureau national des aliments du bétail. Il y a lieu de prévoir que l'alimentation du nombreux cheptel existant dans le département rencontrera de grandes difficultés et qu’il sera très difficile de maintenir la production à son niveau normal. Pour faciliter la répartition des aliments concentrés existants, le comité de répartition a provoqué la fabrication de tourteaux composés, d'aliments mélassés et de moutures de porcs.

3) Main d'œuvre agricole.

La main d'œuvre agricole ne peut pas ne pas être notoirement insuffisante.

Dans les trente mille fermes que compte le département, il manque près de 10.000 hommes, la plupart prisonniers de guerre. Ce vide vient encore d'être accru par le départ des travailleurs agricoles étrangers introduits depuis 1937. Dans ces conditions, malgré le travail et le dévouement de tous ceux qui restent dans les fermes, beaucoup d'exploitants agricoles se trouvent dans une situation très difficile. Si, à cause de l'entraide qui se généralise, les terres ne resteront pas incultes, leurs rendements se trouveront nécessairement diminués parce que la terre ne recevra pas en temps voulu le travail qu’elle exige. Il n'y a qu’un seul remède à cette situation, c’est d'obtenir des autorités militaires allemandes qu’elles accordent dans le moindre délai des congés de captivité aux agriculteurs prisonniers de guerre.

4) Difficultés spéciales inhérentes à l'occupation

Réquisition d'hommes et d'attelages. Les autorités occupantes ont continué, en décembre, d'imposer aux nombreuses communes avoisinants les champs d'aviation militaire disséminés dans tout le département la fourniture d'hommes et d'attelages, pour travaux de charrois de cailloux et d'aménagement de pistes. Il s’agit partout de communes rurales qui sont forcées de prélever cinquante pour cent et souvent plus de leurs effectifs de travailleur agricoles. Ces mesures vont nettement à l'encontre de la production.

Enlèvement de Polonais. Je rappellerai ici l'enlèvement des travailleurs agricoles étrangers introduits en France depuis 1937. Ces hommes, la plupart de nationalité polonaise, ont été drainés dans la région d'Arras et de Saint-Pol-sur-Ternoise. Rassemblés à Saint-Pol-sur-Ternoise, au nombre de plusieurs dizaines, ils ont été dirigés vers une destination inconnue. La départ de ces hommes va gêner considérablement leurs employeurs, parce que la main d'œuvre agricole est extrêmement rare du fait du grand nombre de prisonniers de guerre comme nous l'avons vu ci-dessus et étant donné qu’il s’agissait presque partout de spécialistes, charretiers notamment.

Réquisition des silos. Certaines doléances sont adressées à la direction des services agricoles par les coopératives agricoles des producteurs de blé d'Aubigny-en-Artois, de Guînes et l'Avenir agricole sont les silos ou magasins situés à Aubigny-en-Artois, Guînes et Étaples viennent d'être réquisitionnés.

Réquisition d'avoine. Il y a lieu de considérer enfin que les réquisitions d'avoine, dont il a été parlé plus haut, sont trop importantes. Si le total de 625.000 quintaux devait être effectivement fourni, il correspondrait à un prélèvement de 31% des disponibilités (déduction faite des besoins de semences). Cette livraison est absolument impossible pour le département du Pas-de-Calais, où, à l'exception du Calaisis et de quelques rares communes de l'Artois qui accusaient quelques ventes, l'avoine était uniquement réservée aux besoins du nombreux bétail garnissant les fermes.

5) Crédit agricole. Il me paraît utile de compléter l'exposé ci-dessus par quelques renseignements sur le crédit agricole. La caisse régionale de Crédit agricole mutuel du Pas-de-Calais continue à fonctionner en dépit des événements.

Les prêts à court terme sont très ralentis ainsi que ceux à moyen terme et à long terme, lesquels sont peu demandés en raison de l'incertitude actuelle. La loi du 28 juillet 1940, en vue de la reprise de l'activité agricole, a eu d'heureux effets ; à ce jour, 145 prêts pour 4.457.000 francs ont été réalisés. De très nombreuses demandes sont à l'étude, il s’agit de cultivateurs ayant perdus plus de 50% de leur cheptel mort ou vif.

Le financement du blé a été fortement retardé, les battages de blé ayant été peu importants jusqu’à ce jour.

A souligner également le mouvement des dépôts de fonds en comptes courants qui va sans cesse croissant. Il était il y a un an de 38.000.000 francs, en mai 1940 : 45.000.000 francs, actuellement 64.500.000 francs.

Le tableau ci-après donne la comparaison, en soldes, des principaux postes des opérations.

Opérations de la caisse régionale de crédit agricole mutuel du Pas-de-Calais

Questions financières

Situation monétaire

La circulation monétaire est satisfaisante dans l'ensemble du département. Toutes les caisses publiques ainsi que les différents établissements bancaires trouvent auprès des comptoirs de la Banque de France les ressources dont ils ont besoin. Sur ce point, il est possible de considérer les difficultés rencontrées dans les premiers mois de la période d'occupation comme définitivement résolues.

Le retrait des Reichsmark a continué au cours du dernier mois et les transactions sont maintenant presqu’exclusivement réglée en monnaie française.

Les retraits effectués par les seuls comptoirs de la banque de France d'Arras se sont élevés à :

59.774.740 francs pour le mois de septembre, comprenant 1.089.600 billets,

65.138.000 francs pour le mois d'octobre, avec 1.207.300 billets,

43.158.160 seulement pour novembre.

La valeur totale des Reichsmark centralisés à Arras a atteint 239.629.760 francs.

Situation bancaire

Aucune modification appréciable n'est survenue dans la situation bancaire du département depuis mon dernier rapport. Des capitaux importants continuent à demeurer sans emploi et viennent grossir les dépôts de fonds. Le tableau ci-après donne la comparaison des résultats de novembre 1939 et 1940 avec ceux de novembre 1938, des différents postes de quelques banques d'Arras :

Proportion par rapport aux résultats au 30 novembre 1940

Pour le développement de leurs opérations, les directeurs de banques continuent à demander l'octroi de facilités nouvelles pour circuler dans le département ainsi que la possibilité de se rendre à Paris pour raisons de service. Ils sollicitent en outre le rétablissement des communications téléphoniques entre les différentes agences de la région et la possibilité d'obtenir des services postaux l'adresse de leurs clients évacués lorsque celle-ci est connue.

Cette dérogation du secret professionnel imposés aux agents des postes a pour but de permettre d'informer les locataires de coffre-fort des dates fixées par les autorités occupantes pour l'ouverture desdits coffres.

Situation des services du Trésor

Depuis mon dernier rapport du 20 novembre aucun comptable ou agent titulaire du Trésor n'est rentré dans le département. Cette situation en se prolongeant risque de compromettre la bonne exécution des services déjà durement éprouvés par l'absence des personnels mobilisés demeurés prisonniers.

Recouvrements. l'émission des rôles généraux des anciennes contributions directes est terminée dans toutes les perceptions rurales. Dans les villes par contre, les avertissements n'ont encore pu être distribués aux contribuables. Il est à penser que cette distribution pourra intervenir dans un délai assez rapproché à l'exception des agglomérations de Boulogne-sur-Mer et de Calais, où, ainsi que je l'ai déjà signalé, la situation actuelle va entrainer la révision presque totale des impositions.

Les recouvrements à la fin du mois de novembre s’élevaient pour l'exercice 1940 à : 136.408.194 francs, dont 53.059.220 pour les rôles émis par l'administration des contributions directes.

43.287.162 au titre de la contribution nationale de 2 et 5%

27.727.594 au titre de la contribution nationale de 15%

12.334.218 au titre de l'impôt cédulaire sur les salaires.

Les restes à recouvrer sur les exercices antérieurs ont été ramenés à :

2.512.403 francs pour les exercices 1936 et antérieurs,

616.607 francs pour 1937,

3.121.996 francs pour 1938.

44.585.600 francs pour 1939.

Ces restes concernent presqu’exclusivement les perceptions de ville et celles de la région côtière où les recouvrements sont actuellement particulièrement difficiles surtout dans les villes de Calais et de Boulogne-sur-Mer dont la population est durement éprouvée par les événements.

Le tableau ci-dessous donne la comparaison des recettes centralisées à la Trésorerie générale au cours des mois de novembre 1940 et de novembre 1939.

Comparaison des recettes centralisées à la Trésorerie générale au cours des mois de novembre 1940 et de novembre 1939

L'augmentation des recettes qui apparait en 1940 pour les contributions indirectes résulte d'une majoration de droits et de la hausse des prix qui a suivi les événements de mai, plutôt que d'une reprise de l'activité économique de la région qui demeure bien inférieure à la moyenne des années précédentes.

En ce qui concerne plus spécialement les droits encaissés par l'administration de l'Enregistrement, en 1939 et en 1940 (l'état précédent vise les recettes centralisées à la Trésorerie) le tableau suivant fait ressortir pour les 5 mois considérés de 1940 une moins-value de 29% par rapport à 1939 :

Juillet = 2.685.445.48, dont 17.871,58 de droits hypothécaires

Août = 5.909.701, 79, dont 40.112 de droits hypothécaires

Septembre = 15.681.198,82, dont 73.421,08 de droits hypothécaires

Octobre = 22.196.841.10, dont 67.420, 08 de droits hypothécaires

Novembre = 11.275.026,14, dont 48.446,43 de droits hypothécaires

Pour les mois correspondants de 1939, les recettes étaient les suivantes

Juillet = 31.843.620,04, dont 215.816,81 de droits hypothécaires

Août = 16.808.747,36, dont 193.836,09 de droits hypothécaires

Septembre = 7.806.294,51, dont 172.358,10 de droits hypothécaires

Octobre = 21.899.683,32, dont 104.097,40 de droits hypothécaires

Novembre = 9.699.817,54, dont 88.620,74 de droits hypothécaires

A noter que la progression constatée de juillet à octobre 1940 provient surtout de régularisations (sommes dues par les sociétés à l'échéance du 20 juillet et non acquittée à l'époque, actes translatifs non enregistrés en leur temps, etc.). Toutefois, le mouvement des taxes hypothécaires correspond dans une certaine mesure à l'intensité de la vie économique.

Émissions de bons du Trésor. l'émission des bons du Trésor et de la Défense continue à bénéficier de la faveur du public, le tableau ci-dessous donne la comparaison des résultats entre les années 1939 et 1940 :

Émission des bons du Trésor et de la Défense : comparaison des résultats entre les années 1939 et 1940

La totalité des émissions de l'année 1940 a atteint 619.382.000 francs alors que les remboursements ne se sont élevés qu’à 326.634.00 francs soit un excédent de placement de 292.748.000 francs en faveur de l'année en cours. Ces résultats sont d'autant plus satisfaisants que toute émission a été pratiquement suspendue du 2 mai à la fin juillet dernier.

Avances à divers titres. Les communes, privées de ressources au début de l'occupation, ont reçu diverses avances exceptionnelles du Trésor s’élevant au total à 124.528.926 francs pour faire face à leurs dépenses urgentes. La plupart des communes rurales ont pu rembourser ces avances mai les villes et les localités de la région minière, qui ont eu à supporter de lourdes charges d'assistance, sont encore redevables d'une somme de 59.139.025 francs. Il ne parait pas possible dans la situation actuelle, d'exiger dans tous les cas le remboursement intégral de ces avances, un certain nombre de communes ne disposent d'ailleurs pas d'un excédent de recettes suffisant pour s’acquitter et le recours à l'emprunt ne fera qu’augmenter les charges qui grèvent leur budget.

Ces dépenses exceptionnelles résultant pour la plupart des secours que les communes ont été dans l'obligation d'accorder aux personnes privées de ressources par suite des événements, il serait équitable que l'État pris à sa charge une partie importante dans les mêmes conditions que pour les dépenses résultant du chômage (un rapport spécial à ce sujet a été adressé par mes soins au secrétariat général de la famille et de la santé le 15 novembre dernier).

Caisse d'épargne. Bien que l'ensemble des opérations réalisées par les caisses d'épargne du département, au cours de l'exercice courant, soit inférieur de 50% à celles de l'année précédente, il ressort néanmoins pour l'année 1940 un excédent de placement sur les retraits supérieurs à celui de 1939. Le tableau ci-après donne la comparaison de ces opérations.

Opérations réalisées par les caisses d'épargne

Questions sociales

Assurances sociales

Je n'ai rien de particulier à signaler dans le fonctionnement des assurances sociales depuis mon dernier rapport. Je crois savoir cependant, que les autorités d'occupation auraient l'intention de créer, à Lille, une caisse d'assurances sociales, ou plutôt une filiale de la caisse de maladie de Saarbrück qui prendrait en charge, en principe, les allemands travaillant dans la région.

Main d'œuvre et chômage

Le chômage a subi une régression considérable dans le département depuis quelques mois. Le tableau ci-après indique le nombre de chômeurs aux diverses périodes des mois écoulés :

Nombre de chômeurs

Il résulte des chiffres indiqués ci-dessus que le chômage masculin est en régression très nette. A l'heure actuelle, il ne reste plus guère comme main d'œuvre inemployée que des ouvriers présentant des aptitudes physiques assez réduites, la grande majorité de la main d'œuvre valide pouvant être considérée comme utilisée.

En ce qui concerne le chômage féminin, la situation reste sans changement. Il n'a pas été encore possible de trouver les moyens propres à résorber le chômage dans cette catégorie.

On doit cependant tenir compte du fait que les autorités occupantes utilisent un nombre considérables d'ouvriers, soit pour les besoins de leurs services, soit dans les chantiers ouverts dans certains points du département. Cette main d'œuvre au sujet de laquelle je n'ai pu obtenir aucun chiffre précis, doit être évaluée à 2 ou 3.000 ouvriers. Il est indispensable de prévoir l'utilisation d'une partie de cette main d'œuvre le jour où les chantiers dont il s’agit seront terminés. Le service de l'inspection du travail a pris en main l'organisation des services de placement et le contrôle des fonds de chômage. En ce qui concerne les grands travaux, je signalais dans mon rapport du 20 novembre dernier que, sur un programme de 100 millions, des projets se montant à 14.439.400 francs avaient déjà reçu l'approbation de M. le ministre de la production industrielle et du travail. Ce dernier chiffre vient d'être porté à 22.124.400 francs. Les chantiers actuellement ouverts concernent principalement la voirie et des travaux d'asséchement.

Santé publique

Personnel. Aucun changement dans le personnel du service départemental d'hygiène : le Dr André Salmon, inspecteur d'hygiène adjoint (Fronstalag 162 n°4277) et le Dr Rémy, médecin spécialiste des dispensaires de la côte (1ère compagnie Offlag Xc) sont toujours absents.

Le Dr Julien Salmon, directeur du bureau d'hygiène de Boulogne-sur-Mer, a remis sa démission à la municipalité. Provisoirement et jusqu’à ce qu’un inspecteur adjoint soit nommé par le Ministre ou que le Dr André Salmon soit libéré, la municipalité a nommé le Dr Cherfils pour veiller à la bonne marche des services du bureau d'hygiène. Ce praticien est secondé pour les analyses biologiques ou chimiques par M. Sagot, pharmacien à Boulogne-sur-Mer.

362 médecins assurent les soins à la population civile, dont 274 médecins civils et 88 médecins démobilisés (sur ce dernier chiffre, 25 appartiennent à d'autres régions que le Nord de la France). Le nombre des médecins dépasse ainsi de 48 unités le chiffre du début novembre.

Hospitalisation. Aucun changement. Le nombre de lits disponibles paraît être suffisant pour le moment. l'aménagement de l'hôpital d'Arras se poursuit, les principaux services fonctionnent régulièrement.

Le manque de gaze à pansements et de coton se fait durement sentir dans toute la région.

A signaler également l'absence de farine de moutarde, de glycérine, d'éther et de graines de lin chez les grossistes où se fournissent les pharmaciens. Avec la mauvaise saison qui commence, il serait urgent que ces produits fussent délivrés aux hôpitaux et pharmaciens.

Protection de l'enfance. La distribution de lait frais aux nourrissons se fait régulièrement à peu près partout. d'après différents renseignements recueillis l'allaitement maternelle se généralise tout au moins jusqu’au quatrième mois.

La ration de lait frais distribué aux nourrissons n'est que de ¾ de litres. Elle est insuffisante à partir du 6e mois. Des instructions ont été données pour qu’un litre soit alloué aux nourrissons à partir du sixième mois.

L'approvisionnement du stock en lait concentré des pharmaciens, selon les modalités prescrites par le comité directeur de la pharmacie d'officine, ne se fait pas encore avec toute la régularité.

Il serait utile également que pour les nourrissons l'on puisse se procurer de la farine et des graines d'orge, d'avoine et de riz.

Lutte antituberculeuse. Les 15 dispensaires qui peuvent fonctionner sont arrêtés dans leur action par les difficultés de placements. Le placement Grancher est presque arrêté, les parents hésitant, encore plus dans les conditions actuelles, à se séparer de leurs enfants. d'autre part les difficultés créées pour se rendre dans la zone « interdite » ou en sortir, rendent impossibles les placements hors de la région. Les ressources en lit sont des plus restreintes, puisque le sanatorium d'Helfaut a été totalement occupé et transporté dans un pavillon du sanatorium de Liessies où le département ne dispose que de 250 lits au lieu de 500.

Lutte antivénérienne. Rien de particulier à signaler. Comme prévu, un nouveau centre de consultations va ouvrir à Béthune.

Maladies transmissibles. Aucune épidémie n'a été constatée. Les cas de scarlatine ou de diphtérie restent sporadique. A noter deux cas de fièvres typhoïdes dans la même famille à Brimeux à la suite de l'absorption de coquillages provenant de l'estuaire de la Canche.

Assistance

Mes rapports précédents ont donné un aperçu d l'activité des divers services d'assistance dans le Pas-de-Calais. En ce qui concerne plus spécialement les populations éprouvées par la guerre, l'action du Secours national se poursuit méthodiquement, avec la collaboration de mes services, des municipalités et des œuvres locales.

La distribution des secours en nature a commencé dans les localités les plus gravement atteintes : Courrières, Oignies, Calais, etc. une nouvelle répartition est prévue à très bref délai.

Il serait urgent, comme je l'ai signalé au service des réfugiés, que des couvertures fussent mises à ma disposition, le froid sévissant déjà dans mon département.

L'appel du Chef de l'État en faveur des prisonniers de guerre et des populations civiles a trouvé écho dans le Pas-de-Calais. Les résultats connus jusqu’à présent sont, dans l'ensemble, satisfaisants, malgré les destructions et le pillage.

J’ajoute que mon administration s’emploie à distribuer dans les moindres délais les secours en espèce spéciaux prévus par les instructions pour les différentes catégories de victimes de guerre (blessés civils ou ayants-droit de personnes décédées ; sinistrés qui n'ont pu réintégrer leur maison ; sinistrés ayant réintégré leur demeure mais privés de vêtements, de nourriture, etc.).

Je me permettrai ici de rappeler une question importante citée dans mon rapport général du 20 novembre 1940 et qui a fait, en particulier l'objet de ma lettre du 15 novembre au Secrétariat général à la famille et à la santé. En raison des circonstances, au début de l'occupation surtout, de nombreuses communes se sont vu dans l'obligation d'accorder des secours à des personnes privées de ressources et ne pouvant bénéficier d'aucune loi d'assistance, ni des allocations servies aux réfugiés ou aux « sans travail ». Les finances locales ne pouvant supporter de pareilles dépenses, l'aide de l'État parait s’imposer. Mutilés. Anciens combattants. La liaison entre l'Office départemental et ses ressortissants est complétement rétablie. Elle se manifeste par le nombre de lettres reçues (1730 en novembre) et de visiteurs venant à l'office (30 en moyenne par jour).

Les dispositions nouvelles prises en faveur des victimes de la guerre et les anciens combattants sont portées régulièrement à la connaissance des intéressés par communiqués à la presse. Le conseil d'administration de l'Office, comprenant 63 membres, ne peut-être réuni à cause des difficultés de communication. Les décisions continuent donc à être prises après examen et propositions des représentants des principaux groupements d'anciens combattants.

La Légion française des anciens combattants n'est pas encore constituée dans le département.

Dans mon dernier rapport, j’exprimais mon désir de voir créer un centre d'appareillage à Lille ; cette demande a reçu satisfaction.

Le centre spécial de réforme de Lille et la section départementale des pensions fonctionnent normalement.

La liaison de l'Office des mutilés et combattants avec le Secours national et la Croix-Rouge française continue d'être assurée dans des conditions très satisfaisantes.

La population du Pas-de-Calais fait preuve d'un moral excellent. Chacun, à son poste, apporte sa pierre à l'édifice. Le chômage diminue de plus en plus et si les difficultés inhérentes à la situation continuaient de s’amenuiser, notre département reprendrait une activité satisfaisante pour l'heure.

Il y a toute une partie de la population du Pas-de-Calais dont l'attitude mérite l'intérêt du Gouvernement ; c’est celle de la région côtière. Toujours des bombardements, toujours des destructions, toujours des victimes.

J’ai pris la respectueuse liberté, par rapport du 23 octobre, de vous demander si, certaines initiatives prises dans des administrations privées d'accorder une indemnité spéciale à leurs employés ne pourraient être appliquées aux fonctionnaires de toutes les administrations en résidence sur la côte.

En effet, des administrations privées (Banque de France, SNCF, des maisons industrielles et commerciales, des banques privées, des compagnies du gaz, des compagnies des eaux) ont attribué à leur personnel, une indemnité spéciale, appelée de noms différents, mais attribuée au titre des dangers courus dans la zone côtière, où les bombardements par aviation ou par artillerie de marine sont extrêmement fréquents.

Le taux des indemnités attribuées varie de 35% du traitement, avec minimum de 700 francs par mois (Banque de France) à 300 francs par mois (maison commerciale). Ne serait-il pas opportun d'accorder une indemnité de cette nature à nos fonctionnaires, lesquels demeurés à leur poste, en danger, qui passent leurs nuits à la cave et qui travaillent dans des conditions extrêmement difficiles, ne perçoivent rien.

Me serait-il permis en outre, de rappeler mon exposé du 12 décembre 1940 concernant l'émission des rôles et recouvrements d'impôts dans les villes de Boulogne-sur-Mer et de Calais.

Je pense que les mesures préconisées, si elles étaient retenues, seraient un grand réconfort en même temps qu’une preuve nouvelle de la sollicitude du Gouvernement pour les milliers de braves gens qui font et feront leur devoir jusqu’au bout, donnant un bel exemple non seulement de courage, mais encore de confiance dans les destinées de la France.